Aujourd’hui, on continue notre découverte des troubles du langage et de la communication, avec une sélection, loin d’être exhaustive, de livres en lien avec ces thèmes ! Retrouvez également la chronique d’hier.
Coucou est un oiseau. Un bel oisillon qui vit avec ses parents et ses frères. Mais Coucou est différent. On ne le comprend pas, malgré tous ses efforts, et tout cela est bien déconcertant. Alors il part à la recherche de quelqu’un qui puisse le comprendre. Aucun succès auprès des moutons, des grenouilles, des cochons, des serpents, des vaches, des lapins. Il décide alors, à défaut de pouvoir utiliser la sienne, d’apprendre une autre langue. Mais une nouvelle fois, c’est insurmontable pour lui. Trouvera-t-il enfin quelqu’un qui le comprenne ?
Quelle belle histoire ! Je ne sais pas si Fiona Roberton a pensé aux personnes souffrant de troubles de la communication en écrivant l’histoire de Coucou !, mais je trouve qu’il y a énormément de similitudes avec ces enfants (et ces adultes) qui malgré tous leurs efforts, peinent à être compris. Les illustrations sont elles aussi vraiment réussies, douces, rondes, tendres, et vivantes à la fois, et ce petit oisillon est vraiment très attachant ! Je peux le dire, j’ai eu un coup de cœur pour cet album, qui sans en avoir l’air, aborde les troubles du langage.
C’est la rentrée pour Grégoire. Mais quelle épreuve pour lui qui souffre de dysphasie, ce trouble spécifique du langage oral. Il a du mal à s’exprimer, mais également des difficultés à comprendre tout ce que dit la maîtresse. Pourtant, il n’en est pas moins un petit garçon très intelligent, qui dessine extrêmement bien, joue aux dominos plus vite que bien des copains, et comprend énormément de choses, tant qu’elles ne passent pas par le langage oral. Alors il va voir une orthophoniste régulièrement, et par ailleurs, la maîtresse et ses petits copains s’adaptent et s’appuient sur ses forces ! Les progrès ne tardent pas !
On sent décidément bien que Danielle Noreau est orthophoniste. Les victoires de Grégoire est une histoire pleine de vérité sur le quotidien des jeunes enfants dysphasiques. Ces enfants sont pleins de ressources, et ce texte met justement l’accent sur leurs forces ! C’est plein d’espoir, réaliste, et les grandes illustrations de Stéphane Jorisch aideront justement les enfants concernés à bien comprendre l’histoire. En fin d’ouvrage, comme toujours dans la collection J’apprends la vie, on trouve des informations théoriques sur la dysphasie et l’orthophonie !
Autre domaine dans lequel intervient l’orthophoniste : les troubles du langage écrit.
Le lion ne savait pas écrire. Mais il s’en fiche un peu, car il a d’autres talents : il rugit et il montre les crocs. Mais lorsqu’il tombe amoureux d’une lionne, il se dit que pour lui déclarer sa flamme, avant de l’embrasser, il doit lui écrire une lettre. Et là, il est bien embêté ! Il demande donc autour de lui que les animaux lui écrivent une lettre. Mais chacun écrit en fonction de sa propre personnalité : le singe propose à la lionne de grimper aux arbres, l’hippopotame de patauger dans la boue, et ainsi de suite. Le lion est en colère, parce que lui a une idée très précise de ce qu’il veut lui dire… Mais après tout, est-ce trop tard pour apprendre ? Certainement pas !
La lutte contre l’illetrisme (qui contrairement à l’analphabétisme, désigne l’incapacité à lire et écrire alors que l’on a été scolarisé) fait partie du champ de compétence de l’orthophoniste, et a récemment fait l’objet d’un plan national. L’histoire du lion qui ne savait pas écrire traite de ce sujet peu abordé dans la société, avec humour et tendresse. Martin Baltscheit nous fait comprendre qu’il n’y a pas d’âge pour avoir accès au langage écrit, source de tant de libertés et d’indépendance. Accessible aux enfants, ingénieuse et drôle, cette histoire peut également redonner confiance aux enfants en peine avec l’écrit. Marc Boutavant propose de très belles illustrations expressives et pleines d’humour comme je les aime ! A découvrir, lire et faire lire !
Cette petite fille « nage en écriture et [s]’enlise en lecture ». Le retard s’accumule et c’est de plus en plus difficile ! Alors commence un parcours du combattant : psychanalyste, pédopsychiatre, ophtalmo, ORL, radio, rien de rien pour éclairer cette situation ! Et si c’était la dyslexie ? Madame Charabia, l’orthophoniste devrait pouvoir l’aider !
Quelle belle histoire ! J’ai attrapé la dyslexie de Zazie Sazonoff est un petit bijou ! Avec beaucoup de poésie mais aussi beaucoup de simplicité qui permet de rendre ce texte accessible aux lecteurs en difficultés (qui peuvent être accompagnés pour le découvrir), elle retrace avec force le parcours d’un enfant dyslexique. Les illustrations très simples, noires, blanches et rouges sont un mélange de lettres et de dessins, pour traduire un peu ce qu’il peut se passer dans la tête de cette petite fille qui retrouve progressivement confiance en elle et prend le pouvoir sur les mots ! J’ai attrapé la dyslexie est une belle histoire à diffuser pour faire connaître ce trouble dont on entend tant parler, et rassurer les enfants concernés !
Ahhh, l’orthographe ! Cet ensemble de règles qui font notre belle langue, mais aussi sa complexité ! Alors pourquoi est-ce parfois aussi difficile ? Et quelle est son histoire, toujours en mouvement aujourd’hui ? Et puis comment faire pour l’apprivoiser ?
Mine d’informations et de réflexions, L’orthographe est un carnet original à mettre entre toutes les mains. Il est bien possible qu’il parvienne à en réconcilier certains avec ce mot, qui déjà, n’est pas simple à écrire. Sous forme d’un petit carnet facilement manipulable, Catherine Benedetto-Nazarenko, propose de retrouver sur la page de gauche des informations historiques et sociologiques pour comprendre l’évolution de l’orthographe et à droite, une page pour réfléchir à son propre rapport aux mots, à l’écrit, et aux règles parfois complexes ! De manière ludique, le lecteur s’interroge sur ses forces, ses faiblesses, mais aussi les moyens qu’il a à sa disposition de contourner les difficultés ! C’est bien pensé, complet et je pense que ça peut permettre d’apprendre à apprécier la langue française avec ses particularités !
Mais l’orthophonie concerne bien d’autres domaines !
Mamie doit venir vivre à la maison. Elle ne peut plus vivre seule. En effet, elle perd la mémoire et a besoin d’aide au quotidien. Alors ses petits-enfants se démènent. Ils créent des dessins à afficher sur chaque porte pour que Mamie se repère, l’aide à mettre sa grande serviette parce qu’elle a de plus en plus de mal à manger proprement, construisent un album photo de toute la famille avec les noms inscrits dessous, et prennent le temps d’inscrire chaque jour sur le tableau la date et la météo…
Quelle belle manière d’aborder la démence de la personne âgée… ! Alors que le sujet est difficile, et que les enfants se sentent souvent impuissants face aux changements dont sont frappés leurs grands-parents, Ana Bergua parvient à proposer, avec Mamie a besoin de bisous, une magnifique histoire, pleine de douceur, de vie, et d’espoir. Les petits-enfants se démènent et proposent des solutions concrètes pour aider leur grand-mère. J’ai eu un coup de cœur pour les illustrations de Carme Sala, tout en rouge et blanc ! Et mine de rien, tous les aspects de la maladie sont là : désorientation, chutes, difficultés avec les gestes quotidiens, troubles de la mémoire,… Rien n’est oublié, et on parle même de l’accueil de jour proposé aux familles pour souffler de temps en temps. Et surtout, on parle d’amour, de famille, de tendresse, et de gaieté ! L’orthophonie, c’est aussi la prise en charge des personnes atteintes de maladies dégénératives qui impactent le langage et la communication, dont la Maladie d’Alzheimer.
Remontons à la fin du XIXème siècle, époque à laquelle Annie Sullivan et Helen Keller vont se rencontrer. Helen Keller est une petite fille de l’Alabama qui devient sourde et aveugle à l’âge de 18 mois. La communication avec son entourage est alors extrêmement difficile, et c’est grâce à Annie Sullivan, sa gouvernante elle aussi malvoyante que la fillette pourra s’ouvrir au monde. En effet, celle-ci va lui apprendre la langue des signes, en s’aidant du toucher, un des sens que la fillette possède encore. Elle parviendra même à accéder au langage écrit et Helen et Annie resteront liées pour la vie.
Je crois que cette histoire, découverte sous forme de roman alors que j’étais encore collégienne, est une de celles qui m’a mise sur la voie de l’orthophonie. La discipline n’existait pas en tant que telle à l’époque, mais tous les efforts déployées par Annie Sullivan pour permettre à cette fillette de communiquer malgré ses difficultés est finalement une belle définition du métier. Inspirée d’une histoire vraie, souvent adaptée dans la littérature ou au cinéma, l’histoire d’Helen Keller est aujourd’hui adaptée en bande dessinée par Joseph Lambert, et c’est une réussite. Ses toutes petites cases, comme des petites fenêtres sur la vie d’Helen et Annie nous plonge au cœur de la relation de ces deux personnages, qui n’a pas toujours été des plus sereines ! Esthétique, graphique, et émouvant, c’est une réussite !
Quelques pas de plus…
Nous avons déjà chroniqué d’autres livres de Danielle Noreau (Les noeuds dans la gorge d’Ariane), Marc Boutavant (Chien pourri, Bogueugueu est amoureux, Edmond la fête sous la lune et Mon copain Bogueugueu), et Stéphane Jorisch (Un cadeau pour Sophie). Retrouvez d’autres livres qui mettent en scène la différence sous toutes ses formes, et notamment divers handicaps dont des troubles du langage et de la communication grâce à la fiche thématique.
Coucou ! de Fiona Roberton (traduit par Mireille Chauveinc) Circonflexe 13 €, 293 x 287 mm, 32 pages, imprimé aux Émirats Arabes Unis, 2014 |
Les victoires de Grégoire Texte de Danielle Noreau, illustré par Stéphane Jorisch Dominique et Cie 14 €, 223 x 288 mm, 24 pages, imprimé en Chine, 2010 |
L’histoire du lion qui ne savait pas écrire Texte de Martin Baltscheit (adapté en français par Bernard Friot), illustré par Marc Boutavant P’tit Glénat 11 €, 285 x 200 mm, 32 pages, imprimé en Italie, 2012 |
J’ai attrapé la dyslexie de Zazie Sazonoff Actes Sud dans la collection Encore une fois 4,95 €, 150 x 190 mm, 36 pages, imprimé au Portugal, 2013 |
L’orthographe de Catherine Benedetto-Nazarenko L’épicerie de l’orage 10,50 €, nombre de pages, imprimé en Italie, 2011 |
Mamie a besoin de bisous Texte d’Ana Bergua, illustré par Carme Sala Océan Jeunesse 15,22 €, 205 x 225 mm, 33 pages, imprimé en Italie, 2011 |
Annie Sullivan et Helen Keller de Joseph Lambert (traduit par Sidonie Van den Dries) Cambourakis 22 €, 215 x 307 mm, 90 pages, imprimé en Lettonie, 2013 |
Les éditions Tom Pousse, dont nous avons déjà parlé hier avec Mon enfant bégaie, publient des guides très bien faits pour aider concrètement les enfants concernés par les troubles du langage et des apprentissages, dans la collection 100 idées. J’ai notamment lu 100 idées pour développer la mémoire des enfants, 100 idées pour accompagner un enfant avec autisme, et 100 idées pour accompagner les enfants déficients intellectuels. Des sources d’informations, de conseils, et d’idées pratiques à piocher ! Une collection à découvrir !
Marianne
Marianne
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
Très belle collection avec des ouvrages capables de (re)donner le goût de la lecture à tous ceux qui rencontrent des difficultés !
Et qu’il ne faut pas hésiter à leur lire, parce qu’il n’y a pas d’âge pour ça 🙂 !
Tant mieux si j’ai pu partager avec vous mon enthousiasme !
Belle sélection ! Comme toujours, j’apprécie énormément vos chroniques.
“Le ça” de Mickael Escoffier et Mathieu Maudet chez Loulou, pourrait faire partie de cette sélection. Album hilarant sur ” le cheveu sur la langue” !
Oui ! On l’a déjà chroniqué (mais là ça dévoilerai la fin !)
Merci pour ce retour ! 🙂
Cette suite à la chronique d’hier est super! Merci!
“L’histoire du lion qui ne savait pas écrire” a été lue dans la classe de mon fils qui est en MS, et nous avons “L’Histoire du lion qui ne savait pas compter à la maison”…
J’aime particulièrement “Mamie a besoin de bisous”!
Comme le dit si bien Marie-Aude Murail, “Lire c’est vivre”, et pas seulement pour le plaisir, d’abord pour manger, se soigner, se rendre quelque part…
Bonne journée!
Blandine.
Jolie formule ! J’ai moi aussi beaucoup aimé “Mamie a besoin de bisous” ! “Lire, c’est vivre”, je suis bien d’accord !
Bonne journée !
Un grand merci pour cette chronique (en deux parties) très intéressante. On y trouve de bonnes références.
De rien ! J’ai pris beaucoup de plaisir à rédiger cette chronique (comme les autres d’ailleurs, mais là le sujet m’était un peu plus proche encore) !
Encore merci pour cette belle chronique orthophonie!
Merci pour cette belle collection !! 🙂