Comme le mois dernier, deux invités pour un même livre. Cette fois-ci c’est le très beau Hector et Louis qui vient de sortir chez Actes Sud Junior. On a tout d’abord rendez-vous avec l’éditeur du livre, Kamy Pakdel puis c’est l’auteur-illustrateur, Sébastien Mourrain qui est l’invité de la rubrique (sonore !), Du tac au tac de Véronique Soulé. Bonne lecture, bonne écoute et bon mercredi !
L’interview du mercredi : Kamy Pakdel
Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
J’ai fait une école de design et d’art graphique à Paris avec une spécialisation en presse et édition. Après mes études, j’ai commencé en tant que graphiste dans une grande agence de communication et de publicité de luxe à l’étranger, mais j’ai très vite compris que le monde de la publicité ne me fascinait pas assez ! Je me suis donc dirigé vers la culture et surtout l’édition. J’ai été directeur artistique des éditions Autrement pendant plus de 10 ans et j’ai même cofondé une maison d’édition par la suite avec un ami.
Vous travaillez chez Actes Sud Junior depuis quelques années, quel est votre rôle au sein de la maison ?
J’y suis arrivé en 2013, en tant que directeur de création. Thierry Magnier m’avait chargé de travailler en équipe avec les éditeurs et les graphistes pour renouveler l’image d’Actes Sud junior et réinventer les choses. Et c’est ce qu’on essaie de faire en équipe, de renouveler sans cesse notre catalogue et donner un sens à ce qu’on aime partager et défendre.
Vous avez édité Hector et Louis de Sébastien Mourrain, notre autre invité du jour, pouvez-vous nous parler de cet album, de comment il est arrivé entre vos mains et de la collaboration avec Sébastien ?
J’avais déjà confié à Sébastien un livre à illustrer et je trouvais qu’il avait un vrai talent pour mettre en scène les situations d’une manière à la fois très simple et aussi très tendre et drôle. Son univers graphique me plaisait, il y avait beaucoup d’émotion dans son travail. Je lui avais proposé d’écrire et illustrer lui-même un livre pour nous et cela l’a intimidé ! C’est toujours un cap très complexe pour un illustrateur de passer à l’écriture pour la première fois. Il s’est passé plusieurs années avant qu’il revienne vers moi avec une idée et une première version de l’histoire. Par la suite nous avons beaucoup échangé et retravaillé ensemble pour arriver à Hector et Louis.
Comment choisissez-vous les projets que vous éditez ?
Tout simplement par coup de cœur et conviction ! Pour moi ce sont les deux éléments essentiels. Un coup de cœur pour la personne, pour son travail et ce qu’elle souhaite raconter et notre conviction à vouloir le partager et défendre auprès de nos lecteurs.
Quand on est éditeur on doit passer son temps à lire des manuscrits, avez-vous encore le temps de lire d’autres romans ?
Je suis directeur de création et j’édite des albums donc j’interviens sur la forme comme sur le fond, je m’occupe beaucoup de l’aspect graphique des livres. En plus du texte que je travaille avec l’auteur, je passe beaucoup de temps avec les illustrateurs pour améliorer leurs images et essayer de les pousser le plus loin possible dans leur expression graphique et artistique. Donc pour moi c’est nécessaire d’avoir un regard en permanence sur toute la vie culturelle et artistique autour de nous. Et c’est ainsi qu’on trouve l’inspiration. Donc pour répondre à votre question, non seulement je dois lire les manuscrits mais aussi rester curieux et ouvrir les yeux sur d’autres secteurs de création. Donc, hélas non, je ne trouve jamais assez de temps pour lire des romans.
Pour vous, qu’est-ce qu’un bon livre jeunesse ?
Je n’aime pas les livres qui donnent des leçons de morale d’une manière très lourde. J’aime les livres qui nous donnent à réfléchir et qui arrivent à nous émouvoir ! Des livres qui rendent les enfants encore plus curieux et les aident à se poser des bonnes questions dans la vie. Un bon livre de jeunesse ne doit pas sous-estimer l’intelligence de ses lecteurs.
Qu’est-ce qu’un bon éditeur ?
Pour moi un bon éditeur est une personne qui ose prendre des risques et fait des choix par conviction.
Quelles étaient vos lectures d’enfant, d’adolescent ?
Très éclectiques, des grands classiques comme Hemingway, Jack London en passant par les Tintin et d’autres BD qui sont typiques des lectures de jeunesse mais aussi des choses plus obscures comme Kafka ou Le capital de Karl Marx mais à 8 ans, je suis certain que je n’ai rien compris…
Pouvez-vous nous parler de quelques livres qui vont sortir prochainement sur lesquels vous avez travaillé ?
Difficile de choisir mais je suis très excité par plusieurs titres à venir, notamment La grande école le premier livre de jeunesse de Nicolas Mathieu. J’ai eu un vrai coup de cœur pour ce texte et j’ai même pleuré en le lisant. Ensuite avec Pierre-Henry Gomont qui est un excellent dessinateur, on a travaillé tous les trois pour trouver une nouvelle manière de narration. Je voulais que le texte de Nicolas soit lu à la fin du livre, sans être découpé ou interrompu ! Mais il fallait réinventer toute une sorte de narration comme un flashback avant d’arriver au texte final. Je vous en dis pas plus… Un autre livre qu’on a fait avec Olivier Tallec, pendant le confinement, un livre magnifique en lien avec la nature, les arbres et les plantes. On retrouve toute la malice d’Olivier dans ses images. Le titre provisoire est « Le livre des arbres et des plantes à découvrir » Et un autre livre dont je suis très fier aussi Forêt des frères par Yukiko Noritake. J’ai passé beaucoup de temps à réfléchir et accompagner Yukiko à mieux cerner son message et trouver l’aspect visuel. C’est un livre qui fait réfléchir mais qui ne porte pas de jugement ! C’est à l’enfant de décider… Et c’est un sujet qui nous concerne tous, la nature, l’homme, ses ambitions et sa vision du monde !
Du tac au tac… Sébastien Mourrain
Une fois par mois, Véronique Soulé (de l’émission Écoute, il y a un éléphant dans le jardin) nous propose une capsule sonore, Du tac au tac. Avec la complicité du comédien Lionel Chenail, elle pose des questions (im)pertinentes à un·e invité·e que nous avons déjà reçu·e sur La mare aux mots. Aujourd’hui, c’est Sébastien Mourrain qui répond à ses questions.
Sébastien Mourrain est auteur et illustrateur.
Bibliographie sélective :
- Hector et Louis, texte et illustration, Actes Sud Junior (2020).
- Louise ou l’enfance, illustration d’un texte de Delphine Perret, Les fourmis rouges (2020), que nous avons chroniqué ici.
- Tyranno petite sœur, illustration d’un texte de Davide Cali, Sarbacane (2019), que nous avons chroniqué ici.
- Be Happy ! Mes plus belles comédies musicales, illustration d’un texte de Susie Morgenstern, Didier Jeunesse (2018), que nous avons chroniqué ici.
- Top Car, illustration d’un texte de Davide Cali, Les éditions des éléphants (2018), que nous avons chroniqué ici.
- Tuk-Tuk express, illustration d’un texte de Didier Lévy, ABC Melody (2018).
- J’ai perdu ma langue, illustration d’un texte de Michaël Escoffier, Seuil Jeunesse (2018), que nous avons chroniqué ici.
- Bronto Megalo Saure, illustration d’un texte de Davide Cali, Sarbacane (2017), que nous avons chroniqué ici.
- Chez moi, illustration d’un texte de Davide Cali, Actes Sud Junior (2016).
- Santa Fruta, illustration d’un texte de Delphine Perret, Les fourmis rouges (2016), que nous avons chroniqué ici.
- Mister Gershwin, les gratte-ciels de la musique, illustration d’un texte de Susie Morgensten, Didier Jeunesse (2016).
- Chiens & Chats sous la loupe des scientifiques, illustration d’un texte d’Antonio Fischetti, Actes Sud Junior (2015), que nous avons chroniqué ici.
- Bigoudi, illustration d’un texte de Delphine Perret, Les fourmis rouges (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Moustachat, illustration d’un texte de Géraldine Elschner, L’élan Vert (2014).
- L’homme à la peau d’ours, illustration d’un texte d’Anne Jonas d’après les frères Grimm, Seuil Jeunesse (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Émile, le petit fifre, illustration d’un texte d’Anne de la Boulaye, Seuil Jeunesse (2013), que nous avons chroniqué ici.
- La fine mouche, illustration d’un texte de Jean Perrot, Seuil Jeunesse (2011).
- Serial rapteur, illustration d’un texte de Claude Carré, Actes Sud Junior (2009).
Retrouvez Sébastien Mourrain sur son tumblr : http://sebastienmourrain.tumblr.com.
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !