Chaque mois, nous mettons un coup de projecteur sur un·e auteur·rice, un·e illustrateur·rice ou une maison d’édition. Ce mois-ci, c’est à la maison d’édition Les fourmis rouges que nous consacrons cette rubrique.
« Un livre jeunesse est réussi quand il touche l’enfant ainsi que les adultes qui le lui racontent. J’aime les histoires à tiroirs, riches de plusieurs niveaux de lecture quand on les reprend. Car contrairement à un roman qu’on ne lit qu’une fois sauf exception, un livre pour enfants peut traverser des centaines des lectures quand il est réclamé chaque soir. » Interview de Valérie Cussaguet, éditrice, par Le Dauphiné Libéré, décembre 2020
Moi, j’aime bien Les Fourmis Rouges ! C’est un peu court comme explication, me direz-vous ! En fait, je crois que je les aime bien ces fourmis parce qu’elles savent toujours me surprendre, sans jamais me décevoir.
La ligne éditoriale de cette petite maison d’édition indépendante est éclectique. Les choix sont audacieux, l’originalité toujours au rendez-vous. Une constante, toutefois, se dégage. En observant Les Fourmis Rouges (ou leurs livres illustrés), on risque de se faire piquer. Car la maison, à travers ses auteur·rices et ses illustrateur·rices, aime bien « bousculer » petit·es et grand·es lecteur·rices : en les faisant rire à gorge déployée, en les plongeant dans des mondes fantastiques ou bien en leur donnant matière à réfléchir. Mais ne vous fiez pas à ce semblant de légèreté, le travail et le soin apportés à leurs ouvrages est méticuleux. Un travail de fourmi, en somme.
Cette maison d’édition créée en 2013 dit aimer l’idée d’inscrire les livres dans la durée. Alors, nous, nous avons eu envie de vous proposer une sélection de titres récents, mais aussi plus anciens, afin que vous puissiez découvrir ou redécouvrir leurs publications. Bien sûr, pour une idée plus large de leur catalogue, n’hésitez pas à aller leur rendre visite sur leur site.
Carole
Il était une fois une mère qui collait des affiches pour retrouver un doudou… Il était une fois un père un peu saoul la nuit du Nouvel An… Il était une fois un bisou sur la bouche involontaire… Il était une fois deux copines qui se donnaient la main en permanence… Il était une fois une mère qui pleurait en cachette…
Il était mille fois de Ludovic Flamant et Delphine Perret est sans aucun doute mon livre préféré publié chez Les fourmis rouges, il est d’ailleurs l’un de mes livres préférés tout court. Sorte de liste de petites histoires qui tiennent en une phrase, cet album est une pure merveille. Car Ludovic Flamant et Delphine Perret arrivent en quelques mots et un dessin à créer toute une histoire, une histoire qu’on va imaginer. C’est un album que je peux lire, et relire. C’est un album sur lequel je peux passer du temps sur chaque page pour laisser voguer mon imagination. C’est extrêmement poétique, en n’étant jamais mièvre, en faisant sourire souvent. C’est un album que j’avais chroniqué il y a huit ans sur ce site, c’est l’un des premiers livres édités par Les Fourmis Rouges, c’est un des livres que j’ai le plus offert, c’est un des livres que j’aime le plus au monde.
Gabriel
Céleste a un rêve, un seul : celui d’avoir un petit compagnon à fourrure. Mais pour ses parents, c’est un non catégorique. Heureusement qu’un jour, elle remarque un nuage pas comme les autres, qui attire son attention. Et pour cause, il s’agit non pas d’un simple bout de cumulonimbus, mais un PopDouwizz ! Vous savez, ces créatures rarissimes, aussi duveteuses et douces que rigolotes ? E h bien Céleste a été choisie pour accueillir ce nouvel ami, dont les pouvoirs de métamorphose et d’invisibilité vont lui permettre de rester toujours avec elle, (presque) incognito. Mais s’il est mignon, le PopDouwizz peut aussi se révéler grognon et même parfois sacrément encombrant…
PopDouwizz est bourré d’une bonne humeur contagieuse. Les couleurs, le texte, les personnages : tout pétille. En effet, Lili Sratchy véhicule plein d’énergie et de pep’s au travers de ses dessins fluo, mais aussi de son humour plein de loufoquerie. Elle propose une approche très originale des amie·s imaginaires (doudous ou non) que les enfants peuvent avoir. En effet, si Céleste et certain·es de ses ami·es voient la petite créature, les adultes semblent ne pas se rendre compte de sa présence. Ils le confondent avec un drôle de bonnet, un peignoir sorti de nulle part ou pire, un vieux mouchoir. Par contre, quand le PopDouwizz lâche ses prouts-papillons, tout le monde le sent, les plus petit·es comme les plus grand·es… Alors, existe-t-il « pour de vrai » ou bien s’agit-il d’une invention de Céleste ? La réponse va vous surprendre !
Dans ce roman graphique, l’héroïne prend avec beaucoup de sérieux son nouveau rôle, et n’omet aucun détail pour que son ami soit toujours épanoui. Il y a donc également une notion de responsabilité en filigrane, rappelant aux lectrices et lecteurs qu’un animal nécessite des soins, et parfois des sacrifices. Parfait pour aborder ce sujet avec les enfants !
Un livre à la liberté graphique et narrative rafraichissante , qu’on savoure comme un bonbon pétillant !
Caroline
Pour Paulette, c’est un cochon en porcelaine, un petit cochon tirelire, dernier cadeau de son mari trop tôt disparu. Pour Elsa, c’est une guitare, celle de son amoureux qui l’a fait oublier son rendez-vous chez Pôle Emploi. Pour Christine, c’est un arrosoir, celui qui lui a servi à arroser ses fleurs, un soir, pendant qu’elle pleurait. Pour Assia, c’est un sac de farine, celle qu’utilise son mari pour faire le pain qu’elle vend en parlant du temps, dans sa boulangerie. Quinze portraits, des hommes et des femmes et un objet qui compte pour eux.
C’est un album bien singulier que La vie des gens. Martin Jarrie a rencontré des gens, a fait leur portrait et leur a demandé de choisir un objet qui leur était cher, objet qu’il a aussi dessiné. Puis François Morel a écrit une histoire à partir de ces dessins. Tout ici est beau, touchant. L’écriture de François Morel, évidemment, qui raconte la (fausse) vie de ces personnages, leurs blessures, des petites scènes de vie, mais aussi les magnifiques peintures de Martin Jarrie. Dans le communiqué de presse on peut lire « Ce livre n’a pas été pensé spécifiquement pour un public jeunesse, il est destiné à tous », une phrase qui définit bien ce bel album qui pourra clairement être offert à des adultes. Une vidéo de présentation des auteurs.
Gabriel
Qu’est-ce qu’un abri ? Un endroit où rien ne peut lui arriver. Ainsi protégé, cajolé, pardonné, réconforté, l’enfant peut grandir sereinement.
Ouvrir ce grand livre, c’est se plonger tout·e entier·ère dans l’univers d’Emmanuelle Houdart, un univers singulier où la poésie des mots n’a d’égal que la poésie des images. Sur chaque double page, une phrase fait face à un abri, petit monde à observer. Dans ce livre, chaque abri a quelque chose à nous raconter. Au fil de la vie et des difficultés, il prend une forme ou une autre : le ventre de la mère protégera l’enfant, les livres seront le refuge de toute la famille, la nature fera office de cocon pour l’adolescente… Le point commun de tous ces refuges ? L’amour et la tendresse, qui s’en dégagent. Les autres, ami·es et famille, sont là, avec leurs mains tendues et leurs bras protecteurs : tendres soutiens et présences réconfortantes. La nature foisonnante joue, elle aussi, un rôle. Lisez les mots, posés, là, page après page, comme une ritournelle, mais surtout regardez les images. Les deux sont d’une grande complémentarité, et les illustrations d’Emmanuelle Houdart, empreintes d’onirisme, de surréalisme, ont beaucoup à nous dire.
Carole
Coutchuplum et Oisoletto décident de quitter la ville pour partir à l’aventure, et découvrir l’immense forêt qui se trouve dans leur pays. Arrivés là-bas , ils marchent à travers les bois, s’émerveillant de la beauté de ce qui les entoure. Mais cette longue randonnée est fatigante, alors ils décident de se reposer un peu… Et voilà qu’ils tombent sur une bande de singes rusés, qui s’emparent illico presto de leurs sacs à dos pour s’enfuir avec à travers les branches ! Les deux amis sont bien dépités, toutes leurs affaires ont été volées ! Heureusement que non loin de là, Azur et Lapinito interceptent la bande de macaques chapardeurs, récupèrent les objets éparpillés et mettent tout en œuvre pour retrouver leurs propriétaires. De cette mésaventure va naitre une très jolie amitié, qui va souder les quatre personnages et promettre un doux moment de lecture .
On se perd au fil des magnifiques dessins de Cristina Sitja Rubi, qui fait éclater sa palette de toutes les teintes de la jungle. Les illustrations naïves sont pleines de détails, d’animaux cachés, de fleurs à découvrir et d’objets à dénicher. On croirait presque entendre les chants des oiseaux tropicaux et sentir le parfum entêtant de la végétation !
Les personnages hybrides, aux traits à la fois humanoïdes et animaliers et aux noms rigolos, sont les compagnons idéaux pour accompagner la lecture d’Objets perdus . Ils ressemblent à des peluches, ou semblent encore tout droit sortis de dessins d’enfants.
De plus, l’autrice équilibre esprit d’aventure, découverte de la nature et surtout nouvelle relation amicale, avec une histoire très simple, mais très poétique. Avec des mots bien choisis, elle crée une impression de cocon, duquel éclot une amitié toute douce. Un petit album qui renferme tout un fourmillement de détails : dépaysant et coloré.
Caroline
Aujourd’hui, c’est l’anniversaire de Pablo. Les journaux n’en parlent pas, ils parlent de l’arrivée de l’automne. Alors que l’anniversaire de Pablo c’est bien plus important. Comme cadeau, il a reçu… une chaise ! Une chaise ? Oui oui, une chaise… Faut dire que Pablo est du genre remuant et une chaise, ça lui permettra peut-être de se poser un peu. Sauf que c’était bien mal connaître Pablo ! Et au lieu de le faire s’asseoir, la chaise va devenir un accessoire d’équilibriste. Au lieu de se poser, Pablo va faire le tour du monde.
Pablo & la chaise est un magnifique album de Delphine Perret, autrice et illustratrice dont j’aime énormément le trait de crayon. On parle ici de ne pas changer la nature des gens, de rester qui l’on est. Pablo est du genre remuant et ce n’est pas parce qu’on lui offre une chaise qu’il se posera, il va détourner l’objet de son but premier. On parle donc aussi des artistes qui détournent les objets, d’inventivité, de voir au-delà. Les illustrations sont magnifiques et, comme d’habitude chez Les fourmis rouges, le travail d’impression particulièrement soigné. Pablo & la chaise c‘est un superbe album tendre et poétique pour ne pas oublier qu’il faut rester soi-même.
Gabriel
La famille Loulou est composée de Mimosa, Lina et Bernard, les enfants et Henri et Josiane, les parents. Ils et elles vivent dans une maison-nez et font partie de la communauté des crottes de nez ! Leur quotidien va cependant être chamboulé par une catastrophe. Papy Boulette est retrouvé en larmes devant sa maison-nez toute cassée. Sa famille a été kidnappée par un horrible doigt venu fouiller toute l’habitation. Les habitant·es du village prennent peur et se barricadent. La famille Loulou est plus radicale et envisage de déménager. Les voilà parti·es à la recherche d’une nouvelle maison qui pourrait les accueillir mais vont-ils et elles trouver leur bonheur ?
J’ai adoré cet album jeunesse très drôle ! Malgré l’événement tragique qui est survenu en début d’histoire, on rit grâce à l’imagination de l’auteur et de l’illustratrice. Les protagonistes crottes de nez ressemblent à des Barbapapas tout vert et ils et elles sont très attachant·es. Leur visite de maisons insolites est un régal pour passer un moment comique. Écrits de façon manuscrite, les textes seront faciles à lire par les lecteurs·rices dès le plus jeune âge. Il s’agit d’une super première aventure dont j’aurai bien envie de découvrir la suite avec les autres albums de Mrzyk et Moriceau.
Mathilde
Une petite fille s’impatiente. Il est 19 heures et son papa n’est toujours pas rentré du travail. Pour passer le temps, elle décide d’aller jouer dehors avec son chat. Mais celui-ci grimpe dans un grand arbre, et ne repointe plus le bout de son museau. Commence alors une grande aventure pour la fillette. Elle grimpe à son tour dans l’arbre, et y découvre tout un monde composé d’une galerie de personnages fantasques. Dans cet arbre, chacun·e semble avoir égaré quelque chose. Cependant, bonne nouvelle, ils ont tous vu passer le chat. Mais où est-il donc alors ?
Quand j’ai reçu ce livre, il y a quelques jours, j’ai immédiatement proposé à mon grand de 10 ans de le lui lire. Pour toute réponse, j’ai obtenu un « Moi, je suis trop grand pour les albums ». Convaincu de mon choix, je commence, malgré tout, ma lecture. Au bout de quelques secondes seulement, je le vois suivre avec attention, rejoint par sa sœur de 6 ans qui en a délaissé son activité. Le secret d’un tel coup de cœur ? Le « cherche et trouve ». En effet, cette histoire invite le·la lecteur·rice à chercher les objets égarés par chacun·e. Pour cela, il faut tourner les pages, revenir en arrière ou attendre la suite, le tout avec frénésie et impatience. Les enfants se laissent ainsi embarquer oubliant l’incongruité des événements et la quête originelle de la fillette. Bien sûr, une fois le livre terminé, une seule envie : le relire ! Alors, on recommence, on s’attache davantage à l’histoire ou on cherche les éléments qui nous ont échappés, puis on le range dans la bibliothèque jusqu’à la prochaine fois. Bref, un livre à lire, et à relire.
Carole
Björn est un héros plutôt bonne pâte. Il vit au cœur de la forêt et coule des jours heureux avec ses camarades facétieux à poils ou à plumes. Notre ours est un tendre qui aime profondément les gens et qui se plaît à partager de doux moments avec les gens qui comptent pour lui. Leur quotidien est fait de petits jeux, de balades insouciantes pleines de rires et d’instants passés à admirer leur forêt chérie. Parfois, l’on joue aux humain·es autour d’un joli festin et l’on se plaît à les imiter dans cet immense théâtre forestier.
Voilà un dytique qui brille par sa simplicité et sa délicate tendresse. Ces charmantes histoires – qui peuvent être lues indépendamment les unes des autres – mettent en scène un joyeux bestiaire sauvage qui cohabite harmonieusement à l’ombre des arbres. Les personnages ont tout pour nous attendrir et leurs activités journalières sont autant d’occasions de semer les jalons de petites réflexions philosophiques. L’amitié, le bonheur, le plaisir de contempler le monde qui nous entoure… Autant de manières d’inviter les plus jeunes à se poser à leur tour ces questions qui prendront de plus en plus de place dans leur vie. Des mots aux illustrations, un même trait : léger, fin, sans prétention. Il couche les mots sur le papier et dessine les contours sans fioritures de ces animaux-héro·ïnes. De la simplicité avant toute chose… Dès lors, ces bon·nes ami·es de papier que rien ne semble pouvoir éloigner pourraient assez rapidement devenir également les nôtres. Deux petits titres acidulés dans lesquels l’on appréciera incontestablement de plonger !
MokaMilla
Frein à main serré, camion rouge à l’arrêt : juste le temps d’une petite pause pour se soulager, caché dans la forêt. Notre barbu sous son bonnet cherche ensuite à rejoindre discrètement son véhicule. Mais là, stupeur, bien qu’il soit revenu sur ses pas, le chemin caillouteux semble se jouer de lui et lui faire perdre le Nord. Autour de lui, des zones vallonnées, des arbres immenses et de la verdure à perte de vue. La montagne serait-elle devenue le plus étrange des labyrinthes ? Et faut-il craindre ces silhouettes curieuses qui surgissent ou accepter de les suivre ? Car pour qui sait ouvrir les yeux, le monde autour de notre égaré s’agite, laissant place à de petites créatures oniriques qui ne se fondent plus dans le décor et occupent de plus en plus de place. Commence alors une balade hors du commun durant laquelle les repères brouillés laissent place à une part de magie insaisissable.
La Montagne fait partie de ces albums qui en peu de mots vous emportent dans un univers parallèle. Proche de nous et à la fois teinté d’une folie douce, le monde dépeint intrigue et titille notre curiosité. Pour aimer ce livre, il faut accepter de lâcher prise et de se laisser prendre au jeu d’un voyage un poil déstabilisant. Amateur·rices de Miyazaki, vous ne serez pas étonné·es par l’approche graphique de Manuel Marsol qui remplit les paysages de créatures entre le monstre et l’animal. L’art de la métamorphose est à l’honneur et les pages, comme de petits tableaux végétaux, se tournent le temps de cette escapade si singulière, dévoilant leurs surprises qui amuseront l’œil des lecteur·rices friand·es de récits contemplatifs. Dépaysant et poétique à souhait !
MokaMilla
C’est l’histoire de Julien. Julien a un chien : Kiki. Et comme tout bon maître qui se respecte, Julien adore promener son chien. Sauf que quand Julien se promène, il ne rigole pas « En route Kiki ! » tonne-t-il ! Et c’est parti pour une drôle de balade… Sauf qu’à force de regarder devant lui, Julien ne voit pas qu’au bout de la laisse, il y a quelques surprises…
Avec Kiki en promenade, Marie Mirgaine nous propose un album drôle et inventif qui joue sur le comique de répétition. L’on suit la promenade loufoque et étonnante de ce duo surprenant qui se ressemble, tant dans sa démarche que dans son allure (mêmes cheveux/poils en bataille… Comme on dit, « tel maître tel chien »). Sauf que rien ne va se passer comme prévu. Julien marche droit devant lui, ne se retourne jamais et ne se rend donc pas compte que son chien se fait enlever par un aigle et est remplacé page après page par toute une ribambelle d’animaux. Pour le lecteur et la lectrice c’est une aubaine, et cela donne lieu à un comique de situation certain ! Marie Mirgaine impose son style et son humour grâce à des illustrations splendides, vives et colorées, réalisées à partir de papiers découpés. C’est à un éloge du quotidien que nous invite l’autrice-illustratrice. Car c’est au travers d’une situation plus que banale, une promenade sans histoire que va émerger l’extraordinaire !
Un magnifique album, coup de cœur, poétique et décalé !
Sarah
Aujourd’hui, c’est dimanche, Clémentine part en voiture avec ses parents. Direction chez sa grand-mère pour le repas dominical… Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ça n’emballe pas vraiment notre petite renarde… Pour couronner le tout, sa mère passe son temps à lui faire des recommandations : « n’oublie pas de te tenir droite », « évite de mettre tes coudes sur la table »… Clémentine a hâte de repartir de chez sa mamie, d’autant que celle-ci est couverte de feuillages et de branchages… Alors pour fuir les contraintes familiales, notre petite héroïne part jouer au fond du jardin… Et découvre un trou dans le buisson…
Avec Dimanche, Fleur Oury nous propose un album poétique et sensible, une ode au quotidien et au merveilleux. On suit donc une petite renarde, Clémentine, contrainte d’assister au sacro-saint repas de famille chez sa grand-mère avec ses parents. Pour fuir la morosité et l’ennui, Clémentine part se réfugier dans le jardin (trop propre et trop lisse), et grâce à un trou de verdure (on pense à Mon Voisin Totoro), s’échappe. Là, elle va faire la connaissance d’une petite humaine avec qui elle va passer son après-midi. C’est un cri d’amour à la nature et aux plaisirs sensoriels. Page après page, l’autrice-illustratrice nous plonge dans un univers coloré et foisonnant de détails. Une faune et une flore luxuriante s’offrent aux lecteurs et aux lectrices, comme une invitation au voyage, à aller au-delà de son bout de jardin. Mais Dimanche est aussi et surtout un album qui nous parle de transmission familiale, de la découverte de la personnalité des individus que l’on pense lisse et sans âme. Car, en passant de « l’autre côté du miroir », Clémentine va se retrouver couverte de feuillages et de branchages… Comme sa grand-mère… Ainsi, elle découvre que celle-ci n’est pas seulement une vieille renarde morose et ennuyeuse, mais également une aventurière hors pair qui, elle aussi, aime prendre les chemins de traverse.
Un ornithologue savait tout sur les oiseaux, à force de les avoir observés, écoutés, étudiés. Seulement voilà, il avait une lacune, un animal qu’il n’avait jamais réussi à approcher : le canard ! Alors il fabriqua un appeau pour imiter son cri et ainsi le faire venir à lui… mais c’est un CÔA qui en sortit (et qui fit venir une grenouille). Il essaya de perfectionner son appeau, mais c’est un CRÔA qu’il produisit (et qui fit débarquer un corbeau)… comment réussir à faire le bon coin ?
Alexandra Pichard signe un album aussi drôle que poétique, aussi original qu’esthétique. Une histoire qu’on prend plaisir à lire à voix haute (grâce aux cris des animaux, d’autant qu’on peut jouer avec les enfants à leur faire deviner quel animal va venir, ou alors, pour les plus grand·es en leur faisant lire les onomatopées). La chute, que je ne vous dévoilerai pas, est bourrée d’humour.
C’est un grand loup sauvage rouge. Il vit au milieu d’une forêt, libre et tranquille. Mais un jour l’homme décide de détruire son territoire. La forêt n’existe plus et le grand loup rouge est obligé de fuir. Se retrouvant dans une nouvelle contrée, il rencontre une meute de loups. Des loups blancs qui refusent de le considérer comme un des leurs, jusqu’à ce que le chef intervienne…
Avec D’un grand loup rouge, Mathias Friman continue de s’interroger sur notre monde (nous avions chroniqué deux autres albums ici, là et encore là). Ici, il s’agit de questionner le rôle de l’humain et son rapport à la nature. L’homme est vu comme un destructeur, qui prend ce qu’il considère comme lui appartenir de droit, n’hésitant pas à anéantir des écosystèmes pour son bon plaisir. L’humain, l’auteur-illustrateur le symbolise par la présence des pelleteuses, de puissants engins techniques qui ne reculent devant rien. Mais D’un grand loup rouge se veut aussi et surtout une fable forte sur les migrations. Car le grand loup rouge se retrouve sans patrie et sans territoire, jeté sur les routes du seul fait de l’être humain. Arrivé dans une nouvelle meute à la nuit tombée, une meute qui se revendique uniforme et homogène car « blanche » il a bien du mal à trouver sa place jusqu’à ce que le petit matin révèle la couleur différente de chaque loup… Accepté finalement, la meute devient une ode à la différence et à l’intégration. Un beau message dans un album sublime, tant sur le fond que sur la forme. Le trait de Mathias Friman — reconnaissable entre mille — nous plonge une fois de plus dans un univers stylisé où la nature — animale comme végétale — forme un tout harmonieux malgré les différences et une forme de résistance à l’intrusion humaine.
Sarah
Quelque chose se trame sur le terrain vague depuis que des hommes s’affairent sous le regard des animaux curieux cachés à l’orée du bois. Entre ombres, contre-jour et lumières, surgit un monde éblouissant et magique dont on devine déjà la petite musique de fête. La fête foraine est là et fait ce que l’on attend d’elle : tourner les têtes, bondir les cœurs, trembler les corps et frétiller les papilles. Puis vient le moment où les lumières s’éteignent, signe que les festivités sont bel et bien terminées. Mais quand les hommes, femmes et enfants regagnent leur domicile, un bestiaire poilu très impatient investit le plus beau des terrains de jeu. Les maîtres des lieux qui veillent ne sont pas toujours ceux que l’on croit… Qui oserait croire un instant que la fête toucherait à sa fin après le départ des humain·es ? Les animaux de la forêt refusent de leur laisser ce privilège et comptent bien grappiller leur instant d’amusement. À eux leur part de folie nocturne pleine de vertiges. Cette nuit-là, plus longuement que d’habitude, le popcorn voltige et les sucreries font la joie des gourmands. Le jeu est art de vivre et les familles s’amusent clandestinement à l’abri du regard des hommes et des femmes. Liesse, partage et légèreté sont les mots d’ordre de ce moment de liberté volée et ce sans que le moindre mot ne soit prononcé.
Cet album est un ravissement muet qui laisse pourtant entendre – entre les pages de papier – des mélodies colorées, des cris enjoués, des odeurs de nourriture et des saveurs acidulées. Le dessin à l’aquarelle apporte à la rêverie une beauté onirique incroyable et, du ciel noir et profond à la lumière de l’aube, l’on en oublierait presque que la nuit a filé entre les pages. Des illustrations délicieusement mouvantes et enchanteresses pour faire briller les yeux et raviver la part de notre enfance abandonnée dans les allées des fêtes foraines les mains pleines de sucre et la bouche pleine d’éclats de rire.
MokaMilla
Il était mille fois Texte de Ludovic Flamant, illustré par Delphine Perret Les fourmis rouges 13,80 €, 156×199 mm, 60 pages, imprimé au Portugal, 2013. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Popdouwizz de Lili Scratchy Les Fourmis Rouges 12,50 €, 141×191 mm, 96 pages, imprimé en Italie, 2013. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
La vie des gens Textes de François Morel, illustrés par Martin Jarrie Les fourmis rouges 14,90 €, 232×158 mm, 44 pages, imprimé au Portugal, 2013. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Abris d’Emmanuelle Houdart Les Fourmis Rouges 17,90 €, 255×348 mm, 32 pages, imprimé en Italie, 2014. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Objets perdus de Cristina Sitja Rubio Les Fourmis Rouges 14 €, 145×205 mm, 48 pages, imprimé en Italie, 2015. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Pablo & la chaise de Delphine Perret Les fourmis rouges 14 €, 210×270 mm, 32 pages, imprimé en Italie, 2015. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Panique au village des crottes de nez Texte de Mrzyk, illustré par Moriceau Les Fourmis Rouges 14€, 195×275 mm, 32 pages, imprimé en Italie, 2015. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Troisième branche à gauche d’Alexandra Pichard Les Fourmis Rouges 16,50 €, 230×325 mm, 34 pages, imprimé en Italie, 2015. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Björn – Six histoires d’ours de Delphine Perret Les Fourmis Rouges 12,50 €, 150×210 mm, 64 pages, imprimé en Italie, 2016. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Björn-Le vaste monde de Delphine Perret Les Fourmis Rouges 12,50 €, 150×210 mm, 64 pages, imprimé en Italie, 2017. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
La Montagne Texte de Carmen Chica et Manuel Marsol, illustré par Manuel Marsol Les Fourmis Rouges 18,90 €, 195×340 mm, 56 pages, imprimé au Portugal, 2018. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Kiki en promenade de Marie Mirgaine Les fourmis rouges 15,50 €, 215×276 mm, 48 pages, imprimé en France, 2019. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Dimanche de Fleur Oury Les fourmis rouges 15,50 €, 221×256 mm, 40 pages, imprimé en Italie, 2019. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Le bon coin d’Alexandra Pichard Les fourmis rouges 15,90 €, 280×210 mm, 48 pages, imprimé en Italie, 2020. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
D’un grand loup rouge de Mathias Friman Les fourmis rouges 14,50 €, 245×175 mm, 32 pages, imprimé en France, 2020. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
La nuit de la fête foraine Texte de Gideon Sterer, illustré par Mariachiara Di Giorgio Les Fourmis Rouges 15,50€, 285×205 mm, 32 pages, imprimé en Chine., 2020. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Fille des années 80, amoureuse des livres depuis toujours. La légende raconte que ses parents chérirent le jour où elle sut lire, arrêtant ainsi de les réveiller à l’aube. Sa passion des livres, et plus particulièrement des livres jeunesse, est dévorante, et son envie de partage, débordante. Elle est sensible aux mots comme aux images, et adore barboter dans les librairies et les bibliothèques. Elle aime : les albums au petit goût vintage et les romans saisissants, les talentueux Rebecca Dautremer et Quentin Gréban, les jeunes pousses Fleur Oury et Florian Pigé, l’humour d’Edouard Manceau et de Mathieu Maudet, les mots de Malika Ferdjoukh et de Marie Desplechin.