Aujourd’hui, c’est Ludovic Flamant qui a accepté de répondre à mes questions. Très fan de plusieurs de ses albums, j’avais envie d’en savoir plus sur lui et sur son travail. Suite à cette interview, vous pourrez tenter de gagner l’un de ses albums. Ensuite, je vous propose un En vacances avec ! Après Albertine, c’est avec Germano Zullo que je pars, quoi de plus logique ? Bon mercredi à vous !
L’interview du mercredi : Ludovic Flamant
Comment êtes-vous devenu auteur ? Parlez-nous de votre parcours
L’envie d’écrire, je la porte en moi depuis toujours : à quatre ans, quand on me demandait ce que je ferais comme métier plus tard, je répondais sans hésiter « faiseur de bandes dessinées » (ce que je n’ai au final encore jamais concrétisé). Ma mère était contrainte d’écrire ce que je lui dictais dans les bulles de mes personnages, la pauvre… Je voulais entrer à la « grande » école pour apprendre à écrire et uniquement cela. Même lire ne faisait pas strictement partie de la liste de mes désirs, à l’époque ! J’ai entamé de nombreux débuts de romans, tous abandonnés, au cours de mon enfance mais ai gagné quelques concours pour des poèmes. Je crois que c’est surtout la poésie qui m’a fait continuer à écrire parce que c’était une forme courte que je pouvais maîtriser de façon assez immédiate sans nécessité de discipline sur la durée, ce dont je suis apparemment incapable. À quinze et dix-sept ans, j’ai remporté le Prix International Jeunes Auteurs pour un poème puis pour une nouvelle et cela fut décisif pour moi. J’ai ensuite écrit pour le théâtre et mes pièces furent jouées. Mon écriture était alors exclusivement tournée vers les adultes mais l’envie d’écrire des albums m’a titillé dès mes dix-huit ans lorsque j’ai découvert Le voyage d’Orégon de Rascal et Louis Joos. C’est grâce à mon fils, six ans plus tard que j’ai franchi le pas : je cherchais pour lui une histoire parlant d’éboueur, sa passion du moment, sans en trouver. Je me suis dit : Et pourquoi pas le faire moi-même ? C’est ainsi qu’est né Chafi, illustré par Emmanuelle Eeckhout.
J’aimerais que vous nous parliez du magnifique Il était mille fois, comment s’est passé l’écriture de cet album, il y a des choses vécues par vous-même ?
Cet album est né de deux choses : de dessins de Delphine Perret que j’avais vus sur son blog, une série de personnages ayant tous pour point commun un même détail formel, à savoir une tache de couleur alors que tout le reste était au fin trait noir, ensuite de mon envie de travailler purement sur les émotions. Le côté sériel de ses illustrations m’inspirait pour quelque chose qui serait de l’ordre de l’énumération – J’aime beaucoup les listes ! Quant à l’émotion, elle est souvent le point de départ de mon travail : je me plonge dans mes souvenirs et me demande ce qui m’a fait peur, mis en colère, réjoui, étonné, dégoûté, rendu triste (façon Hulul préparant son thé aux larmes)… Et je pars du souvenir pour broder une histoire autour. Ici, je me suis borné à lister des situations mais toujours en pensant que ce serait idéalement avec des illus de Delphine. Je n’aurais sans doute pas sélectionné les mêmes situations si j’avais pensé par exemple à Emmanuelle Houdart, que j’aime beaucoup aussi mais dans un tout autre registre… Ensuite, il était important pour moi que cette longue liste puisse sonner comme un poème à la Prévert lorsque je la lirais à haute voix, ce que j’ai atteint mais ne se ressent pas du tout au final puisque, bien sûr, le lecteur s’arrête sur chaque image. De nombreux parents m’ont dit que la lecture de cet album prenait du temps car les situations leur évoquaient d’autres souvenirs personnels qui les invitaient à parler avec leurs enfants. Cela me réjouit puisque ne pas écrire d’histoire à proprement parler avait bien pour but de laisser l’espace nécessaire au lecteur pour s’en inventer mille à partir de petits riens, ce qu’a très bien compris Valérie Cussaguet, l’éditrice des Fourmis rouges.
Par votre métier de bibliothécaire, vous devez être amené à beaucoup lire, est-ce que ça vous nourrit pour vos histoires ou au contraire ça parasite le processus d’écriture ?
Un peu des deux. Il y a des projets que j’entame puis abandonne parce que je tombe sur un livre trop proche de ce que je voulais raconter. Dans ces cas-là, je me dis : à quoi bon rajouter un livre sur la table des libraires qui n’ont déjà pas assez de place pour nous défendre ? J’ai souvent l’impression que les éditeurs sont ignorants de ce qui se fait en dehors de leur maison sinon ils ne laisseraient pas sortir autant de choses mille fois dites et redites… En même temps, lire un bon livre me donne si souvent l’envie d’en écrire un à mon tour… Je n’ai pas encore trouvé d’équilibre serein par rapport à cette question. D’autant que je suis très préoccupé par les questions d’écologie et, à un moment donné, les livres comme le reste finissent par venir gonfler la masse des déchets humains, tout produit culturel qu’ils sont, sans compter les arbres coupés en amont pour leur fabrication…
Quelles étaient vos lectures d’enfant, d’adolescent ?
Je lisais très peu étant enfant. Ou des choses pas franchement littéraires : Marmouset, Bob et Bobette, Les Farfeluches, des imagiers de Richard Scarry… J’éprouve aujourd’hui une grande affection pour tous ces livres, évidemment, mais ce n’est pas eux qui ont forgé mon goût pour la littérature jeunesse. Je n’ai découvert qu’adulte les Sendak, Lobel et autres qui allaient devenir mes « héros » ! Sinon, franchement, je regardais surtout la télévision. Ce n’est que vers mes 15 ans que je suis devenu un grand lecteur, principalement de poésie : Verlaine, Rimbaud et Baudelaire en premier lieu, puis Michaux, Prévert, Vian, Cliff, Savitzkaya, Bukowski… Eux, je pourrais en parler pendant des heures ! Quelle révélation ! C’est à cet âge-là que j’ai perdu la foi : tout à coup, des hommes apportaient de vrais éléments de réponse à mes questions ! Et cela continue aujourd’hui. Il y a des auteurs actuels que je suis assidûment : Mélanie Rutten, Adrien Albert, Anaïs Vaugelade me déçoivent rarement.
Quels sont vos projets ?
Depuis un temps, j’ai fortement ralenti mon écriture d’albums mais ça ne veut pas dire que je ne fais rien ! Mes projets actuels se tournent principalement vers la scène : slam et conte, notamment. J’expérimente beaucoup. Un scénario de long-métrage aussi, avec le réalisateur Xavier Seron dont le tout nouveau film Je me tue à le dire devrait sortir en mai 2016 (Allez le voir ! Vraiment !). J’apprends à dessiner, je donne de plus en plus de formations et conférences sur la lecture d’album et puis, tout de même, j’en écris encore : pour l’instant avec Chantal Peten, Catherine Pineur et Elis Wilk, mais sans aucune idée de quand ils verront le jour…
Une dernière question, si quelqu’un qui ne vous connaît pas lit cette interview et veut vous découvrir avec un seul de vos ouvrages, lequel lui conseilleriez-vous
Sans hésiter Louis des sangliers, chez Pastel, illustré par Émilie Seron. Une histoire d’homme bourru qui vit en retrait de la société et se retrouve contraint de s’occuper d’un bébé dont il ne voulait pas mais auquel il s’attache. Probablement l’histoire dans laquelle j’ai mis le plus de moi-même. Celui-là, j’ai peur du jour où on me dira qu’il faut le pilonner ! Sinon, je suis assez fier d’avoir pu traduire un Edward Gorey : Les enfants fichus, aux éditions du Tripode.
Bibliographie (jeunesse) sélective :
- Quand tu es amoureux, illustré par David Merveille, Marmaille & Cie (2015).
- Les poupées c’est pour les filles, illustré par Jean-Luc Englebert, Pastel (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Bonne ou mauvaise idée, illustré par Pascal Lemaître, Pastel (2014).
- Il était mille fois, illustré par Delphine Perret, Les fourmis rouges (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Petites filles des 4 saisons, illustré par Catherine Proteaux, Bayard (2010).
- On ne joue pas avec la nourriture, illustré par Émile Jadoul, Pastel (2009).
- Tout le monde est prêt ?, illustré par Émile Jadoul, Pastel (2009).
- Louis des sangliers, illustré par Émilie Seron, Pastel (2007).
- La soupe aux miettes, illustré par Émile Jadoul, Pastel (2007).
- Trop la honte !, illustré par Emmanuelle Eeckhout, Pastel (2007).
- Des livres plein la maison, illustré par Émile Jadoul, Pastel (2007).
Son site : http://www.ludovicflamant.be.
Concours :
Grâce à l’école des loisirs, l’un.e de vous va pouvoir gagner Louis des sangliers, un album dont parle Ludovic Flamant dans cette interview. Pour participer, il vous suffit juste de laisser un commentaire sous cet article. Le gagnant ou la gagnante sera tiré.e au sort parmi tous les commentaires. Vous avez jusqu’à mardi 20 h. Bonne chance à tous et à toutes !
En vacances avec… Germano Zullo
Régulièrement, je pars en vacances avec un.e artiste (je sais vous m’enviez). Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais moi j’adore partir comme ça avec quelqu’un, on apprend à la.le connaître notamment par rapport à ses goûts… cet.te artiste va donc profiter de ce voyage pour me faire découvrir des choses. On emporte ce qu’elle.il veut me faire découvrir. On ne se charge pas trop… 5 de chaque ! 5 albums jeunesse, 5 romans, 5 DVD, 5 CD, sur la route on parlera aussi de 5 artistes qu’il.elle veut me présenter et c’est elle.lui qui choisit où l’on va… 5 destinations de son choix. Cette fois-ci, c’est avec Germano Zullo que je pars ! Allez en route !
5 albums jeunesse
- Ri-di-cules. André François.
- Le Canard, la Mort et la Tulipe. Wolf Erlbruch.
- La Ronde annuelle des marteaux-piqueurs ou La Mutilation d’un paysage. Jörg Müller.
- J’ai peur. Géraldine Kosiak.
- Le Manège. Donald Crews.
5 romans
- Le Château. Franz Kafka.
- Solaris. Stanislas Lem.
- 2666. Roberto Bolaño.
- Demande à la poussière. John Fante.
- La Vache. Beat Sterchi.
5 BD
- L’Énigme de l’Atlantide. Edgar P. Jacobs.
- Les Bijoux de la Castafiore. Hergé.
- Ici. Richard McGuire.
- Hortus Sanitatis. Frédéric Coché.
- Sol Carelus. Ruppert & Mulot.
5 DVD
- 2001, l’Odyssée de l’espace. Stanley Kubrick.
- Stalker. Andrei Tarkovski.
- La Cité des femmes. Federico Fellini.
- Suspiria. Dario Argento.
- La Bête lumineuse. Pierre Perrault.
5 CD
- Le Avventure di Lucio Battisti e Mogol.
- The Smiths.
- Time and Place. Lee Moses.
- Thrène à la mémoire des victimes d’Hiroshima. Krzysztof Penderecki.
- The Blow up. Television.
5 artistes
5 lieux
- Les bois de Jussy dans le canton de Genève.
- Les quartiers espagnols de Naples.
- Le parc de Villa Borghese à Rome.
- Le marché aux poissons de Tsukiji à Tokyo.
- Noctis Labyrinthus sur la planète Mars.
Bibliographie sélective :
- Faim de corps, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (à paraître fin avril).
- Une histoire du musée selon Fanny Jenisch, texte illustré par Albertine, Musée Jenisch Vevey (2015).
- Les Aventures de Marta, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2015)
- Mon tout petit, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2015), que nous avons chroniqué ici.
- Les robes, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2014).
- Quelque part entre deux points du monde suivi de Ici, Naphtaline (2014).
- À pas de loups, collectif, À pas de loups (2014)
- Dadá, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2013), que nous avons chroniqué ici.
- Ligne 135, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2012).
- À la montagne, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2011), que nous avons chroniqué ici.
- Les oiseaux, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2010).
- Le plus grand footballeur de tous les temps, La Joie de Lire (2010).
- Les gratte-ciel, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2011).
- À la mer, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2008).
- La rumeur de Venise, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2008).
- Quelques années de moins que la lune, La Joie de Lire (2006).
- Le Génie de la Boîte de Raviolis, texte illustré par Albertine, La Joie de Lire (2002).
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
Merci pour cette interview très intéressante.
je veux bien participer au concours.
bonne journée.
Sandra.
Merci pour ce concours.
Je suis passionnée de littérature jeunesse et j’adore ce que vous publiez.
Madeline.
Bonjour!
Merci pour ce joli concours!
Bonne journée!
Un auteur que je ne connais vraiment à part le “Il était mille fois”. Alors pourquoi pas commencer par lire “Louis des sangliers”.
Merci pour ce concours et longue vie à La Mare !
Encore des découverte ce mercredi. Vous me régalez presque tous les jours
Coucou La Mare aux mots!
C’est par cette belle journée ensoleillée que je laisse un petit mot!! Encore un super mercredi avec vous! J’ai déjà lu des livres de Ludovic Flamant mais ça me donne envie de m’y replonger! Et puis, il donne envie d’écrire… Bon, il est bibliothécaire comme moi, il conte (comme moi, bon moi c’est à petite échelle!). Il donne très envie de le rencontrer!
Merci pour ce concours et je vous souhaite une belle journée!
Bonjour,
Merci la mare aux Mots. C’est un auteur que je ne connaissais pas, en plus il est bibliothécaire 🙂
je participe avec plaisir au concours
Et bien… au risque de me répéter,…merci pour ce concours auquel je participe volontiers ne connaissant pas cet album de Ludovic Flamant 🙂
Hey la Mare! Veux bien faire la connaissance de ce sanglier moi! Merci!
Bonne journée 🙂
Je tente ma chance moi aussi pour Louis le sanglier ! Merci pour vos chroniques, toujours de belles découvertes !
Chez nous on est totalement fans de Il était mille fois! Mes enfants de 6 et 8 ans adorent s’y replonger régulièrement et y font souvent référence en souriant (un petit trou dans les chaussettes…).
Par contre c’est le seul ouvrage de cet auteur qu’on connaît, donc si ce concours nous permet d’en découvrir un nouveau, on est partants !!!!
Y’a encore moyen de participer ? Je ne connais absolument pas cet auteur et aucun titre ne me parle. Alors je tente, j’aime bien les surprises !
Bravo à Catherine Latteux