Les deux bandes dessinées présentées aujourd’hui parlent d’angoisse et de peur aux adolescent·es avec justesse, un peu de dérision, mais surtout beaucoup de sérieux.
Premier jour de collège pour Elliot. Nouveau départ, nouvel établissement, nouveaux·elles ami·es, nouvelles angoisses ! Sous l’apparence d’une boule sur pattes un peu dégoûtante, un compagnon imaginaire apparaît dans la vie d’Elliot et l’accompagne partout, extériorisant toutes ses peurs et réflexions les plus farfelues. Au fil des pages, le jeune adolescent tantôt cède à la panique, tantôt parvient à prendre de la hauteur et ne plus l’écouter. L’année de sixième s’annonce intense pour Elliot !
« Bienvenue dans le monde merveilleux de l’adolescence. » On connaissait Théo Grosjean pour sa série à succès L’Homme le plus flippé du monde (Delcourt). Avec Elliot au collège, il reprend son sujet de prédilection : ses nombreuses angoisses, qu’il infuse dans l’un des moments de la vie les plus stressants, il faut bien le dire : l’entrée au collège. Très certainement inspiré par des séries comme Lou de Julien Neel (Glénat) ou Les Cahiers d’Esther de Riad Sattouf (Allary), l’auteur explique avoir voulu créer un personnage que les lecteur·rices pourraient suivre sur plusieurs tomes,
au fil des années, afin de grandir avec lui. Dans ce premier volume, Elliot entre donc dans l’arène du collège et tente de se faire une place dans ce monde aux hiérarchies bien établies. Intégrer ou pas le groupe des populaires, se trouver des allié·es pour tenir tête aux brutes, tomber amoureux, être choisi en dernier pour former les équipes de sport, se montrer en maillot de bain à la piscine… Autant de situations auxquelles, adulte comme ado, on peut s’identifier sans trop de difficultés. À travers ses différents personnages, Théo Grosjean met en avant la multitude des réalités auxquelles sont confronté·es les adolescent·es : une famille monoparentale, la grande précarité, les violences intrafamiliales. Tout cela est traité avec beaucoup de pudeur et de douceur, et surtout énormément d’humour. À offrir aux ados, à faire lire aux parents !
Lucas a 13 ans et malgré le temps qui passe, toujours peur du noir. La pénombre est pour lui pleine de monstres qu’il ne sait pas comment affronter. Ses camarades de collège les plus cruel·les le harcèlent quotidiennement en le plaçant volontairement dans des situations angoissantes. Pour évacuer son mal-être, Lucas a sa batterie électrique et l’écoute de sa grande sœur Flora. Alors que cette dernière s’apprête à quitter la maison pour entrer à l’université, Lucas n’a plus d’autre choix que de se confronter à ses peurs.
Avec Noir comme l’eau la nuit, Elsa Bordier et Constance Bouckaert s’attaquent elles aussi à la question de l’angoisse chez les adolescent·es. Chaque fois que Lucas se trouve dans l’obscurité, il sent autour du lui comme une énorme masse noire et liquide, que ce soit le soir devant la télé, la nuit dans son lit ou lorsque ses harceleur·euses l’enferment dans un placard au collège.
C’est grâce à deux rencontres que Lucas parvient finalement à se détacher de sa terreur : un vieil artiste aperçu au bord d’un lac avec qui il sympathise et une élève qui lui propose de rejoindre son groupe de rock. Si l’univers graphique et les personnages nous embarquent très rapidement dans l’histoire, celle-ci est malheureusement bien trop courte pour répondre à toutes nos interrogations. Les lecteur·rices ont à peine le temps de s’attacher à Lucas qu’il faut déjà le quitter ! Malgré cette pagination limitée, ce titre parvient tout de même à mettre en avant des sujets forts comme celui du harcèlement scolaire et, en parallèle, de l’importance des amitiés choisies pour surmonter les épreuves. Par ailleurs, Lucas est un personnage métis et à l’expression de genre très fluide. Une représentation qui fait du bien dans le paysage de la BD jeunesse !
Elliot au collège – T1 – Panique en sixième de Théo GrosjeanDupuis 14,50 €, 240×320 mm, 62 pages, imprimé en France chez un imprimeur écoresponsable, 2023. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Noir comme l’eau la nuit Scénario d‘Elsa Bordier, dessins de Constance BouckaertKinaye 16,90 €, 227×297 mm, 58 pages, imprimé en Slovénie, 2024. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |

Aime tellement parler des livres qu’elle en a fait son métier et son hobby ! Libraire généraliste la semaine, Manon écrit pour plusieurs médias le week-end et monte sur des volcans endormis en Auvergne dès qu’il lui reste cinq minutes.

de Théo Grosjean