Aujourd’hui on fait la connaissance d’héroïnes féministes pleines d’énergie et bien décidées à renverser l’ordre établi avec Les gros bras de Polka d’Emilie Gleason et Zette et Zotte à l’uzine d’Elsa Valentin et Fabienne Cinquin !
Il était une fois un couple de danseur·euse·s fou amoureux·euses. Si amoureux qu’ils finissent par avoir un bébé : Polka. Polka est une petite fille pleine d’entrain (un peu trop même), joyeuse et heureuse de vivre… avec une particularité : Polka a des gros bras… DES TRÈS GROS BRAS. À tel point qu’à l’école, tout le monde se moque d’elle. Des biceps pareils, pour une fille de son âge… Ça n’a pas de sens ! Alors Polka se renferme, devient morose et triste. Jusqu’au jour où, alors qu’elle regarde la télébison avec ses parents, la petite fille entend qu’un groupe de castors est menacé ; ni une ni deux, la petite fille décide de se remonter les manches et de leur venir en aide !
Les gros bras de Polka est un album féministe très drôle. Emilie Gleason nous parle, à travers l’exemple de Polka, de l’importance (et de la difficulté) de s’accepter tel·le que l’on est, dans une société où les clichés existent encore. Car ce qui dérange, c’est que la petite fille a de gros bras (un attribut que l’on associe plus naturellement à un garçon). Polka chamboule malgré elle l’ordre établi : les garçons doivent être costauds et forts, les filles douces et fragiles. À travers cette histoire pleine d’humour (l’autrice joue avec les mots : Polka regarde la « télébison », enfourche son « vélo-ciraptor ») Emilie Gleason propose un album positif sur la nécessite de se détacher du regard des autres et de vivre sa vie comme on l’entend. Au fur et à mesure de ce récit initiatique burlesque, Polka va découvrir que ses gros bras peuvent être une force. Les illustrations vives et colorées accompagnent à merveille cette drôle d’histoire. Chaque page révèle une nouvelle surprise, langagière ou narrative. Résultat : c’est drôle, bien construit, fourmillant de détails, de malice et d’intelligence !
Un drôle de petit album pop qui déconstruit les clichés !
Zette et Zotte sont sœurettes et travaille à l’uzine où elles fabriquent des zabits de louxe. Pour cette besogne, elles ne sont payées que des miettes et quelques légumes. Si Zette trouve cela scandaleux et est prête à faire la grave généreule et la manifle, Zotte préfère quant à elle faire des zeurs-sop pour gagner plus de beurre dans les zépinards… Un matin, le trapron décide que les zouvrilleuses lui coûtent trop cher ! Désormais elles ne seront payées que des épluchures ! C’en est trop pour Zette et ses copines qui décident de monter au créneau et de faire la révoluture !
Avec Zette et Zotte à l’uzine, Elsa Valentin et Fabienne Cinquin nous content l’histoire d’un conflit social avec beaucoup d’humour et d’intelligence ! La langue d’Elsa Valentin est poétique et imagée : elle joue sur les sonorités « Zette/Zotte/Zabits », détricote et reconstruit de nouveaux mots : la grève générale devient la grave généreule, la révolution devient la révoluture… L’album se lit à haute voix pour savourer encore plus ces jeux de mots ! Mais derrière cet aspect ludique, Elsa Valentin nous parle de problématiques actuelles : les délocalisations d’usines, le sort des ouvriers laissés pour compte. L’album se veut résolument optimiste et joyeux. Les illustrations nous plongent dans un monde coloré, solidaire, où, seul le collectif permet de s’en sortir ! Fabienne Cinquin joue sur les motifs, les coloris, les matières et multiplie les techniques : encre de Chine, collage de papiers unis comme à motifs, aquarelles… À travers l’exemple de Zette et Zotte, Elsa Valentin nous montre les tensions qui peuvent exister durant ces conflits (même si tout se termine bien !). Véritable ode à la sororité (et fraternité), à la cohésion de groupe et à l’autogestion, Zette et Zotte à l’uzine est une fable moderne qui nous montre qu’avec beaucoup d’imagination, de l’utopie, de la révolte et des ami·e·s… on peut encore changer les choses… et ça fait du bien !
Un véritable coup de cœur, drôle et politique ! On en redemande !
Les gros bras de Polka d’Emilie Gleason Biscoto 14 €, 146×236 mm, 48 pages, imprimé en France, 2018. |
Zette et Zotte à l’uzine Texte d’Elsa Valentin, illustré par Fabienne Cinquin L’atelier du poisson soluble 16 €, 200×297 mm, 48 pages, imprimé en République tchèque, 2018. |
Née au début des années 90s, tour à tour professeure, amoureuse de la vie, de la littérature, de la musique, des paysages (bourguignons de son enfance, mais pas que…), des films d’Agnès Varda, des vers de Cécile Coulon et des bulles de Brétecher. Elle a fait siens ces mots de Victor Hugo “Ceux qui vivent ce sont ceux qui luttent”.
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