Aujourd’hui, c’est Odile Josselin, éditrice de chez Pastel, qui a accepté de répondre à nos questions. Il y a tellement de beaux livres qui sortent chez Pastel qu’on avait envie d’en savoir plus sur ses choix et sur son parcours. Ensuite, on part une nouvelle fois en vacances, cette fois avec Sébastien Mourrain ! Bon mercredi à vous.
L’interview du mercredi : Odile Josselin
Pastel, qu’est-ce que c’est ?
Pastel est une antenne éditoriale de l’école des loisirs basée à Bruxelles depuis 1988. L’école des loisirs souhaitait ouvrir son catalogue à de nouveaux univers artistiques et à des créateurs belges. Le catalogue est constitué uniquement d’albums illustrés.
Pastel est aussi une petite équipe de trois personnes dans une grande maison, en lien avec tous les autres collègues bruxellois, parisiens, français…
Vos choix éditoriaux sont dépendants de l’école des loisirs ou vous avez une totale liberté ?
L’école des loisirs me donne sa confiance pour les choix éditoriaux de Pastel. Et la discussion est ouverte lorsque cela est nécessaire. Ces choix s’inscrivent dans leur ligne qui défend la liberté de création, le respect et l’épanouissement des enfants. C’est une exigence que je m’efforce de ne jamais oublier. J’ai à cœur de participer à l’épanouissement du catalogue Pastel qui m’a été confié en pleine maturité.
Comment définiriez-vous la ligne éditoriale de Pastel ? Comment choisissez-vous les projets que vous éditez ? Il faut être belge pour être publié chez Pastel ?
Les histoires publiées chez Pastel touchent à l’intime. Elles permettent d’aborder les questions des enfants, le quotidien des tout-petits, ainsi que des sujets plus difficiles, avec pudeur et sans tabou. Ces narrations suivent des chemins graphiques parfois bien différents mais le lien entre les livres tient à l’empreinte affective. J’y recherche une forme de douceur, d’enveloppement dans un univers d’auteur. Il n’y a pas d’esbroufe, les formats des livres ne sont généralement pas très grands si cela ne sert pas l’histoire pour rester tout près des petits lecteurs (et ne pas être trop chers).
J’ai à cœur de ne pas perdre de vue à qui l’on s’adresse, aux sujets parfois plus difficiles qui nous entourent, que certains auteurs abordent avec finesse et émotion en si peu de pages. Et puis le rire que les auteurs déclenchent, du premier rendez-vous aux lectures à répétition aux enfants, ne cesse de montrer son pouvoir libérateur pour tous.
Pastel est avant tout une collection belge, perçue comme telle. 70 % des nouveautés sont de créateurs belges. Je donne une attention particulière aux jeunes créateurs belges. Il n’empêche qu’il y a toujours eu des auteurs français chez Pastel et que ce sont les projets qui comptent.
Les projets et les rencontres humaines qui donnent lieu à des collaborations et remises en question que les auteurs expérimentés n’hésitent pas à faire eux-mêmes. Par ailleurs, le rayonnement à l’étranger des auteurs de Pastel a consolidé les liens internationaux qui ont fait son succès au travers des traductions.
Parlez-nous de votre parcours personnel
J’ai débuté dans le secteur scolaire. Un petit passage chez Bordas puis 12 ans aux éditions Didier. J’y ai appris à travailler avec des pédagogues, des illustrateurs, des graphistes, faire des compromis, apprendre la rigueur… Mais j’ai toujours gardé une proximité avec le monde de l’enfance. Et ce fut une chance de participer à l’éclosion de Didier Jeunesse avec Michèle Moreau qui avait le désir de construire une ligne éditoriale jeunesse. Nous glissions un album entre deux manuels scolaires dans la production de l’époque. Et puis je suis arrivée chez Pastel en 2002 où j’ai été très heureuse de rencontrer Christiane Germain. Je n’imaginais pas que je prendrais la suite un jour. Voilà maintenant 8 ans que je m’occupe de ce superbe catalogue et que j’accompagne les auteurs de grand talent qui ont bien dû s’habituer à moi !
Quelles étaient vos lectures d’enfant, d’adolescente ?
Nous n’avions pas beaucoup d’albums illustrés à la maison et sans doute ont-ils disparu dans les déménagements. Mais j’ai les souvenirs des lectures du soir. Il y avait les histoires avec les animaux que j’adorais (La marmotte de Gerda Muller…), et les contes (Les contes du chat perché, Le petit poucet, Le vilain petit canard, Barbe bleue…) C’était aussi l’époque des livres-disques. Ce n’était pas facile pour tous ces héros de trouver leur chemin… J’ai le souvenir des sensations que cela procure et de quelle manière se prolongeaient dans mes jeux ces univers imaginaires. Et puis, les Petit Nicolas lus à voix haute avec une amie. Je peux les relire toujours avec le même plaisir pour une gorgée d’enfance. C’était ensuite l’époque des bibliothèques rose et verte avec Fantômette, Le club des cinq… qui étaient bien distrayantes même si j’étais moins proche de ces personnages que par exemple Sophie et Les petites filles modèles de la Comtesse de Ségur (dont je n’avais pas le souvenir de la langue utilisée avant de les avoir relues plus tard à une petite fille), Poil de carotte, Les hauts de hurlevent, Les misérables.
Au collège, lorsque j’ai lu L’herbe bleue et Moi, Christiane F, j’ai fait une vraie plongée dans une adolescence qui n’était pas la mienne. À côté de ça il y avait les récits « d’anticipation » de Barjavel, l’amusant Passe-muraille puis Huxley qui m’ont ouvert d’autres horizons. Et toujours les récits d’enfance terribles comme ceux d’Hervé Bazin, Joseph Joffo. Puis au lycée, j’ai aimé lire les auteurs classiques (Zola, Balzac, même si la passion de ma prof de français pour Madame Bovary était un peu trop débordante à mon goût). Et des auteurs plus récents comme Boris Vian, Jean-Paul Sartre, Albert Camus…
Votre catalogue d’automne 2016 était extraordinaire (des petits bijoux signés Anne Brouillard, Ingrid Godon, Frédéric Stehr, Michel Van Zeveren, Émile Jadoul, Jeanne Ashbé, Christian Voltz…), qu’est-ce qu’on va découvrir chez Pastel en début d’année prochaine ?
On va débuter l’année avec les Bonnes résolutions de Catherine Grive et Jean-Luc Englebert, prendre le temps avec Le petit escargot de Rascal, se faire des Copains-câlins à la crèche avec Frédéric Stehr et réfléchir au monde qui nous entoure dans un livre profond et touchant de Sarah V. et Claude K. Dubois, Bonhomme. Michel Van Zeveren est parti pour nous faire dessiner, rire et réfléchir avec Dessine-moi un petit prince et Carll Cneut s’est mis au défi de remettre en scène La fée sorcière dans un livre somptueux. Anne-Isabelle le Touzé donne vie à Monsieur Émile et Petit Tom qui mêlent leurs imaginaires, Martine Bourre refait un tour au Moyen-Age tant aimé des enfants dans Gilou Troubadour, Anne-Catherine De Boel nous fait voyager sur un conte animalier africain d’Alain-Serge Dzotap Le roi et le premier venu, la jeune talentueuse Lina Mumgaudyte propose Le dernier poisson, Emile Jadoul mesure ses personnages dans On fait la taille ? Un nouvel univers un peu cruel venu d’Angleterre Tu m’attraperas pas !, le génial Canard fermier d’Helen Oxenbury en version tout-carton pour les petits et avant l’été un inédit de Max Velthuijs !
Des livres et des auteurs si différents et tellement uniques que vous trouverez encore, j’espère, extraordinaires !
Quelques livres Pastel que l’on a chroniqué :
- La fourmi et le loup, de Jeanne Ashbé (2016), que nous avons chroniqué ici.
- La grande forêt : le pays des Chintiens, d’Anne Brouillard (2016), que nous avons chroniqué ici.
- Le bain de Berk, de Julien Béziat (2016), que nous avons chroniqué ici.
- 8 minutes et 19 secondes, texte de Rascal, photographies d’Hubert Grooteclaes (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Mère Méduse, de Kitty Crowther (2014), que nous avons chroniqué ici.
- C’est Papy qui choisit, texte de Jean Leroy, illustré par Jean-Luc Englebert (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Le grand bateau de Grand Ours, texte d’Eve Bunting, illustré par Nancy Carpenter (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Papa-île, d’Émile Jadoul (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Est-ce que la maîtresse dort à l’école ?, texte de Carole Fives, illustré par Anne Isabelle Le Touzé (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Bonnes vacances, Lou !, de Jeanne Ashbé (2014), que nous avons chroniqué ici.
- L’ours qui danse, de Rascal (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Comme un secret, texte d’Émile Jadoul, illustré par Émile Jadoul et Catherine Pineur (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Anoki, texte de Jean Leroy, illustré par Emmanuelle Eeckhout (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Le Mange-doudous, de Julien Béziat (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Ouste !, texte de Sally Grindley (traduit par Maurice Lomré), illustré par Peter Utton (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Les poupées c’est pour les filles, texte de Ludovic Flamant, illustré par Jean-Luc Englebert (2013), que nous avons chroniqué ici.
Retrouvez tout le catalogue Pastel sur son site http://www.ecoledesloisirs.fr/collection/pastel.
En vacances avec… Sébastien Mourrain
Régulièrement, je pars en vacances avec un. e artiste (je sais vous m’enviez). Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais moi j’adore partir comme ça avec quelqu’un, on apprend à la.le connaître notamment par rapport à ses goûts… cet.te artiste va donc profiter de ce voyage pour me faire découvrir des choses. On emporte ce qu’elle.il veut me faire découvrir. On ne se charge pas trop… 5 de chaque ! 5 albums jeunesse, 5 romans, 5 DVD, 5 CD, sur la route on parlera aussi de 5 artistes qu’il.elle veut me présenter et c’est elle.lui qui choisit où l’on va… 5 destinations de son choix. Cette fois-ci, c’est avec Sébastien Mourrain que je pars ! Allez en route !
- La première fois que je suis née, Cuvellier/Dutertre
- L’arbre généreux, Shel Silverstein
- Catherine Certitude, Modiano/Sempé
- Moi, j’attends…, Cali Bloch
- Le chapeau volant, Ungerer
- Contes fantastiques, Maupassant
- Ravage, Barjavel
- Nouvelles histoires extraordinaires, Poe
- Le passe muraille, Aymé
- Dr Jekyll et Mr Hyde, Stevenson
- Vol au-dessus d’un nid de coucou, Foreman
- Orange mécanique, Kubrick
- Les aventures de Jack Burton, Carpenter
- Soleil Vert, Fleischer
- Edward aux mains d’argent, Burton
- Daft Punk, Homework
- The Cure, The head on the door
- Bob Dylan, The very best of
- Lou Reed, Transformer
- Easy Rider, Bande Originale
5 Artistes :
- Jérôme Bosch
- César
- Max Ernst
- Germaine Richier
- Francis Bacon
5 lieux :
- Parangtritis, Java
- Skyros, Grèce
- La plage de Tanchet, Château-d’Olonne
- L’île Tudy, Bretagne
- Le Bocal 83 rue de Marseille 69007 Lyon
Sébastien Mourrain est illustrateur.
Bibliographie sélective :
- Chez moi, illustration d’un texte de Davide Cali, Actes Sud Junior (2016).
- Santa Fruta, illustration d’un texte de Delphine Perret, Les foumis rouges (2016).
- Mister Gershwin, les gratte-ciels de la musique, illustration d’un texte de Susie Morgensten, Didier Jeunesse (2016).
- Chiens & Chats sous la loupe des scientifiques, illustration d’un texte d’Antonio Fischetti, Actes Sud Junior (2015), que nous avons chroniqué ici.
- Bigoudi, illustration d’un texte de Delphine Perret, Les fourmis rouges (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Moustachat, illustration d’un texte de Géraldine Elschner, L’élan Vert (2014).
- L’homme à la peau d’ours, illustration d’un texte d’Anne Jonas d’après les frères Grimm, Seuil Jeunesse (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Émile, le petit fifre, illustration d’un texte d’Anne de la Boulaye, Seuil Jeunesse (2013), que nous avons chroniqué ici.
- La fine mouche, illustration d’un texte de Jean Perrot, Seuil Jeunesse (2011).
- Serial rapteur, illustration d’un texte de Claude Carré, Actes Sud Junior (2009).
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !