Aujourd’hui on part à la rencontre de Joanna Wiejak, l’autrice et illustratrice du fantastique Les salades de mon grand-père, et puis l’on parle chaîne alimentaire avec Mathias Friman l’auteur d’Une petite mouche bleue… Bon mercredi !
L’interview du mercredi : Joanna Wiejak
Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
Je suis née en Pologne et arrivée en France à l’âge de 15 ans. Après le bac scientifique, j’ai suivi une formation à l’École de Communication Visuelle Paris et travaillé en tant que graphiste freelance depuis mes débuts. Il y a quelque temps, j’ai quitté Paris pour la campagne gersoise. L’éloignement et le calme favorisant l’introspection, j’ai renoué avec le dessin et mes origines polonaises.
Comment vous est venue l’idée de Les salades de mon grand-père ?
Cette idée a exactement 1 an mais il est toujours difficile de qualifier ou interpréter une inspiration. Elle puise sûrement dans la figure importante qu’a joué mon grand-père pour moi et son rapport à la réalité. Toujours tiré à quatre épingles, les souvenirs où nous partions en montagnes sont encore très prégnants. D’autre part, j’aime beaucoup les expressions, imagées et ludiques. Les malaxer, les triturer, travailler autour d’une expression dont sa traduction visuelle pouvait être un jeu me plaisait.
Les salades de mon grand-père nous parle de l’importance des histoires pour embellir et inventer son quotidien. Quelles ont été les « salades » qui ont changé votre vie enfant ?
J’ai grandi dans une Pologne des années 70 et 80, le contexte politique était particulier et tendu : soumission à l’URSS, inflation galopante, révoltes ouvrières, tickets de rationnement, état de guerre. Malgré ce contexte, l’expression « ça va » est probablement la salade qui m’a le plus servi pour traverser l’enfance normalement.
Quelles étaient vos lectures d’enfant et d’adolescente ?
Je n’ai jamais été une grande lectrice. Au grand dam de ma mère, philologue de la langue polonaise et travaillant dans une maison d’édition à Cracovie, je limitais mon utilisation du livre à regarder les illustrations et dessiner dans les marges… Malgré ça, elle continuait à m’encourager à la lecture, surtout des livres avec des héroïnes au caractère fort comme Fifi Brindacier et Les enfants de Bullerbyn d’Astrid Lindgren ou la série d’Anne, une autre rouquine, (Anne… La maison aux pignons verts, Anne d’Avonlea, etc.) de l’auteure canadienne Lucy Maud Montgomery. Personnellement, j’avais une préférence pour des héros imaginaires et des univers prenant source dans le rêve : la série Moomins de Tove Jansson, Winnie l’Ourson d’Alan Alexander Milne, Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll et dans un registre plus « local » la géniale trilogie Przygody Baltazara Gąbki de Stanisław Pagaczewski – aventures rocambolesques avec une galerie de personnages empruntés aux récits populaires et hauts en couleur. Ferdynand Wspaniały (Ferdinand le Magnifique) de l’auteur polonais Ludwik Jerzy Kern – histoire d’un chien qui rêve d’être un humain – et Babcia na jabłoni (Die Omama im Apfelbaum la traduction pourrait être « Grand-mère dans le pommier ») de l’auteure autrichienne Mira Lobe – histoire d’un garçon qui s’invente une grand-mère – m’ont également beaucoup touchée.
Avez-vous de nouveaux projets d’albums ?
J’ai effectivement quelques idées 🙂
Son site : http://yoyo.ultra-book.com/
Bibliographie :
- Les salades de mon grand-père, texte et illustrations, Le Diplodocus (2017), que nous avons chroniqué ici.
- Mon cahier d’activité tout fou, illustrations d’un texte de Madeleine Deny, Éditions Tourbillon (2015).
Parlez-moi de… D’une petite mouche bleue
Régulièrement, on revient sur un livre qu’on a aimé avec son auteur.trice, son illustrateur.trice et/ou son éditeur.trice. L’occasion d’en savoir un peu plus sur un livre qui nous a interpellés. Cette fois-ci, c’est sur D’une petite mouche bleue, que nous revenons avec son auteur et illustrateur (Mathias Friman). L’éditrice n’a pas trouvé le temps de nous répondre.
Mathias Friman, auteur et illustrateur:
D’une petite mouche bleue est l’histoire d’une chaine alimentaire comme il en existe beaucoup d’autres. Mais elle parle aussi du temps, de la mort, et de la place de l’homme dans tout cela.
D’une petite mouche bleue est né un bel après-midi d’automne à la ménagerie du Jardin des Plantes. Partis, pour une journée familiale au Jardin des Plantes, mes enfants et moi sommes en arrêt devant un terrarium rempli de grenouilles bleues (Dendrobates azureus, et oui un peu de culture cela n’a jamais fait de mal à personne)…
— Elles mangent quoi ? me demande Éponine, ma fille…
Je pense et imagine de suite des mouches bleues mais César, mon fils de 8 ans, fin spécialiste de la chose et de ce qui l’entoure, répond plus vite que moi : « Du Caca… »
La mouche bleue était née en un mot. Il ne me restait qu’à étoffer l’histoire, trouver une suite possible, pas scientifique mais réaliste et drôle… Ma première interrogation fut : « À qui appartient ce beau caca bleu ? ». Seul l’homme pouvait en être le dépositaire, il nous renvoie à notre rôle envers cette nature.
Pour l’illustration, j’allais demander à celui qui savait le mieux ce que je voulais : Moi. J’allais pouvoir m’éclater, mettre en application mes lointaines études parisiennes à l’école nationale supérieure des beaux-arts et ma passion pour l’histoire naturelle.
L’utilisation du crayon graphite et seulement du bleu, est arrivée naturellement dans les premiers croquis… (L’histoire devait être comprise par tous, seulement en regardant les images).
L’histoire écrite, les premières planches illustrées faites, il me fallait trouver une belle maison d’édition pour me guider. La mouche bleue s’envola naturellement pour ses voisines Les Fourmis Rouges (pas pour crier famine, mais pour être aimée et publiée). Valérie, l’éditrice, a été de bons et précieux conseils, tant sur la mise en page que pour tout le reste. Créer D’une petite mouche bleue a été merveilleux, et travailler en concertation avec les Fourmis Rouges un véritable bonheur (qui j’espère va se reproduire rapidement).
D’une petite mouche bleue de Mathias Friman, sorti chez Les fourmis rouges (2017), que nous avons chroniqué ici. |
Née au début des années 90s, tour à tour professeure, amoureuse de la vie, de la littérature, de la musique, des paysages (bourguignons de son enfance, mais pas que…), des films d’Agnès Varda, des vers de Cécile Coulon et des bulles de Brétecher. Elle a fait siens ces mots de Victor Hugo “Ceux qui vivent ce sont ceux qui luttent”.