Deux beaux romans qui nous parlent du racisme quotidien.
« Alex bol de riz » voilà ce qu’il est écrit sur le banc où déjeune chaque midi Alexandre, « Alex bol de riz », une autre fois c’est « Alex tronche de nem »… c’est idiot, les nems c’est vietnamien alors qu’Alex vient de Taïwan… mais on ne demande pas aux racistes d’avoir de la culture ! Les propos crétins sur ses origines sont le quotidien de l’adolescent, les gens qui s’étirent les yeux en lançant des « ching chang chong », ceux qui disent après un séisme que des morts en Chine c’est pas grave, y’en a plein des chinois, ceux qui le surnomment Jackie Chan,… Alors Alex doit lutter avec ses armes à lui, lui qui refuse le communautarisme, qui voudrait s’intégrer. Et si un séisme sur l’île de ses origines était un bon moyen de se faire aimer… mais pour ça il va falloir mentir…
Le banc est un très bon roman sur les préjugés racistes mais pas seulement ! On parle ici de précarité, de maman solo, d’amitié, d’amour, de ragots, du communautarisme et du mensonge… ce qu’on raconte un jour pour se rendre intéressant, mais qui finira toujours pas nous retomber dessus. Sandrine Kao est-elle même d’origine taïwanaise et elle s’attaque aux préjugés et aux blagues douteuses (qu’elle a certainement entendu elle-même). Elle nous livre un très beau roman, Alex est un personnage touchant, qui ne sait plus s’il est de là-bas où d’ici et pourquoi il est victime des moqueries. Avec douceur et subtilité, elle nous fait comprendre à quel point même une blague anodine peut faire mal. Un très beau roman.
Rosa est noire de peau dans une Amérique qui n’aime pas vraiment les gens comme elle. Née en 1913 elle grandit dans la peur du Ku Klux Klan et autres personnes violentes, dans la ségrégation. Pourtant Rosa a du mal à subir sans rien dire et ses parents et grands-parents ont peur qu’elle finisse lynchée. Quelques années plus tard, le premier décembre 1955 Rosa sera la première femme noire à refuser de se lever pour laisser sa place dans le bus à un blanc. Ce geste lui apportera beaucoup d’ennuis mais aussi de soutiens et la fera entrer dans l’histoire.
La vie de Rosa Parks racontée par son sourire (pas la meilleure idée du livre mais on oublie vite le concept étrange). L’histoire d’une femme qui s’est battue toute sa vie et qui est entrée dans l’histoire par un geste symbolique, fort. Éric Simard nous raconte cette histoire passionnante, de son éducation et sa prise de conscience à sa mort. Le roman est complété par une partie documentaire tout aussi intéressante. La femme noire qui refusa de se soumettre, un roman pour ne pas oublier ce qu’il s’est passé… il n’y a pas si longtemps…
Le roman a reçu le prix Renaudot des benjamins 2007.
Quelques pas de plus…
Nous avons déjà chroniqué des livres de Sandrine Kao (Les larmes de Lisette et Des crêpes à l’eau, ) et des livres d’Éric Simart (Marie-Antoinette à fleur de peau et Le crayon qui voulait voir la lune).
Enfantipages a aussi chroniqué Le banc et La femme noire qui refusa de se soumettre.
Le banc de Sandrine Kao Syros dans la collection Tempo 6€, 122×182 mm, 119 pages, imprimé en France chez un éditeur éco-responsable, 2013. |
La femme noire qui refusa de se soumettre, Rosa Parks d’Éric Simard, illustré par Carole Gourrat Oskar éditeur dans la collection Histoire et société 6,60€, 145×190 mm, 50 pages, imprimé en Europe, 2013. |
Gabriel
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
Super article! Je viens de lire Sweet Sixteen, très intéressant aussi sur ce thème!
Il sera chroniqué la semaine prochaine, normalement 🙂
Bonjour Gabriel,
Je note ces référence, principalement “le banc” de Sandrine Kao.
Me fille est métisse (française/vietnamienne). Jusque là je ne m’étais jamais posé de questions. Mais depuis quelques temps, quand je vais la chercher à la maternelle une petite fille me demande “c’est vrai que vous habitez en Chine?”. (Tendu de prendre l’avion matin et soir pour l’amener à la maternelle :p)
Alors ce n’est pas raciste, mais quand-même, à chaque fois, je me dis “mais qu’ont bien pu lui raconter ses parents ?”. Je ne suis pas du tout préparée aux problèmes de racisme, ni à ces fameuses “blagues douteuses” qui viendront, peut être, un jour…
Merci pour cette chronique (et pour toutes les autres ;))
Le livre s’adresse à des plus grands mais il est vraiment intéressant car il exprime bien ces “petites phrases anodines'” qu’on entends et qui peuvent faire mal. Que ce soit les confusions entre les pays d’Asie ou les a priori… Et c’est pas uniquement un roman là dessus, c’est aussi en ça qu’il est bon. Pour les plus petits il y a aussi des choses (va voir dans la fiche thématique sur les différences) mais malheureusement c’est souvent aux autres enfants qu’il faudrait les lire.