Aujourd’hui, je vous propose deux albums sensiblement différents : l’un, inspiré de la chanson Still this love goes on, est un cri d’amour aux communautés autochtones américaines tandis que l’autre, sous la forme d’une rêverie, revient sur les conséquences du changement climatique. Différents, donc, mais qui tous deux nous rappellent la nécessité de préserver le vivant.
C’est une chanson douce et forte à la fois : une chanson qui dit l’amour des saisons, des paysages et des peuples. Une chanson qui célèbre les éléments, la nature et les hommes et les femmes. Une chanson qu’il faut continuer à chanter parce qu’elle dit la puissance d’un peuple : les autochtones américains.
Reprenant le texte de la chanson folk Still this love goes on de Buffy Saint-Marie (qu’il faut absolument écouter en lisant l’album car elle nous replonge dans toute la vague folk des années 1960), Toujours, mon amour reste est une ode aux communautés natives. Il faut lire cet album à voix haute, comme un poème, en prenant soin de détacher chaque mot. Alors, on comprend la puissance de cette chanson qui pourrait paraître un brin naïve —
hommage à la nature et à ses trésors, au rythme des saisons, mais qui se révèle surtout être un chant d’espoir, un chant qui dit l’existence riche des communautés maltraitées encore aujourd’hui par l’histoire et la mémoire américaine. De ce beau texte Julie Flett créée des images, un univers poétique aux teintes chaudes. Page après page se succèdent des étendues neigeuses, des océans limpides et des champs de fleurs jaunes. Solaire, l’album séduit par sa simplicité et l’émotion qui se dégage de ce texte sincère et émouvant qu’on a envie de relire et de réécouter encore et encore.
Un matin, Théo se réveille avec une drôle d’impression : il a les pieds dans l’eau ! Catastrophe, sa chambre est totalement inondée. En ouvrant la porte de chez lui il découvre que le monde a bien changé : les mouettes se ruent sur lui, tandis que des icebergs se rapprochent dangereusement… Que s’est-il passé ? À la télévision on dit que le sens du Gulf Stream s’est inversé tandis que les parents de Théo ne sont toujours pas là ! Et si ce n’était qu’un mauvais rêve ?
Il y a des rêves qui s’inspirent de la réalité et des rêves qui deviennent réalité. Celui de Théo pourrait être des deux. Car, soyons clair·e, l’album raconte le rêve/cauchemar de Théo, un petit garçon inquiet que ses parents ne soient toujours pas rentrés. Dans son subconscient, l’enfant imagine un scénario catastrophe : une montée des eaux d’une rapidité hallucinante qui fait que des icebergs se baladent à proximité des Alpes. Tout cela pourrait être amusant, mais dans cet univers parallèle (quoique pas si lointain de ce que nous vivons), les ours polaires meurent de faim et de soif, contraints de vivre dans de vertes prairies, les Esquimaux — nouveaux·elles migrant·es climatiques — se voient attribuer par les États des bottes vertes pour les empêcher d’avoir les pieds mouillés. À la fois drôle et cynique, Hans Traxler joue ici le mauvais rôle de Cassandre. Il nous force, sous couvert d’humour, à regarder les dégâts causés par le réchauffement de la terre et les catastrophes qui peuvent aujourd’hui se produire. Délicat et sobre, l’album propose une vignette par page dépeignant le terrible cauchemar de Théo. Dans les dernières pages toutefois, la réalité réapparaît — même si elle semble, dans les formes et les illustrations adoptées, bien proche du rêve du héros. Ainsi, le père de Théo souhaite emmener toute la famille voir les pyramides en Égypte, une idée que rejette catégoriquement son fils, car sa nuit tumultueuse n’a fait que renforcer sa conscience écologique.
Toujours, mon amour reste![]() ![]() de Julie Flett d’après la chanson de Buffy Sainte-Marie (traduit de l’anglais par Fanny Britt) La Pastèque 18 €, 236×285 mm, 40 pages, imprimé en France, 2023. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Théo et les bottes vertes![]() ![]() de Hans Traxler (traduit du tchèque par Genia Català) La Joie de Lire 16 €, 246×327 mm, 52 pages, imprimé en France, 2023. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |

Née au début des années 90s, tour à tour professeure, amoureuse de la vie, de la littérature, de la musique, des paysages (bourguignons de son enfance, mais pas que…), des films d’Agnès Varda, des vers de Cécile Coulon et des bulles de Brétecher. Elle a fait siens ces mots de Victor Hugo “Ceux qui vivent ce sont ceux qui luttent”.


