Aujourd’hui, premier mercredi pour moi ! L’invitée de l’interview, Raphaële Frier, m’avait touchée avec Angèle et le Cerisier, et fait sourire avec Je vous présente Gaston, et j’ai donc eu envie d’en savoir un peu plus sur cette auteur. Ensuite, pour notre rubrique Parlez-moi de…, on revient sur une découverte récente : Bonhomme, sa maison, et pluie, et pluie, avec son auteur et illustratrice Emmanuelle Bastien, et son éditrice, Chloé Marquaire des éditions L’agrume. Bon mercredi à vous !
L’interview du mercredi : Raphaële Frier
Quel a été votre parcours ?
Je suis née à Lyon, en 1970. J’ai grandi à Bordeaux, puis en région parisienne. Beaucoup de rêverie pendant l’enfance, pour imaginer, inventer, fabriquer… J’inventais des histoires, je fabriquais des carnets, des décors pour mes poupées, des boîtes, des bijoux, des instruments de musique… À l’école, j’étais une élève aux « résultats moyens », souvent dans la lune. J’ai très peu de souvenirs d’école. Au lycée, j’ai demandé une machine à écrire pour mon anniversaire. Je crois qu’à ce moment-là, je rêvais déjà d’écrire un roman… Adolescente et jeune adulte, je continuais à bricoler plein de choses : je cousais des vêtements, des chapeaux, des couvertures de livres, des trousses… Je fabriquais des marionnettes à fils, des marottes, des figurines. Je coupais, j’assemblais, je collais, je piquais… Et surtout, j’écrivais. Des histoires, des lettres, des poèmes. Avec ou sans destinataire. J’ai passé un bac B (économie), à mille lieues de mes préoccupations ! Je l’ai eu de justesse. Les points que j’avais « gagnés » grâce aux options couture et arts plastiques n’avaient pas été vains ! Bac en poche, je m’installe à Paris pour suivre des études de sciences humaines et psychologie. Après la maîtrise, je révise le concours de professeur des écoles pendant les siestes de mon premier bébé. L’année suivante, je commence mon métier d’enseignante que j’exerce encore à temps partiel. Depuis 2001, j’habite à Marseille. J’ai sous mes yeux la mer, les montagnes et le ciel bleu presque quotidien. J’aime en partir, mais j’aime aussi tellement y revenir ! En 2008, je contacte des maisons d’édition, pour la première fois. Un an après, mon premier album paraît chez Mango Jeunesse, Un baiser à la figue, illustré par Clotilde Perrin.
Quelles étaient vos lectures d’enfant, d’adolescente ?
Des albums, des recueils de contes ou de poésies, des magazines, des BD… Je me souviens entre autres des BD d’Yvan Pommaux, des albums du père Castor, de quelques titres comme Bonjour petite baleine, La chenille qui faisait des trous, Max et les maxi monstres… des poèmes de Desnos, de Prévert et de Jean Tardieu… Je lis aussi Astérix, Luky Luke, le petit Nicolas et son collègue Marcelin Caillou, la Grabotte du magazine Okapi… et tant d’autres ! Adolescente, je ne dévore pas de gros pavés. Le roman qui m’a le plus marquée s’intitule J’m’appelle Tigre, de Frankcina Glass. Je l’ai encore dans ma bibliothèque. Grand souvenir aussi des nouvelles de Mérimée, d’Eugénie Grandet, Thérèse Raquin, Élise ou la vraie vie… les poèmes de Baudelaire, ceux de Gérard de Nerval… Je lis quelques BD : je passe de Corto Maltese à Agrippine, je m’arrête aussi sur La Rubrique à Brac de Gotlib… et je passe beaucoup de temps avec Gaston Lagaffe !
Quel regard portez-vous sur la littérature jeunesse ?
Ouh là là ! Il y a de tout en littérature jeunesse. Beaucoup de très belles choses, très fortes, intelligentes, ingénieuses, inventives, poétiques… Beaucoup de grands auteurs et illustrateurs. Il y a aussi des parutions sans intérêt, des pages « transparentes », inutiles, bavardes… mais là, je ne parle pas de littérature en fait !
Tantôt drôles, tantôt touchantes, vos histoires ne laissent pas indifférent. Où puisez-vous votre inspiration ?
Mon inspiration naît de l’attention permanente au monde qui m’entoure. Je ne peux pas marcher dans la rue sans rencontrer des personnages d’album ou de roman. J’écoute les conversations, j’observe les gens au café, à la plage, et partout. Je note sur des carnets le quotidien qui m’émeut, tout ce qui m’a amusée, choquée, troublée. Je demande toujours qu’on me raconte des histoires vécues. Je réclame des détails. J’essaie de comprendre comment les évènements s’enchaînent, comment l’histoire se construit. Je puise aussi certainement dans les livres, au cinéma, au théâtre… mais avant tout, au départ, il y a la rue, les gens, les rencontres.
Quels sont vos projets ?
Continuer à écrire des histoires. Plein d’histoires ! En 2014, plusieurs publications sont prévues : la suite du « python d’anniversaire » chez Rue du monde (toujours illustré par Solenn Larnicol), un album chez Lirabelle, deux autres, normalement, chez Alice et L’atelier du poisson soluble… Et peut-être un roman pour ado aussi, mais il est encore trop tôt pour en parler !
Bibliographie :
- Rosa et Martin, album illustré par Zaü, Rue du monde, (2013).
- Tu serais une huître, Thierry Magnier, (2013).
- Je vous présente Gaston !, album illustré par Claire Franek, L’Edune (2012), que nous avons chroniqué ici.
- Vol Plané, Thierry Magnier (2012).
- Je veux un python pour mon anniversaire !, roman illustré par Solenn Larnicol, Rue du monde (2012).
- Ma mère est une femme à barbe, album illustré par Ghislaine Herbéra, Frimousse (2011).
- La recette de Moi, album illustré par Audrey Pannuti, Naïve (2011), que nous avons chroniqué ici.
- Angèle et le cerisier, album illustré par Térésa Lima, l’Atelier du poisson soluble (2011), que nous avons chroniqué ici.
- Pédro à 100 à l’heure, album illustré par Clotilde Perrin, Mango (2010).
- Un baiser à la figue, album illustré par Clotilde Perrin, Mango (2009).
- Nour a perdu son sourire, album illustré par Audrey Pannuti, Max Milo (2009).
- Dur, dur, les mots doux, mini roman illustré par Audrey Pannuti, Rouge Safran (2009).
- Participation à un ouvrage collectif et bilingue de poésie : Alifbata, illustré par Zeynep Périnçek, Le port a jauni (2011).
À paraître :
- En attendant. le 3 mars 2014 chez Lirabelle. album illustré par Mélusine Thiry.
- Python, chatons et compagnie. en mai 2014 chez rue du monde. dans la collection « roman du monde », illustré par Solenn Larnicol.
Parlez-moi de… Bonhomme, sa maison, et pluie, et pluie
Régulièrement, on revient sur un livre qu’on a aimé avec son auteur, éventuellement son illustrateur et son éditeur. L’occasion d’en savoir un peu plus sur un livre qui nous a plu. Cette fois-ci, c’est sur Bonhomme, sa maison et pluie et pluie (chroniqué ici), d’Emmanuelle Bastien sorti chez L’agrume que j’ai eu envie de revenir.
Emmanuelle Bastien (auteur et illustratrice):
Lorsque je me suis remise à la gravure, après plusieurs années, je regardais de tous les côtés, le bois, la pointe seiche, le noir, la couleur… J’avais très envie de raconter des histoires, mais très peu de temps pour graver des plaques. Il a fallu aller à l’essentiel, faire simple. J’ai donc dessiné un personnage pouvant faire face à toutes les situations : Bonhomme [pointe sèche]. Ensuite, j’ai planté le décor : une maison, intérieur/extérieur [bois gravé] et lui ai fait un petit trousseau : une chaise, une paire de bottes, une casserole, etc. [tampons en gommes gravées], des objets qui ont rapidement eu plusieurs fonctions. Le petit monde de Bonhomme était donc minimal, toute la question était : comment avec quelques éléments, raconte-t-on des histoires ? Ah j’oubliais, au pays de Bonhomme, il pleut beaucoup, la pluie [pointe sèche], c’est l’imprévu, l’événement que l’on ne décide pas ! J’ai commencé par associer les éléments entre eux, en les superposant au moment du tirage. Des images se sont construites et les histoires sont nées de ce jeu, de façon empirique. Très vite, l’utilisation des éléments a fait place à leurs détournements. Et si la casserole devenait drapeau, la maison fusée ou montagne et la couronne était tout à la fois plante ou feu ? Lorsque j’ai rencontré Chloé Marquaire et Guillaume Griffon (Éditions L’Agrume), j’avais une kyrielle d’historiettes. Ensemble, il a fallu faire des choix, les retravailler, les retitrer parfois, pour en faire un ensemble cohérent et accessible aux plus petits « lecteurs ». Il y a eu beaucoup de discussions et de véritables échanges. Je travaille souvent mes histoires en relation étroite avec la technique employée et les supports utilisés, qui sont également vecteurs de sens. Le jeu est aussi le moteur de bien des projets. J’attache beaucoup d’importance à la matérialité du livre, son papier, sa reliure, son format, car le livre est un tout. De ce côté, avec les éditions L’Agrume, nous nous comprenons ! La rencontre avec Chloé et Guillaume a été une chance, Bonhomme, sa maison et pluie et pluie, une belle aventure.
Retrouvez Emmanuelle Bastien sur son blog.
Chloé Marquaire (éditrice):
La rencontre avec Emmanuelle Bastien s’est faite dans un atelier de gravure de l’école Duperré. Il y a eu une évidence immédiate pour ses images, leur force et leur simplicité, leur humour, leur poésie. De cette série d’images qui constituaient des petites narrations graphiques, nous avons eu envie de faire un livre-objet, atypique et ludique, que l’enfant pourrait s’approprier. Nombreuses ont été les étapes et les interrogations afin d’aboutir à cette forme finale, tant sur le contenu que sur la fabrication. Bonhomme, sa maison et pluie et pluie est notre premier titre jeunesse, et c’est autour de lui que s’est dessinée et construite notre collection de livres d’artistes pour les enfants.
Le site des éditions L’agrume.
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
Bravo pour ce premier mercredi très réussi.
Encore un beau mercredi sur La mare aux mots !
Merci Marianne pour ce premier mercredi!! Félicitation!!Je me suis régalée comme toujours!! Que de belles découvertes!!
Merci pour ces encouragements ! Je réitèrerai l’expérience avec plaisir !