Aujourd’hui, quatre très beaux albums (dont mes deux plus gros coups de cœur de l’année).
Il y a l’air et grâce à lui l’odeur des vacances (mais aussi celui des usines). Il y a l’eau. L’eau que l’on boit, l’eau dont le bruit nous berce les soirs de pluie, celle que l’on chauffe pour se faire une infusion. Il y a la terre, celle où poussent les graines, celle que l’on sent sous nos pieds quand on s’y aventure sans chaussures. Il y a le feu avec son odeur si particulière, le feu qui nous sert à découvrir de nouvelles saveurs. Quatre éléments, cinq sens.
Mais quelle merveille que cet album ! Pour L’imagier des sens, Anne Crausaz a laissé de côté son ordinateur et a retrouvé ses crayons. Le résultat est époustouflant. Les planches sont absolument superbes (certaines nous donnent envie de les afficher) et le texte tout aussi poétique. Pour chaque élément, elle propose une double page qui évoque l’un des sens (par exemple, boire l’eau, entendre la pluie, sentir l’odeur de la menthe qui infuse, regarder les cercles que forment des ricochets et ressentir le froid de l’eau glacée sur ses pieds). L’album permet de parler des sens et des éléments avec les enfants, mais c’est surtout un magnifique album d’illustrations, un livre d’artiste. Les éditions Askip, qui publient ici leur second album après le remarquable Comme un poisson-fleur (chroniqué ici), ont cette fois encore particulièrement soigné l’ouvrage, avec un beau papier et une couverture non vernie. Une merveille, je vous dis.
Elle est celle qu’on trouve trop petite ou trop géante. Elle est celle qu’on a fait dormir sur des matelas entassés sous lesquels on avait placé un petit pois, celle qui a dormi si longtemps derrière un mur de ronces, celle qu’on a enfermée dans une tour « pour son bien ». Elle est la fille des contes.
Aux filles des contes est sans aucun doute un des plus beaux livres de 2022. Ici, tout est réussi. Le texte, assez proche de la poésie, de Thomas Scotto est un bonheur à lire à voix haute (à se demander s’il n’a pas été écrit pour ça). Les illustrations de Frédérique Bertrand accompagnent tout en délicatesse le texte. L’objet lui-même, le petit livre avec ses rabats, son beau papier et son long fil de reliure rouge, un est magnifique ouvrage. Et puis, forcément, le propos… Cet hommage aux filles de contes, mais, à travers elles, aux filles tout court. Celles qui se taisent, celles qu’on bâillonne, celles que l’on maltraite. L’auteur dédie son ouvrage à Anne Sylvestre et fait précéder son texte d’un extrait d’Une sorcière comme les autres, on ne peut que se dire que ce texte-là n’aurait pas été renié par cette grande artiste. Voilà un livre que je vous recommande vraiment.
Il y avait beaucoup de monde chez lui ce jour-là, et la plupart il ne les connaissait pas. Alors qu’il était présent physiquement, son grand-père semblait absent, sa grand-mère, elle, n’était pas là. Ce matin-là, il l’avait d’ailleurs vue dans les nuages, alors il avait décidé de marcher dans la neige en se remémorant des moments passés avec elle, en repensant aux dessins sur ses robes, aux glaces apportées pendant la vision d’un film. Tant de souvenirs qui resteront gravés.
J’ai un peu hésité à vous parler de Ce jour-là, car on est à la période où l’on cherche quoi offrir pendant les fêtes de fin d’année, et un album sur la mort d’une grand-mère ne semble pas l’idéal… Mais l’album de Pierre-Emmanuel Lyet est un tel bijou que je ne pouvais pas attendre. Avec une infinie délicatesse, il parle donc de la mort vue par un enfant. Ce moment si étrange quand on est petit·e que sont des funérailles, ce sentiment incompréhensible d’avoir perdu un être cher. Les mots sont délicats, poétiques, mais surtout les illustrations sont somptueuses. Pierre-Emmanuel Lyet est un grand illustrateur, on le savait déjà, mais on découvre ici qu’il écrit aussi très bien. Alors, oui, Ce jour-là parle de disparition, mais ce n’est pas un album triste, il parle des souvenirs, des gens qu’on aime, de la vie.
Dans une drôle de maison perdue dans la neige un étrange personnage s’active. Il lui faut préparer ses affaires pour faire le même voyage qu’iel fait chaque année. Dans ses valises, de la poussière de nuit et des étoiles. Quand iel arrive, les enfants se parent de manteaux, les nez sont rouges à force d’être trop mouchés, des sapins décorés sont posés un peu partout et les gens restent le plus possible à l’intérieur. Mais voilà que notre étrange personnage croise un enfant, un enfant bien solitaire et qui semble bien triste…
Dans Quand arrive l’hiver, Soyung Lee (autrice-illustratrice du très beau Ce n’est pas grave mon crapaud) aborde deux thèmes en même temps : l’arrivée de l’hiver et celle d’un bébé. Tout est délicat dans cet album. Soyung Lee a une façon très particulière d’aborder ces deux sujets. Ses magnifiques illustrations sont bourrées de détails qui nous laissent comprendre petit à petit ce qui se trame, et l’on sera tenté·e de rebrousser chemin pour voir tout ce qu’on a loupé. Un album aussi singulier que beau.
L’imagier des sens![]() ![]() d’Anne Crausaz Askip 18 €, 195×278 mm, 56 pages, imprimé en Suisse, 2022. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Aux filles du conte![]() ![]() Texte de Thomas Scotto, illustré par Frédérique Bertrand Les Éditions du Pourquoi pas ?, dans la collection Manifeste poétique 10 €, 105×200 mm, 24 pages, lieu d’impression non indiqué, 2022. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Ce jour-là![]() ![]() de Pierre-Emmanuel Lyet Seuil Jeunesse 15,50 €, 296×278 mm, 60 pages, imprimé au Portugal, 2022. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |
Quand arrive l’hiver![]() ![]() de Soyung Lee (traduit du coréen par Chloé Laborde) L’élan vert 17 €, 246×246 mm, 60 pages, imprimé en Europe, 2022. Achetez ce livre* via LesLibraires.fr, LaLibrairie.com ou Place des libraires. |

Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !







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