*traduction de For today I’m a boy, Anthony and the Johnson
Alors que le festival Désir Désir continue de s’interroger sur le genre, Sandra, du très bon blog Maman Baobab, et moi avons décidé de faire une sorte de chronique croisée. Tous les deux nous vous parlons aujourd’hui de livres qui parlent du genre. Un livre en commun (Le garçon oublié de Jean Noël Sciarini) et un livre en plus (Le choix de moi d’Hervé Mestron pour Sandra et Mon frère ma princesse de Catherine Zambon en ce qui me concerne). Nous avons décidé de publier nos chroniques le même jour mais sans faire lire à l’autre ce que nous avions écrit. En espérant que cette chronique croisée vous amusera.
Alyan est un garçon, il a cinq ans. Plus tard il sera une fille, en attendant il s’habille en fée. Sa grande sœur, Nina, doit vivre avec les moqueries à l’école. Quand on a un frère comme Alyan il faut assumer ! Et puis il y a leur mère qui ne comprend plus rien et leur père qui n’est pas vraiment là même quand il est avec eux.
Mon frère, ma princesse est une pièce de théâtre poignante, touchante avec une superbe écriture. Je l’ai lu les yeux humides, pris vraiment par ces personnages, ce qu’ils vivent. Le désarroi des deux filles de l’histoire, la naïveté de l’enfant, ce père qui ne vit que pour son travail et ne regarde plus personne chez lui même si Nina et sa mère font tout pour attirer son regard, pour qu’il pose enfin les yeux sur elles. C’est un très beau texte sur la recherche d’identité, sur la différence, le regard des autres, le harcèlement à l’école. Un questionnement sur le genre, qu’est-ce qu’une fille et qu’est-ce qu’un garçon. Sur la virilité et la féminité. Alyan ne comprend pas pourquoi les filles peuvent jouer au foot et aimer la poésie, mettre du rouge à lèvre et du vernis alors que les garçons n’ont le droit qu’au foot. Et c’est un magnifique texte sur la magie, la magie qui transforme les mamies en fraise tagada et les garçons en fées.
Toni a 16 ans… et il ne sait pas qui il est. Quand tout le monde parle de soi, Toni s’échappe quand vient son tour. Pourtant le jeune garçon en est persuadé, quelque chose va changer sa vie et il pense que ça sera une chanson. Un jour Toni trouve cette chanson et en effet tout est bouleversé.
Il y a deux façons d’appréhender ce très beau roman de Jean-Noël Sciarini ou en tout cas J’AI deux versions à cette chronique. Un peu comme dans Télérama avec un pour et un contre… sauf que les deux seraient écrits par la même personne. On va commencer par le contre (pour finir par le positif). Le livre m’a été « vendu » comme étant un livre sur la transexualité. Si c’est vraiment le cas, il y a un souci… l’histoire n’est absolument pas cohérente (personne, d’après ce que j’en sais, ne se réveille à 16 ans en se rendant compte de sa transexualité). Donc je pourrai partir du principe que la personne qui m’a dit que ça parlait de ça n’a pas compris l’ouvrage… Si par contre on voit dans ce roman l’histoire d’un garçon perdu, comme beaucoup d’adolescent, et qui veut se raccrocher à quelque chose (ce sera le chanteur Anthony Hegarty du groupe Anthony and the Johnson) alors on a un magnifique roman. Un roman sur le fanatisme extrême, cette façon dont les ados ont besoin parfois de devenir le clone de leurs idoles, de ne plus être eux-mêmes pour devenir « lui », cet être fantasmé. C’est un sujet que j’ai toujours trouvé captivant, comment certaines personnes peuvent abandonner leur vie par fanatisme pour une star, accepter toutes sortes d’humiliations et d’oubli de soi pour toucher celui qui a écrit une chanson qui leur semblait écrite pour eux (voir le sublime film F est est salaud). Ici Toni ne vit plus que pour la chanson For Today I Am A Boy, chanson dans laquelle il est répété Un jour je grandirai, je serai une femme magnifique (…) mais pour l’instant je suis un enfant, mais pour l’instant je suis un garçon (One day I’ll grow up, I’ll be a beautiful woman (…) But for today I am a child, for today I am a boy), et, lui qui avait l’impression de n’être personne, il va y trouver qui il est et il va devenir cette chanson. Jean-Noël Sciarini a une des plus belles plumes de la littérature jeunesse actuelle, ses romans sont toujours de très beaux textes, ils ne laissent pas indifférent, ils nous bouleversent, nous marquent. Chacun de ses romans reste en nous. Le garçon bientôt oublié est au choix un très mauvais livre sur la transexualité ou un livre absolument magnifique sur l’adolescence.
Retrouvez l’avis de Maman Baobab.
Quelques pas de plus…
Nous avons déjà chroniqué deux romans de Jean-Noël Sciarini (Tarja et Les disparitions d’Annaëlle Faïer)
Mon frère, ma princesse de Catherine Zambon École des loisirs dans la collection Théâtre 6,60€, 125×190 mm, 61 pages, imprimé en France, 2012. |
Le garçon bientôt oublié de Jean-Noël Sciarini École des loisirs dans la collection Médium 10,20€, 125×190 mm, 200 pages, imprimé en France, 2010. |
Demain Jean-Noël Sciarini sera avec d’autres à la mairie du XVIIème (Paris) pour y dédicacer ses ouvrages dans le cadre de La jeunesse fête le livre. Audren, Romuald, Dorothée de Monfreid, Janik Coat,… il y aura du beau monde ! Plus d’informations ici.
Gabriel
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
Super cette chronique croisée ! 🙂
Oui sympa la chronique croisée … D’autant que vous n’avez pas eu le même regard sur le roman mais qu’il est un coup de cœur pour chacun de vous.
Tentant !