Comme l’année dernière, tous les mercredis de juillet et août nous vous proposons de découvrir un métier grâce à deux personnes qui font ce métier-là. Vous découvrirez ainsi ceux qui travaillent autour du livre pour enfants. Après auteur jeunesse, attaché de presse dans une maison d’édition jeunesse, traducteur de livres pour enfants, bibliothécaire jeunesse, éditeur jeunesse, blogueur jeunesse, libraire jeunesse et illustrateur jeunesse, cet été nous vous proposerons d’en savoir plus sur huit autres métiers : après les vendeurs/vendeuses de droits à l’étranger, les fabricant-e-s, les graphistes, les attaché-e-s à la promotion des auteurs, les maquettistes et les personnes qui nous parlent des livres à la radio, cette semaine nous nous intéressons aux programmateur-programmatrice d’un salon jeunesse. J’ai posé des questions à l’une d’entre elle (en espérant qu’une deuxième personne répondra bientôt également à ces questions), Sophie Gauthier de la Fête du livre de Merlieux. Bon mercredi à vous !
Dis c’est quoi ton métier… Sophie Gauthier
Comment définiriez-vous « Programmateur d’un salon de littérature jeunesse » ?
Pour moi un programmateur de salon de littérature jeunesse est la personne qui – en fonction du cahier des charges du Salon (ou de la Fête !) du livre (thématiques, dates, « esprit », demandes du public…) – dresse la liste des auteurs et illustrateurs à solliciter, prend les contacts, s’assure de leur disponibilité, organise leur planning durant la manifestation et contribue à la mise en place des animations… Le jour de la manifestation le programmateur accueille les auteurs-illustrateurs invités, veille à l’organisation harmonieuse des rencontres.
Quelle est la formation ou le parcours nécessaire pour l’exercer, quels ont été les vôtres ?
Très honnêtement je ne sais rien de la formation requise pour exercer ce métier ! Je suppose que des études de lettres seraient un bon préalable, suivies par une formation aux Métiers du Livre…
Quant à mon propre parcours, c’est avant tout celui d’une lectrice ! Je n’ai pas de formation spécifique pour la programmation.
En tant qu’enseignante d’école maternelle et formatrice à l’IUFM j’ai tenté de partager les richesses de la littérature jeunesse (je n’aime pas tellement cette dénomination !). La nécessité de trouver des textes accessibles à des niveaux de lecture et à des types de lecteurs différents m’a conduite à explorer le vaste champ des albums, romans… de littérature que l’on appelle « enfantine ».
Œuvrer pour la Fête du livre de Merlieux c’est dans la continuité des actions menées auprès des publics scolaires, étudiants, dans les classes… etc…
Est-ce que ce métier s’exerce à plein temps ? Avez-vous un autre métier à côté ?
Ce n’est pas mon métier ! Je participe en tant que bénévole à l’organisation de la Fête du livre de Merlieux, plus particulièrement aux activités de programmation (avec d’autres bénévoles). Je peux y consacrer beaucoup de temps car je suis retraitée. Si je devais travailler à côté… j’imagine que ce serait « rock’n roll » par rapport à ma disponibilité ! Les personnes de notre association qui exercent toujours un métier ne disposent pas de suffisamment de temps pour assurer le suivi de toutes les actions à mener pour la préparation et l’organisation de notre Fête.
Oui, décidément, pour moi c’est un métier qui doit s’exercer à plein temps !
Qui sont vos interlocuteurs ? Êtes-vous démarchée par des auteurs ? Des éditeurs ?
Dans le Pôle Littérature-Jeunesse nos interlocuteurs sont le plus souvent directement les auteurs et illustrateurs. Mais il ne faut pas oublier les écoles, les structures de l’Éducation Nationale et les « institutionnels », Communauté de Communes, Conseil Général, Conseil Régional, Mairie… les organismes qui financent !
Nous avons effectivement des demandes d’auteurs pour participer à notre fête du livre et quelquefois des demandes d’éditeurs.
Vous arrive-t-il de blacklister des gens ? (auteurs, illustrateurs, maisons d’éditions)
« Blacklister » le mot est peut-être un peu fort… mais nous opérons une sélection, oui.
Avez-vous une totale liberté sur le choix des invités ? Comment les choisissez-vous ?
Notre liberté n’est limitée que par les contraintes définies par le cahier des charges et le budget : équilibre entre le nombre d’auteurs et le nombre d’illustrateurs ; équilibre entre les différents âges (de la petite section de maternelle jusqu’à la 6ème) ; nombre d’invités à limiter (une dizaine en général) ; une diversité de travail, de genre, de style.
Notre premier critère de choix est la connaissance que nous avons de leur travail, en prenant en compte les contraintes définies ci-dessus. Et puis des éléments « indépendants de notre volonté » peuvent faire évoluer nos choix : la disponibilité des uns et des autres, leur envie de venir ou revenir à Merlieux, leur actualité éditoriale…
Où et comment travaillez-vous ? (Chez vous ? Dans des locaux ?)
Nous avons un local (la bibliothèque communale Régine Deforges de Merlieux). Je travaille autant chez moi que là-bas… mais à partir du 1er septembre je suis plus souvent à Merlieux !
Comment est calculée votre rémunération ?
Je suis bénévole comme tous les membres de notre association. Seuls les déplacements nécessités pour le transport des auteurs-illustrateurs d’une école à l’autre sont remboursés… en partie.
Quelles sont les idées reçues qui vous énervent sur votre métier ?
Il y a des idées reçues sur le métier de programmateur ? Et puis d’abord c’est un métier ça ?
Quels sont les plaisirs à l’exercer ?
Pfffff… Une quantité industrielle ! Les rencontres, le sentiment de contribuer à une dynamique, travailler au développement de la littérature, du livre et de la lecture, le fait d’apprendre tous les jours, les liens qui se créent et qui perdurent, les sourires des élèves qui rencontrent un auteur « en vrai », le partage du bonheur de la découverte d’albums que l’on aime, la satisfaction d’avoir fait vivre des moments extraordinaires aux publics, le plaisir de faire découvrir une fête du livre atypique aux auteurs et illustrateurs, les amitiés qui se tissent, la découverte des univers des auteurs et illustrateurs…. Liste non exhaustive !
Et quels sont les mauvais côtés ?
Le possible manque de réactivité de quelques interlocuteurs (absence de réponse des auteurs et illustrateurs sollicités mais il est vrai que cela arrive rarement en littérature-jeunesse c’est plus courant en littérature générale où nous avons surtout affaire aux agents)
C’est une activité extrêmement chronophage. Dès le mois de janvier il me semble être entièrement absorbée par la préparation de la fête du livre. A partir du mois de juin ce n’est plus une impression !
Mais le pire des mauvais côtés c’est sans doute notre impossibilité à contrôler la météo le jour de la manifestation !!!
Quelle est la spécificité du salon dont vous vous occupez ? Parlez nous de ce salon.
La toute première chose, c’est qu’à Merlieux il s’agit d’une Fête du livre et pas d’un Salon. Nous tenons beaucoup à cette dénomination à cause – bien sûr – du côté festif qui y est sous-entendu mais aussi parce qu’historiquement la Fête du livre avait lieu le jour de la fête communale. Encore aujourd’hui, il reste un manège pour les enfants près du pôle de littérature jeunesse.
Nos objectifs généraux : Mettre à l’honneur le livre et ceux qui les écrivent ou les illustrent. Développer et faire vivre la culture, la littérature et la lecture dans un milieu rural. Favoriser la rencontre entre les auteurs et les lecteurs. Valoriser et faire connaître les lieux de lecture publique.
Je crois qu’une des spécificités de la Fête du Livre de Merlieux c’est le décalage qui existe entre ce tout petit village (250 habitants) et l’importance de la manifestation, importance en nombre de visiteurs (en moyenne 8 à 9000), importance qualitative et quantitative des auteurs présents. C’est souvent entre quarante et cinquante auteurs qui se répartissent sur trois pôles : Littérature Générale et B.D., Littérature Jeunesse et Environnement.
Le même jour, une année sur deux, Merlieux accueille également le SLA (Salon du Livre Anarchiste) organisé par le Groupe Kropotkine.
C’est réellement une grande fête ! Avec des ateliers autour des métiers du livre (typogravure, papiers marbrés, calligraphie…), des animations (débats, musique, poésie, lectures, spectacle de rue…), une centaine d’exposants (éditeurs indépendants, auteurs, associations, bouquinistes, libraires…).
Une autre des spécificités de Merlieux c’est l’organisation « bicéphale » : la Communauté de communes et les institutionnels (conseil général, conseil régional…) qui sont les organismes financeurs et qui gèrent la logistique, les exposants et la communication et l’Association des Amis de la Fête du Livre qui s’occupe de la programmation, des interventions, d’une partie de la communication et de la mise en œuvre.
Nous essayons de faire vivre cette fête de la lecture toute l’année en intervenant au Centre pénitentiaire de Laon, dans les écoles, les lycées et collèges et les bibliothèques du territoire.
Par ailleurs la Semaine Jeunesse (qui précède le jour J) est organisée de façon à ce que les élèves de nombreuses classes rencontrent auteurs et illustrateurs et soient familiarisés avec leurs œuvres. Les auteurs et illustrateurs sont hébergés durant toute la semaine avec des repas pris en commun, des soirées de discussions et d’échanges… Tout cela favorise les rencontres, les liens… et les rires !
Bref « l’esprit de Merlieux » c’est la convivialité, la simplicité, la chaleur humaine et l’amour de toutes les littératures !
Le site de La fête du livre de Merlieux : http://www.fete-du-livre-merlieux.fr
Cette année la fête aura lieu le 29 septembre et recevra, entre autres, Jeanne Ashbé, Gilles Bachelet, Benoît Broyart, Valérie Dumas.
Dis c’est quoi ton métier… l’équipe organisatrice du Salon du livre jeunesse de l’Océan Indien
Comment définiriez-vous « Programmateur d’un salon de littérature jeunesse » ?
Tout d’abord, le terme programmateur n’est pas celui que nous utilisons. Nous parlons plutôt d’organisateur d’un Salon jeunesse. La tâche est vaste :
- faire des dossiers de subventions,
- établir un choix d’auteurs (auteurs métropolitains et locaux), les contacter, organiser le déplacement aérien et sur place, l’hébergement des écrivains de métropole et de la zone Océan Indien
- mettre en place différents concours en lien avec notre manifestation (prix littéraires, concours pour l’affiche du Salon),
- communiquer (médias divers),
- travailler avec le rectorat pour l’inscription des établissements à la manifestation,
- organiser un comité de pilotage trimestriel qui regroupe les partenaires institutionnels, les libraires, les éditeurs et les associations qui œuvrent en direction de la lecture,
- rédiger des dossiers de presse,
- mettre en place de formations en direction des professionnels du livre et des enseignants,
- établir les quelques 300 plannings de rencontres classe/auteur, classe/atelier, classe/spectacle
Quelle est la formation ou le parcours nécessaire pour l’exercer, quels ont été les vôtres ?
Difficile de répondre à cette question, nous sommes une équipe de 7 personnes, toutes enseignantes documentalistes. Nous n’avons pas de formation spécifique et ce qui nous réunit et nous fait avancer, c’est la passion pour la littérature de jeunesse.
Est-ce que ce métier s’exerce à plein temps ? Avez-vous un autre métier à côté ?
En ce qui nous concerne, ce n’est pas du tout un métier, nous sommes toutes bénévoles et nous préparons cet événement les mercredis, samedis et dimanches. Excepté l’une d’entre nous qui est à la retraite anticipée, tous les membres de l’équipe sont en poste dans des CDI de collège et de lycée. Mais la masse de travail est énorme et pourrait nécessiter un emploi à temps complet.
Qui sont vos interlocuteurs ? Êtes-vous démarché par des auteurs ? Des éditeurs ?
Il y a bien sûr les institutionnels, nos financeurs : mairie, Région, Département, DAC OI (équivalent de la DRAC), Communauté de communes, l’Académie, et différents organismes. Puis les éditeurs et les libraires. Nous sommes contactés régulièrement par des auteurs et des éditeurs, il faut dire que la destination Réunion attire et notre Salon commence à être connu et reconnu pour sa qualité…
Vous arrive-t-il de blacklister des gens ? (auteurs, illustrateurs, maisons d’édition)
Notre Salon fait partie de la fédération des Salons et fêtes du livre jeunesse et au sein de la fédération nous échangeons conseils et avis sur des choix d’auteurs.
Avez-vous une totale liberté sur le choix des invités ? Comment les choisissez-vous ?
Oui, nous invitons des auteurs de notre choix en respectant bien sûr un certain équilibre : entre illustrateurs et écrivains, en fonction du public (de la petite enfance à l’adolescence), mais nous veillons également à la répartition éditoriale.
Nous invitons une quinzaine d’auteurs de métropole, quelques auteurs de l’Océan Indien (Maurice, Les Comores, Mayotte, Madagascar) et tous les auteurs jeunesse de La Réunion qui souhaitent participer au Salon.
Nous allons chaque année au Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil, et là nous rencontrons des auteurs que nous connaissons, mais c’est l’occasion aussi de découvertes.
Est-ce que c’est facile de faire venir les auteurs dans un salon aussi loin de la métropole ?
C’est tout d’abord un coût élevé donc nous devons nous assurer de bien avoir les subventions attendues ; trouver des auteurs qui veulent venir sur notre île ne pose aucun problème même si certains refusent par crainte de l’avion ou de la chaleur. Le plus gros souci est le transport aérien et toute la logistique à mettre en place pour les recevoir le mieux possible, car ils restent une semaine.
Où et comment travaillez-vous ? (Chez vous ? Dans des locaux ?)
Nous n’avons pas de locaux spécifiques malheureusement et nous travaillons chez les unes et les autres. À l’approche du Salon, chez certaines, c’est un vrai chantier…
Comment est calculée votre rémunération ?
Nous ne sommes pas rémunérées, nous sommes toutes bénévoles. Par contre, quand 2 ou 3 d’entre nous vont à Montreuil en décembre, tout est pris en charge par l’association. Le rectorat de La Réunion nous accorde quelques heures supplémentaires (mais bien sûr pas à celle qui est à la retraite)
Quelles sont les idées reçues qui vous énervent sur votre métier ?
Comme je le disais précédemment, ce n‘est pas notre métier et pour ce qui nous concerne, il y a peu ou pas d’idées reçues véhiculées sur l’île, ou ce n’est pas arrivé jusqu’à nous…
Quels sont les plaisirs à l’exercer ?
Première chose, l’aventure collective, la liberté de mettre en place cette manifestation avec nos envies, nos priorités et la possibilité d’innover et d’évoluer sans cesse. Le plaisir de voir les foules d’élèves, d’enseignants, le public en général venir à notre manifestation et en être satisfaits… et la richesse des rencontres et échanges avec les auteurs.
Et quels sont les mauvais côtés ?
Peut-être le stress qui peut être très important à l’approche du Salon, les remarques désagréables non justifiées, les annulations de dernière minute, devoir relancer régulièrement certaines personnes, faire la course aux subventions et devoir expliquer et re-expliquer les mêmes choses… Parfois aussi la non-reconnaissance de cet immense travail de la part de notre hiérarchie.
Quelles sont les spécificités de votre salon ?
La première spécificité c’est d’être l’unique Salon jeunesse sur l’île, ensuite, le nombre important et la qualité de préparation des rencontres auteurs/classes et l’accueil des scolaires qui viennent de toute l’île. Ainsi, ce Salon n’est pas seulement un temps de regroupement des professionnels de la chaîne du livre (auteurs, éditeurs, libraires…), mais aussi et surtout un temps de travail sur les livres avec pour aboutissement la rencontre de l’auteur dont les élèves ont étudié le livre en amont. Autre spécificité : un Salon organisé entièrement par des non-professionnels, des bénévoles dont ce n’est pas le métier. Enfin ce Salon permet à tous les auteurs jeunesse de l’île de faire connaître leur travail.
Le site de d’ADBEN et la page facebook du salon du livre jeunesse de l’Océan Indien.
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
Pour une fois c’est un métier que je connais assez bien.
Je comprends très bien toutes les difficultés liées au cahier des charges, et la frustration que ça engendre.
Je vis ça un peu de loin toutefois car c’est aussi les bénévoles retraitées qui gèrent tout ça. Malgré tout je vois bien à quel point c’est difficile de tout gérer.
Moi je me contente de suggérer des noms de personnes à inviter (le bon rôle lol).