On le sait, l’évolution de l’humanité est jalonnée d’une multitude de destins et d’idées qui ont bouleversé le cours des choses, parfois en bien, d’autres fois en mal. Aujourd’hui, je vous invite à me suivre pour une plongée dans les aventures des petites histoires dans la grande !
Un beau matin, un immense machin inconnu tombe tout droit du ciel et atterrit au milieu d’un tranquille village de papillons. Toutes et tous ont alors leur mot à dire sur la raison de cette présence qui vient briser leur quotidien : le Philosophe, le Savant, le Curieux, le Chef des armées ou encore le Pessimiste clament à qui veut l’entendre leur avis sur la question. Jusqu’à ce qu’une petite fille papillon ose simplement s’avancer et aller à la rencontre de cette OVNI pour en percer le mystérieux secret.
Un léger goût de mangue nous plonge dans un univers fourmillant de détails à hauteur d’insectes, où une canette vide peut devenir une arme et une bouteille abandonnée un sommet à gravir. Dans ce monde lilliputien, tout prend une proportion bien différente et un fruit tombé à terre déclenche un mouvement de panique ! Signe néfaste ? Déclaration de guerre ? Les esprits turbinent, s’échauffent ! On s’interroge et on s’inquiète ! Alors qu’un brin de curiosité et beaucoup d’innocence suffit à la petite fille papillon pour découvrir le trésor qui se cache au cœur de ce gros truc étranger : quelque chose de bon, de sucré et de pas menaçant du tout ! Chacun·e y croque à son tour et donne son avis (encore !) sur ce qu’évoque ce goût. Visiblement, chez les insectes comme chez les humain·es, l’inconnu engendre bien des craintes, des questions et des divergences d’opinions.
Les sublimes illustrations de Marco Soma donnent vie à ce royaume du minuscule. Les couleurs chaudes et sépia ainsi que les grands yeux rappelant les personnages de dessins animés des années 30
nous plongent dans une ambiance rétro délicieuse, où l’on se perd à contempler le soin accordé aux détails et aux décors. D’ailleurs, on peut même y voir un questionnement en toile de fond sur les déchets jetés dans la nature, certes revalorisés ici par les papillons astucieux, mais tout de même signe de pollution.
Un léger goût de mangue invite à s’interroger sur ce qui nous entoure, à le percevoir d’un autre œil. Il illustre l’esprit souvent méfiant des adultes face à ce qu’iels ne connaissent pas, alors que les enfants débordent d’un appétit de découvrir le monde avec candeur. Enfin, ce très beau livre explique que partagé, un gros problème peut devenir un tout petit souci !
À l’aide de quinze courtes biographies, les lecteurs et lectrices sont invité·es à trouver quelle femme se cache derrière chaque destinée, puis à identifier à quel portrait elle renvoie grâce à un ingénieux système de couverture agrémentée de volets coulissants.
Dans la lignée du superbe projet Who’s she de Playeress, ce Devine qui je suis, Femmes illustres revient sur les combats que ces figures féministes de tout bord ont menés et rappelle les victoires qu’elles ont remportées. Le livre balaie assez largement les époques et les continents et on y découvre entre autres des artistes (Frida Kahlo, Niki de Saint Phalle…), des scientifiques (Marie Curie, Hedy Lamarr…) ou encore des militantes (Wangari Maathai, Malala Yousafzai…).
Composés d’une double page agrémentée d’une frise illustrée où l’on peut voir les temps forts et les personnes qui ont marqué ces vies, les portraits sont ponctués d’anecdotes et de détails qui serviront d’indices pour trouver qui se cache derrière. Bien que la plupart soient des attributs et caractéristiques physiques, ce sont les parcours inspirants de ces quinze figures historiques qui retiennent toute notre attention !
Ce petit livre ludique nous emmène sur les pas de femmes qui ont œuvré pour faire progresser les mœurs, et dont on découvre les actes avant l’apparence.
Aurore Dupin, célèbre sous son nom de plume George Sand, est une femme qui a bousculé les codes du genre de son époque. Portant des pantalons, des hauts-de-forme, s’engageant politiquement et exerçant le métier d’écrivaine, elle a vécu une existence éclatante dont Séverine Vidal tire une biographie romancée : George Sand, l’indomptée.
Dans ce livre, l’autrice se penche sur la petite enfance et la vie de jeune adulte de George Sand, marquée très tôt par le deuil et l’abandon. Alors qu’elle n’a que 4 ans, elle quitte l’Espagne qu’elle a toujours connue avec sa famille pour rejoindre Nohant, là où son père a grandi et où demeure sa grand-mère. Mais peu après leur arrivée, les drames se succèdent et le malheur semble s’acharner à vouloir détruire leur bonheur. Très tôt, Aurore s’évade dans ses rêveries et se perd dans un monde fantasmagorique bien plus beau et doux que la réalité qui l’entoure. En effet, tiraillée entre sa mère et sa grand-mère, deux figures maternelles opposées qui se disputent sans arrêt et à propos de tout, la petite fille opte vite pour l’émancipation. Son tempérament vif et débordant d’imagination l’aide à surmonter l’ennui, la tristesse et la solitude dans laquelle elle est parfois plongée. En grandissant, Aurore cause de plus en plus de soucis à ses tutrices, n’en faisant qu’à sa tête, fréquentant les villageois·es et en bravant tous les interdits cloisonnant les corps et les esprits des femmes du XIXe siècle. Dès son plus jeune âge, elle est habitée par une soif de liberté que rien n’arrêtera. C’est ainsi que son caractère romanesque et rebelle s’affirme au fil des pages, tandis que son amour profond de la nature en général et de Nohant en particulier résonne au travers de chaque phrase.
J’ai dévoré ce portrait passionnant de George Sand, porté par une écriture claire et prenante. Un livre coup de cœur !
Si l’adolescence est une période connue pour être marquée par les conflits entre les enfants et les parents, c’est particulièrement le cas pour Mandy. En effet, la jeune femme de 17 ans est l’opposée de sa mère, autant sur le plan physique que sur celui beaucoup plus atypique des… pouvoirs ! Car elle est la fille de la célèbre superhéroïne Starfire, qui peut voler et anéantir les pires ennemi·es de l’univers aux côtés de son équipe des Titans ! Mandy est aussi terrienne et ordinaire que sa mère est extra-terrestre et brillante, et elle se sent incomprise et écrasée par les contrecoups d’une renommée qui ne les laissent jamais tranquilles. Alors, pour s’émanciper, Mandy le déclare haut et fort : elle n’est PAS Starfire !
S’adressant à un public de jeunes adultes, I am not Starfire bouscule les codes des comics où les femmes sont trop souvent stéréotypées et hyper sexualisées (et ça fait plaisir !). L’autrice présente un personnage gay, au look affirmé et au caractère assez complexe, cherchant à sortir de l’ombre de sa mère et à se défaire des attentes que la société lui portent. Et pour cela, elle affiche un style gothique, se teint les cheveux en noir et se montre très méfiante envers le monde qui l’entoure. Le contraire de Starfire, toujours lumineuse et souriante, adepte des bains de foule et des autographes ! Tout semble tellement les opposer que Mandy se considère comme l’antagoniste de sa mère, mais un tournant inattendu de l’histoire va lui prouver que ce n’est pas le cas et permettre aux deux femmes de renouer le dialogue.
L’incompréhension entre les deux protagonistes, la projection des fantasmes et des désirs que porte la société sur Mandy abordent sous un angle intéressant la thématique du conflit familial tout en matérialisant des sentiments parfois troubles, que l’on peut avoir du mal à définir lorsqu’on est ado.
Le récit est porté par les illustrations vibrantes de Yoshi Yoshitani, qui possède un style actuel très accrocheur et une palette de couleurs chatoyantes incroyables !
I am not Starfire traite du rapport au corps et à l’intimité, ainsi que la découverte de soi au travers de la quête d’indépendance et d’identité. Un très bon comics LGBTQIA+, au rythme soutenu et haletant.
Du haut de ses 12 ans, Maurice voit les nazis envahir Bruxelles, sa ville natale où il vit avec sa famille. Ensemble, iels sont contraint·es d’abandonner leur foyer et commencer un long exil qui les mènera à l’autre bout du monde. Comme des milliers de réfugié·es, les Fajgenbaum vont fuir à travers l’Europe, puis vont devoir quitter le continent, direction la Jamaïque. La guerre de Maurice est une histoire vraie, celle de l’exode et du déracinement, mais aussi celle de l’union et de la persévérance.
J’ai beaucoup apprécié cette biographie abordée par le prisme d’une bande dessinée pouvant toucher un large public. Les illustrations sont accessibles, les personnages attachants et très expressifs et le récit en lui-même est épique ! Ces énormes paquebots traversant l’océan Atlantique chargés de passager·ères échappant à la Guerre direction des camps d’internements. Au cours de cette biographie dessinée, on suit Maurice et ses proches dans leur fuite pour survivre, on pénètre dans cette clandestinité de chaque instant qu’iels doivent endosser pour continuer à gagner leurs vies et garder leur intégrité, on se heurte au choc des cultures et à la nécessité de résilience de ces hommes et femmes exilé·es. Pourtant, ce livre n’est pas sombre, au contraire il est plein d’espoir ! Malgré la situation difficile dans laquelle sont entraînés les personnages, iels savent rebondir et font preuve d’un esprit d’entraide très fort. Maurice ne perd à aucun moment de vue son rêve de devenir avocat : il va apprendre l’anglais à l’aide d’un petit dictionnaire bilingue qui ne le quittera plus jamais et ne baissera jamais les bras face aux obstacles qui se dressent devant lui.
Le traitement des couleurs et le choix de l’aquarelle procurent une certaine luminosité à cette histoire, nous plongeant dans une ambiance sépia aux allures de vieil album de famille, où des passages plus légers éclairent cette période sombre.
Cet ouvrage est enrichi par des notes écrites par fils de Maurice lui-même, complétées par des photos de Maurice et de ses proches. Véritable témoignage apportant une contribution importante au devoir de mémoire, La guerre de Maurice est une bande dessinée que je ne peux que vous conseiller.
Un léger goût de mangue![]() Texte de Davide Cali, illustré par Marco SomaSarbacane 16,50 €, 240×340 mm, 32 pages, imprimé en France chez un imprimeur écoresponsable, 2022. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Devine qui je suis, Femmes illustres![]() ![]() Texte de Pascal Prévot, illustré par Nicolas Pitz Milan 13,90 €, 215×245 mm, 40 pages, imprimé en Chine chez un imprimeur écoresponsable, 2021. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
I am not Starfire![]() Texte de Mariko Tamaki (traduit de l’anglais par Sarah Dali), illustré par Yoshi Yoshitani Urban DC dans la collection Urban Link 14,50 €, 155×229 mm, 176 pages, imprimé en France, 2022. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
George Sand, L’indomptée![]() de Séverine Vidal Rageot 14,90 €, 145×210 mm, 240 pages, imprimé en Espagne chez un imprimeur écoresponsable, 2022. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
La guerre de Maurice![]() Texte de Cary Fagan (traduit de l’anglais par Ilona Meyer et Caroline Drouault), illustré par Enzo Lord Mariano Les éditions des éléphants 16 €, 230×280 mm, 56 pages, imprimé en Slovaquie chez un imprimeur écoresponsable, 2021. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |

Approche de la trentaine, et en a profité pour perfectionner ces petites choses si importantes qui font un tout. Vivre les livres, dessiner et créer des trucs, pour relier le dehors au dedans. Aime la nature, les histoires qui donnent espoir, celles aux allures de vieux grimoires, les BD hypersensibles et les images colorées.
Se retrouve dans le travail de Tarmasz, de Tayou Matsumoto, de Bretch Evens.


Texte de Davide Cali, illustré par Marco Soma