Aujourd’hui, on reçoit tout d’abord Mélanie Baligand, dont l’adaptation de La Belle et la Bête, sortie chez La Martinière Jeunesse, m’a émerveillé. Ensuite, en cette période de « fêtes » qui est loin d’être celle des animaux, j’ai trouvé judicieux de proposer à Camille Brunel, dont l’ouvrage Ces jeunes qui défendent les animaux vient de sortir à La Martinière Jeunesse également, de nous livrer ses coup de cœur et coup de gueule.
L’interview du mercredi : Mélanie Baligand
J’aimerais que vous nous présentiez, avec vos mots, votre dernier album La Belle et la Bête.
L’album La Belle et la Bête est le nouveau titre de la collection « Petit théâtre d’ombres ». Lorsqu’on ouvre le livre, un premier pop-up se forme, il faut insérer son portable, lampe-torche allumée vers le haut, dans le pop-up. Le haut du pop up est découpé au laser et l’illustration apparaît alors au plafond. Ensuite on tourne les pages comme un livre standard et les pop-up se forment au fur et à mesure et les illustrations changent. Le pop-up est également découpé sur les côtés pour laisser passer la lumière sur les pages et permettre la lecture.
Votre travail sur ce livre est incroyable, comment avez-vous travaillé sur ce projet ?
Merci beaucoup ! Pour l’instant, je ne commence pas les livres de la même manière à chaque fois. Pour celui-ci, après avoir choisi l’histoire, il a fallu que je la réécrive pour en faire une version qui tienne sur six double pages (et donc six découpes/illustrations au plafond). Ensuite, j’ai fait les croquis de ce que j’imaginais voir au plafond. Il y a eu ensuite plusieurs semaines de tests de découpe, et j’ai terminé par les illustrations qui se trouvent sur les pages de gauche et droite. Et pour terminer, on a fait les derniers ajustements (découpes, texte, illustrations) avec l’éditrice et le directeur artistique.
On trouve de nombreux livres de théâtre d’ombres, mais à ma connaissance c’est la première fois qu’on propose d’utiliser la lampe torche du téléphone (et que le livre soit prévu pour). C’est vous qui avez eu l’idée ?
Oui, c’est moi qui ai eu cette idée, et à ce jour je n’en ai pas vu d’autres (je m’étais renseignée). Je voulais notamment éviter les piles, à cause de la durée limitée.
Où trouvez-vous votre inspiration ?
Je la trouve dans tout ce que je lis, ce que je regarde. Et j’aime les activités manuelles et construire, créer des choses, manipuler le papier me donne des idées (comme celle que j’ai eue pour le petit théâtre d’ombres, par exemple).
Est-ce qu’il y a un autre conte ou classique que vous rêveriez d’illustrer ?
Oui j’aimerais beaucoup faire Le Livre de la Jungle, mais je n’ai pas encore réussi à réécrire l’histoire pour qu’elle s’adapte à six doubles pages.
Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
Je suis diplômée de l’école des Gobelins, l’école de l’image. C’était un BTS en alternance que j’ai effectué dans le groupe Editis, j’ai travaillé pour lui encore un an avant d’intégrer le groupe La Martinière en 2012. J’étais fabricante, je suis ensuite devenue deviseuse et responsable technique depuis quelques années.
Quelles étaient vos lectures d’enfant, d’adolescente ?
Essentiellement de la fantasy, du fantastique et de la science-fiction (romans ou BD, tout !).
Travaillez-vous actuellement sur un nouvel album ?
Oui, il y en a deux en cours : Le Chat botté et Le Petit Chaperon rouge. Et il y a également un projet en cours d’une autre version théâtre d’ombres en comptine, je vous en dirai plus la prochaine fois.
Bibliographie :
- La Belle et la Bête, texte et illustrations, La Martinière Jeunesse (2023), que nous avons chroniqué ici.
- Les Trois Petits Cochons, texte et illustrations, La Martinière Jeunesse (2022).
Retrouvez Mélanie Baligand sur Instagram.
Le coup de cœur et le coup de gueule de… Camille Brunel
Régulièrement, une personnalité de l’édition jeunesse (auteur·trice, illustrateur·trice, éditeur·trice…) nous parle de deux choses qui lui tiennent à cœur. Une chose qui l’a touché·e, ému·e ou qui lui a tout simplement plu et sur laquelle il·elle veut mettre un coup de projecteur, et au contraire quelque chose qui l’a énervé·e. Cette semaine, c’est Camille Brunel qui nous livre ses coup de cœur et coup de gueule…
Chère Mare aux mots,
Merci pour cette invitation à double tranchant, à me réjouir et à me plaindre, dans l’ordre que je veux… J’ai l’enthousiasme facile et intense (devant les beaux films surtout), la chouine aussi facile et intense (devant tout le reste) — canaliser cela par écrit n’a rien d’évident.
Mêlons les deux : j’ai un coup de cœur pour les gens qui poussent des coups de gueule — en particulier la jeune génération, cette inénarrable, hallucinante, irréductible Gen Z.
Je suis encore loin d’avoir 100 ans (encore 62 ans devant moi), mais je sens parfois, déjà, la lassitude le disputer à l’indignation. Exemple : hier. Oui, la France est dirigée par une extrême droite qui ne dit pas son nom, c’est le principe du côté obscur, revoyez Star Wars : le chancelier Palpatine & le terrible Dark Sidious sont une seule et même personne ! Et ce matin, mon téléphone était rempli d’une révolte unanime à nouveau : comment ça, après le vote d’une loi raciste déroulant le tapis rouge à toutes les inhumanités, le président aurait défendu un acteur accusé par des dizaines de femmes ?… Lassitude. Je ne m’attendais à rien d’autre. Depuis le 7 octobre dernier, et l’enfer qui s’abat de nouveau, plus que jamais, sur la Terre Sainte, ma confiance en l’homme n’a plus fait que chuter (elle ne partait pas de haut).
Pourtant, pourtant…
Les gens — jeunes, mais pas que, disons que les jeunes mènent le cortège — s’autorisent encore à feindre la surprise, voire à fulminer. Et s’il reste de l’oxygène ici-bas, c’est à l’idée que le monde est loin d’avoir baissé la tête.
Le temps des chevaliers Jedi reviendra, patience, courage ! Dans dix ans, quinze, peut-être quand j’en aurai 100 ? L’avenir est absolument incontrôlable, tout reste toujours possible : même le meilleur.
Et puis, comme j’écris ces quelques lignes en période de fêtes… un dernier coup de gueule puis de cœur.
Vivement la fin des ogres de Noël, de ces orgies de viande qu’on voudrait nous imposer, l’horrible foie gras, le cruel gigot d’agneau, la dinde plumée-décapitée, jusqu’aux amphibiens et aux gastéropodes, et tous les cochons, vaches, poissons et j’en passe, vivement la fin de tous ces plats faits d’animaux découpés. Certains d’entre eux sont des mammifères exactement comme nous, comment nous permettre de n’y voir que des ingrédients ? Il y a de l’esprit dans ces chairs, comme dans les nôtres. Nous pourrions les épargner, mais choisissons encore, collectivement, de les faire naître et de les avaler… peut-être plus pour longtemps ? Si la révolution gastronomique pouvait arriver dans les soixante-deux ans qui viennent, maximum… Ce serait pas mal…
Alors, enfin, coup de cœur pour celles avec qui je passerai mon réveillon, tout de mignardises d’origine végétale : ma mère, ma fiancée, ma lapine et ma chatte. Cette dernière sera la seule à profiter du saumon… c’est largement suffisant.
Camille
Camille Brunel est auteur pour adultes et pour les plus jeunes. Pour la jeunesse, il a livré quelques ouvrages, son dernier, Ces jeunes qui défendent les animaux, est sorti chez La Martinière en septembre dernier.
Bibliographie jeunesse :
- Ces jeunes qui défendent les animaux, documentaire, La Martinière Jeunesse (2023).
- Série Nos Amis les Animaux, illustré par Emmanuelle Tchoukriel, Casterman (3 tomes, 2023).
- Après nous, les animaux, roman, Casterman (2020).
Retrouvez Camille Brunel sur Instagram.
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !