C’est le grand retour, que tu l’ veuilles ou non
De celui dont tu maudissais le nom
C’est le grand retour, un peu improbable,
D’un drôle de rôdeur, certes infréquentable,
Mais sympathique en diable
Le grand retour, Alain Chamfort
Et oui nous voilà de retour ! Et pour cette rentrée, j’avais envie de vous parler de quatre coups de cœur que j’ai eus cet été. Une chronique un peu plus longue, donc, mais avec que du bon !
Raphaël aime Jérôme, il le dit d’ailleurs, c’est facile : Raphaël aime Jérôme. Il aime quand il lui tient la main et quand ils se cascadent de rigolade.
Les parents de Raphaël apprécient beaucoup ce jeune garçon bien élevé même si son papa trouve dommage qu’il n’aime pas le football. Pourtant un matin alors que Raphaël parle de son rêve de Jérôme son père s’agace. Mais Raphaël aime Jérôme, il le dit, c’est très facile.
Les jours de sortie au musée des tableaux, c’est moi qu’il choisit pour être bien en rang.
C’est pour ça que je l’aime, Jérôme
Ça ne me dérange pas.
Raphaël aime Jérôme.
Je le dis. Très facile
Jérôme par cœur m’a été conseillé par Chloé Marot de Causette (lire son article ici). Et qu’elle a eu raison de me parler de cet album que je ne connaissais pas ! Quelle délicatesse, quelle poésie ! Tant dans le texte de Thomas Scotto que dans les illustrations d’Olivier Tallec. Certains y verront une amitié très forte, d’autres un petit garçon qui aime les garçons sans savoir encore ce que cela implique (lalbum est d’ailleurs dédié au Xavier d’Anne Sylvestre, chanson qui m’a valu de sacrés débats avec un copain sur le thème Xavier est-il homo ou pas).
Raphaël est un rêveur, un garçon légèrement différent des autres qui est bien content d’avoir trouvé Jérôme. Tout simplement magnifique.
Le même vu par Le cabas de Za.
Dans l’Ouest sibérien, Pacôme vivait avec sa femme et ses trois enfants. Ce paysan n’était pas riche, mais sa famille mangeait à sa faim. Pourtant il voulait plus, et quand il eut plus il voulut encore plus. Cette envie jamais assouvie le pousse à partir loin, puis encore plus loin, chez les Bachkirs. Là, on lui propose un étrange marché, il aura autant de terre qu’il peut en faire le tour en une journée. Seulement dans son envie d’avoir plus, Pacôme pense à aller le plus loin possible, mais pense peu au retour…
C’est une magnifique (et tragique) histoire de Tolstoï qu’adapte ici, avec beaucoup de talent, Annelise Heurtier. Un conte russe qui a plus d’un siècle et qui est pourtant tout aussi parlant aujourd’hui. À force de vouloir toujours plus, qu’avons-nous au final ? L’histoire est magnifique et la plume d’Annelise Heurtier est très belle, mais surtout le livre est sublimé par les illustrations de Raphaël Urwiller (un des membres d’Icinori dont nous avions adoré Issun Bôshi). De plus, Thierry Magnier a fait un bien bel ouvrage avec un beau papier épais.
Un bien beau livre, tant sur le fond que sur la forme, pour se rappeler que l’important est de profiter de ce que l’on a plutôt que d’en vouloir toujours davantage.
L’heure de la retraite a sonné pour Nénette, l’orang-outang du Jardin des Plantes à Paris. Faut dire qu’elle vivait enfermée depuis qu’elle était enfant, il était temps qu’on la laisse partir. On lui dégote donc un petit deux pièces sous les toits à Paris et on lui donne quand même quelques consignes : manger équilibré, faire un peu de sport, prendre ses médicaments pour la tension et nourrir le petit chat. Seulement, Nénette a du mal à suivre tout ça, elle mange surtout des bananes et elle grossit de plus en plus… Et si sa vie était ailleurs ?
Quel magnifique ouvrage ! Claire Lebourg a écrit, illustré et même édité ce très bel objet (là aussi tant au niveau du contenu que du contenant !) et soyons franc, je n’ai jamais vu un livre autoédité d’une telle qualité (à tout point de vue). Les illustrations sont superbes, le papier épais et l’histoire aussi drôle que poétique. Claire Lebourg s’est inspirée de la vraie Nénette du Jardin des Plantes (qui a moins de chance que son héroïne, car, elle, vit toujours enfermée). Au-delà de ça, on pourra aussi y voir une métaphore sur l’heure de la retraite chez nous, les hommes, cousins des orangs-outangs.
Une magnifique histoire sur la liberté, un petit bijou.
De nombreux extraits sur le site de Claire Lebourg.
Le même vu par Enfantipages.
On termine par une histoire pleine d’humour qui nous a bien fait nous bidonner, ma fille et moi.
Un chevalier s’avance vers une haute tour où vit une princesse. Il lui annonce être le célèbre chevalier noir et qu’il vient la délivrer, il suffit qu’elle lui jette les clés du château. La princesse ne voit pas pourquoi elle ferait ça, elle ne le connaît pas et visiblement elle est bien là où elle est ! Alors le chevalier menace, si la princesse n’obéit pas, il fera intervenir son géant. Un géant ? Notre princesse se marre, et affirme quant à elle avoir une fée. Sauf que d’après le chevalier les fées n’existent pas…
Je ne vais quand même pas vous raconter toute l’histoire, même si je suis bien tenté (et tout à l’heure encore, je la racontais en me marrant), mais voilà une histoire pleine d’énergie et d’humour avec une princesse vraiment pas nunuche (et un chevalier quand même un peu arrogant !). On y voit même un combat à mains nues entre les deux héros, et croyez-moi, la princesse n’est pas la plus faible !
Un album plein de punch, vraiment très drôle dont la fin me fait me gondoler.
Des extraits sur le site de l’illustrateur.
Quelques pas de plus…
Nous avons déjà chroniqué des ouvrages de Thomas Scotto (Un bond de géant – 1969, on a marché sur la lune), Olivier Tallec (La boum ou la plus mauvaise idée de ma vie, Qui quoi qui, Coffret Grand Loup & Petit Loup, Marlaguette, Le plus féroce des loups, Pas de pitié pour les baskets, Kevin et les extraterrestres, Restons Calmes !, Joyeux Noël Rita et Machin, Maurice Carême chanté par Domitille, Mon cœur en miettes, Le slip de bain, ou les pires vacances de ma vie et La croûte), Annelise Heurtier (L’affaire du chien, Babakunde, On déménage !, Drôle de rentrée !, Sweet Sixteen, Le carnet rouge et La fille aux cheveux d’encre), Raphaël Urwiller (Issun Bôshi, l’enfant qui n’était pas plus haut qu’un pouce), Michaël Escoffier (L’anniversaire, La croccinelle, Le ça, Tous les monstres ont peur du noir, Trois petits riens, Le jour où j’ai perdu mes super pouvoirs, Zizi, Zézette, mode d’emploi, Le grand lapin blanc, Vacances à la ferme, Bonjour Facteur, La plume et Sans le A, Bonjour Docteur) et Stéphane Sénégas (Y’a un monstre à côté). Retrouvez aussi nos interviews d’Annelise Heurtier et de Michaël Escoffier.
Jérôme par cœur Texte de Thomas Scotto, illustrations d’Olivier Tallec Actes Sud Junior 14,20 €, 285×225 mm, 30 pages, imprimé en Italie, 2009. |
Combien de terre faut-il à un homme ? Texte d’Annelise Heurtier d’après Tolstoï, illustré par Raphaël Urwiller Thierry Magnier 17 €, 310×180 mm, 40 pages, imprimé en Italie, 2014. |
La retraite de Nénette de Claire Lebourg Auto-édité 15 €, t155x246 mm, 56 pages, imprimé en Espagne, 2014. |
Le chevalier noir Texte de Michaël Escoffier, illustré parStéphane Sénégas Frimoussedans la collection Sa majesté du soir 14 €, 225×292 mm, 24 pages, imprimé en Italie, 2014. |
À part ça ?
Le mois de septembre est là, c’est le moment de vous donner nous coups de cœur de juillet-août. Marianne a choisi Wilo et Mi de Séverine Vidal et Christine Roussey (L’élan vert), Le jour où j’ai rencontré le monstre de Céline Claire et Barroux (Circonflexe) et Pousse Piano de Gilles Baum et Rémi Saillard (Le baron perché). Et moi : Le grand Antonio d’Élise Gravel (La Pastèque), Arlequin, Charlot, Guignol & Cie de Bénédicte Rivière et Gérard DuBois (Actes Sud Junior) et La princesse qui n’aimait pas les princes d’Alice Brière-Haquet et Lionel Larchevèque (Actes Sud Junior).
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Gabriel
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
Oh, Jérôme !
Quelle merveille ce livre ! Tout y est délicat et sensible : le texte, le dessin. Un must !
Et je vais me ruer sur “Combien de terre…”, évidemment !