Une fois par mois, avec Véronique Soulé, nous mettons en avant deux invité·es lié·es par un livre. Cette fois-ci, c’est l’ouvrage Aux filles du conte, sorti aux Éditions du Pourquoi pas qui nous a fait réunir l’illustratrice Frédérique Bertrand et l’auteur Thomas Scotto. La première est mon invitée pour l’interview, le second répond à la rubrique (sonore !) Du tac au tac de Véronique Soulé.
L’interview du mercredi : Frédérique Bertrand
Pouvez-vous nous parler d’Aux filles du conte, le très bel ouvrage que vous avez illustré et qui vient de sortir aux Éditions du Pourquoi pas ?
Ce livre est une joie, c’est une force, une vraie source d’énergie. J’en ai un exemplaire dans mon sac, pour l’emporter partout avec moi et le lire et le relire encore, il me fait du bien. Même taille qu’une tablette de chocolat et mêmes bienfaits, avec l’avantage de ne pas fondre et de ne pas faire grossir ! Je l’ai dédicacé à ma fille, l’ayant dessiné, c’est un peu comme si je l’avais écrit moi-même, elle a 20 ans aujourd’hui, et je voulais lui offrir ce cadeau. J’aimerais qu’elle s’approprie elle aussi la force et les mots de Thomas Scotto, ils résonnent tellement avec ce que j’ai pu ressentir en regardant grandir une princesse…
Comment s’est passée la collaboration avec Thomas Scotto, l’auteur du texte ?
C’est l’éditeur qui m’a proposé le texte. Je n’ai pas réellement eu d’échanges avec Thomas pendant mon travail d’illustration, et je suis restée totalement libre dans l’interprétation que je pouvais en faire. Nous nous connaissons un peu avec Thomas, mais c’est notre première collaboration, j’aime son écriture, et j’avoue que ce texte en particulier arrivé jusqu’à moi, m’a tout de suite beaucoup beaucoup plu. À la fois délicat et puissant, disant les choses d’une belle manière, et sans détour. Une vraie force. Des mots qu’on a envie de partager, et que j’ai pris plaisir à mettre en images très simplement.
Vous utilisez ici une technique d’illustration différente de celles qu’on a l’habitude de vous voir utiliser, j’ai l’impression. Pouvez-vous nous en parler et nous dire pourquoi avoir choisi cette technique pour ce projet ?
Ce sont des petites filles dessinées à la plume, toutes petites, griffonnées sur feuilles volantes. Je les ai conservées comme elles sont arrivées sur le papier, avec leur énergie, et sans en changer quoi que ce soit. Je les ai simplement accueillies, avec leur identité et leur caractère, et elles ont chacune leur chemin à tracer. C’est aussi pour cette raison qu’elles sont dessinées au trait. À travers elles, je m’adresse à toutes les jeunes filles de tous les âges, celles qui ont été, celles qui sont, et celles qui seront. Comme toutes les filles du conte de Thomas.
Oublions le point de vue technique, pouvez-vous nous raconter comment vous avez mis en images ce texte ? Qu’est-ce qui vous a inspirée ?
J’ai emboîté le pas au texte de Thomas avec l’envie d’écrire moi aussi. À la plume et à l’encre, sur des feuilles volantes… De manière intuitive, à travers la figure de la petite fille, toute petite, qui arrive au monde de manière embryonnaire, façon pattes de mouche, guidée par la musique du conte. À la fois dessin, caractère, couleur et note de musique… j’ai composé avec le texte et j’ai proposé ma partition graphique. Les petites filles s’inscrivent dans la page au milieu du grand terrain de jeu de leur vie.
Comment choisissez-vous vos projets ?
Ici j’ai été choisie ! C’est le texte qui est venu me chercher… et je n’ai pas résisté, à la première lecture je me le suis instantanément approprié.
J’aimerais que vous nous parliez de votre parcours.
J’ai étudié à l’École des Beaux-Arts de Nancy, où je suis revenue vivre il y a 15 ans après quelques années parisiennes, et un bref passage à Toulouse. Si je ne savais pas concrètement comment me projeter quand j’étais étudiante, je savais repousser d’instinct tout ce qui ne me correspondait pas, et me laissais attirer par ce qui me « ressemblait » un peu… J’ai vite travaillé régulièrement en illustration dans la presse, et j’ai eu la chance de rencontrer mon éditeur (Olivier Douzou, Rouergue) très vite aussi à ma sortie de l’école.
Quelles étaient vos lectures d’enfant, d’adolescente ?
Les livres d’images au sens large… je n’étais pas une enfant lectrice. Ce sont vraiment les images qui captivaient mon attention, les dessins, les photos, les peintures… Je pouvais rester longtemps plongée devant des catalogues ou des encyclopédies illustrées par exemple ! Et puis il y avait tout de même les albums du Père Castor, ceux-là je les adorais, encore une fois les illustrations y étaient pour beaucoup !… Et puis la Bibliothèque rose avec Le Club des cinq, et enfin les romans policiers lorsque j’étais adolescente…
Y a-t-il, aujourd’hui, des illustrateurs et des illustratrices dont le travail vous touche particulièrement ?
Saul Steinberg, Topor et Tomi Ungerer pour le trait, la force, et tout ce qu’ils nous ont apporté, Benoît Jacques pour la démarche et la folie, Anne Herbauts pour la poésie, Maira Kalman pour la couleur et le voyage, Yann Kebbi pour le trait, la composition, le chantier ouvert, Dominique Goblet pour la densité et l’atmosphère, Wolf Elbruch pour la justesse et la force, Eva Lindström pour la singularité et la fraîcheur, Sara Fanelli pour plein de choses à la fois, Blexbolex pour la composition, les formes, les couleurs, Laura Carlin pour sa cuisine, Juliette Binet pour sa délicatesse, Jiři Šalamoun pour son grand appétit… et il en manque encore beaucoup !
Quelques mots sur vos prochains ouvrages ?
Un livre en peinture, mais tout en fourrure, et qui ronronne d’un bout à l’autre… pour les très jeunes lecteurs. À paraître au Rouergue en septembre prochain.
Bibliographie sélective :
- Aux filles du conte, illustration d’un texte de Thomas Scotto, Éditions du Pourquoi pas (2022).
- Bonjour Veaux, vaches, cochons, illustration d’un texte d’Olivier Douzou, Le Rouergue (2021).
- Les aoûtiens, illustration d’un texte d’ Olivier Douzou, Le Rouergue (2019), que nous avons chroniqué ici.
- Concentre-toi, illustration d’un texte de Catherine Grive, Rouergue (2018), que nous avons chroniqué ici.
- Tu vas voir, texte et illustration, Rouergue (2018).
- Le musée en pyjamarama, illustration d’un texte de Michaël Leblond, Rouergue (2016), que nous avons chroniqué ici.
- Le mensonge, illustration d’un texte de Catherine Grive, Rouergue (2016), que nous avons chroniqué ici.
- Les billes font la course, illustration d’un texte de Michaël Leblond, Rouergue (2015).
- Paris en pyjamarama, illustration d’un texte de Michaël Leblond, Rouergue (2014), que nous avons chroniqué ici.
- La valise, texte et illustration, Rouergue (2014).
- Le conte du prince en deux ou l’histoire d’une mémorable fessée, illustration d’un texte d’Olivier Douzou, Rouergue (2014).
- New York en Pyjamarama, illustration d’un texte de Michaël Leblond, Rouergue (2011).
- Des ailes dans le dos, illustration d’un texte de Catherine Grive, Rouergue (2009).
- Le vieil ogre, illustration d’un texte de Marie-Sabine Roger, Casterman (2008).
- Pierre et le l’ours, illustration d’un texte d’Olivier Douzou, MeMo (2007).
- Les Mauvais Perdants, illustration d’un texte d’Olivier Douzou, Rouergue (2001).
Le site de Frédérique Bertrand : http://www.frederiquebertrand.fr.
Du tac au tac… Thomas Scotto
Une fois par mois, Véronique Soulé (de l’émission Écoute, il y a un éléphant dans le jardin) nous propose une capsule sonore, Du tac au tac. Avec la complicité du comédien Lionel Chenail, elle pose des questions (im)pertinentes à un·e invité·e que nous avons déjà reçu·e sur La mare aux mots. Aujourd’hui, c’est Thomas Scotto qui répond à ses questions à l’occasion de la sortie de l’album Aux filles du conte.
Thomas Scotto est auteur. Son dernier ouvrage publié aux Éditions du Pourquoi pas (voir interview ci-dessus), Aux filles du conte est sorti le 5 avril dernier.
Bibliographie sélective :
- Aux filles du conte, texte illustré par Frédérique Bertrand, Éditions du Pourquoi pas (2022).
- Votez Victoire, roman illustré par Anjuna Boutan, L’école des loisirs (2022).
- Dans le ventre du loup, album illustré par Carmen Mok, D’eux (2021), que nous avons chroniqué ici.
- Même mon prénom est une chanson, roman illustré par Walter Glassof, Actes Sud Junior (2020), que nous avons chroniqué ici.
- Dans un brouillard de poche, roman illustré par Madeleine Pereira, Éditions du Pourquoi pas (2020).
- Notre neige à nous, roman illustré par Marie Novion, Mango Jeunesse (2019).
- Va te changer !, roman co-écrit avec Cathy Ytak et Gilles Abier, Éditions du Pourquoi pas (2019).
- La fleur qui me ressemble, album illustré par Nicolas Lacombe, L’élan vert (2019), que nous avons chroniqué ici.
- Mille et une miettes, roman illustré par Madeleine Pereira, Éditions du Pourquoi pas (2018).
- Kado, album illustré par Éric Battut, À pas de loups (2017), que nous avons chroniqué ici.
- Libres d’être, roman coécrit avec Cathy Ytak, Éditions du Pourquoi pas (2016), que nous avons chroniqué ici.
- Mes amis de partout, album illustré par Isabelle Simon, L’initiale (2016).
- Sans ailes, album illustré par Csil, À pas de loups (2016), que nous avons chroniqué ici.
- Un tout petit point, album illustré par Arno Célerier, Les apprentis rêveurs (2015), que nous avons chroniqué ici.
- Kodhja, album illustré par Régis Lejonc, Thierry Magnier (2015).
- Le grand écart, album illustré par Lucie Albon, Le diplodocus (2015).
- Une guerre pour moi, album illustré par Barroux, Les 400 coups (2015), que nous avons chroniqué ici.
- La vie encore, roman illustré par Zoé Thouron, Éditions du Pourquoi pas (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Un bond de géant, album illustré par Barroux, Kilowatt (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Pensées en suspension, poèmes illustrés par Thierry Murat, L’édune (2010), que nous avons chroniqué ici.
- Jérôme par cœur, album illustré par Olivier Tallec, Actes Sud Junior (2009), que nous avons chroniqué ici.
Retrouvez Thomas Scotto sur son blog : https://thomas-scotto.net et sur Instagram.
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !