D’ici, je vois la mer est un bel album dépaysant et qui nous emmène dans un village de mineurs sur une côte canadienne. La Vie en rouge nous fait partager le quotidien d’une écolière en proie à la peur de s’exprimer devant les autres. Deux ouvrages empreints de délicatesse.
Dans cet album, la mer est partout. C’est elle qui rythme la journée du petit garçon qui raconte son histoire : dès qu’il regarde par la fenêtre, c’est la mer qu’il voit. Quand il se réveille, il sait que c’est là-bas que son père est parti travailler : c’est un mineur. Sous la mer, il creuse pour trouver du charbon. La mer pour horizon au matin, juste devant le terrain de jeu. La mer comme repère sur la route de l’épicerie à laquelle sa mère lui demande de se rendre. La mer comme lieu de recueillement, aussi, pour se souvenir du grand-père qui repose non loin des embruns. La mer, enfin, quand vient le soir et que tout est calme avant de s’endormir, qui rythme le sommeil avec le flux et le reflux des vagues. Et toujours, dans la tête du petit garçon, « les tunnels sombres sous la terre », ces mines dans lesquelles des générations d’hommes vont travailler, de père en fils, apprivoisant la mer d’une autre manière…
Alternant des pages lumineuses où l’on peut voir le reflet scintillant du soleil sur la mer, et des doubles-pages sombres pour dire la mine et le charbon, l’illustrateur donne corps au texte délicat, évoquant à merveille cette mer qui a une place centrale dans la vie du village.
Une belle réussite que cet album, qui parle de transmission tout en évoquant la mer avec beaucoup de poésie.
Nina est une jeune écolière réservée et peu à l’aise pour parler en public. Aussi, lorsque la maîtresse annonce que les élèves devront réciter une poésie devant la classe le lendemain, Nina n’arrive pas à penser à autre chose. Et elle est persuadée qu’elle n’arrivera pas à s’exprimer devant ses camarades, elle qui rougit sans cesse. Usant de tous les stratagèmes pour louper l’école le jour de la récitation, elle sera tout de même amenée à devoir surmonter sa timidité et à aller vers les autres, à commencer par Adnan, un nouvel élève qui arrive de Syrie et qui a besoin d’être entouré pour se repérer dans sa nouvelle vie, après les épreuves qu’il a traversées en quittant son pays en guerre. Un atelier théâtre proposé par la maîtresse pourra peut-être aider l’un et l’autre à s’exprimer, ensemble.
La Vie en rouge est un court roman d’une grande subtilité, abordant à la fois le thème de la timidité, de la confiance en soi, et de la pratique artistique pour parvenir à libérer la parole.
Une jolie histoire qui prône la bienveillance, rehaussée par des illustrations douces.
D’ici, je vois la mer![]() ![]() Texte de Joanne Schwartz (traduit de l’anglais – Canada par Michèle Moreau), illustré par Sydney Smith Didier Jeunesse 16 €, 280×210 mm, 52 pages, imprimé en France chez un imprimeur écoresponsable, 2019. |
La Vie en rouge![]() Texte d’Anne Cortey, illustré par Vincent Bourgeau L’École des loisirs dans la collection Neuf 9,50 €, 210×140 mm, 74 pages, imprimé en France, 2019. |

« Un instant, un seul, lui fait déserter son corps : le temps des livres. Le corps de l’enfant qui lit n’est plus qu’un tas de vêtements qu’il a jetés n’importe où. Le livre est ouvert sur la moquette. Les vêtements glissent du lit ou font les pieds au mur. Il est en train de lire. […] Il n’y a plus personne dans la chambre. L’enfant est très loin de là, dans un corps plus ample, au milieu des vagues, loin de nous. » Timothée de Fombelle, Neverland.


