Aujourd’hui, nous recevons l’autrice Laure Dargelos qui va nous parler de ses romans. Ensuite, c’est l’autrice Eléonore Devillepoix qui est l’invitée de la rubrique Quand je crée.
L’interview du mercredi : Laure Dargelos
Parlez-nous des Oubliés d’Astrelune, votre dernier roman.
Les Oubliés d’Astrelune est un roman de fantasy YA. L’histoire se déroule dans une étrange cité, caractérisée par de nombreux éléments insolites : des dirigeables qui côtoient des tapis volants, des ingénieurs déclenchant la pluie ou le beau temps ou encore des habitants qui se promènent en pyjama. Nous suivons une jeune femme du nom d’Holly Nightingale. Celle-ci mène une existence routinière jusqu’au jour où sa sœur cadette disparaît. Pour la retrouver, Holly va devoir mener l’enquête et percer les secrets d’Astrelune.
Pouvez-vous également nous dire quelques mots sur vos deux romans précédents, La Voleuse des toits et Prospérine Virgule-Point ?
La Voleuse des toits et Prospérine Virgule-Point appartiennent également au genre de la fantasy. La Voleuse des toits est une dystopie dont l’héroïne, une jeune aristocrate, lutte pour la liberté dans une société ayant prohibé l’art, la littérature et la musique. Prospérine Virgule-Point est un cozy mystery se déroulant dans le monde des mots. Prospérine tente de sauver son village bâti à l’intérieur même d’un manuscrit inachevé.
Dans Prospérine Virgule-Point, qui a d’ailleurs remporté le Grand Prix de l’Imaginaire 2022 dans la catégorie Roman Jeunesse Francophone, vous avez créé tout un univers autour des mots et de la langue française. D’où vous est venue l’idée ?
Lorsque j’ai eu l’idée de Prospérine Virgule-Point, je travaillais dans une maison d’édition. C’est en corrigeant un texte que j’ai imaginé une drôle de demoiselle qui vivrait à l’intérieur d’un roman. J’ai eu envie de jouer avec la typographie, de donner à mes personnages une façon bien à eux de s’exprimer (par exemple, les habitants de la Capitale qui parlent en lettres majuscules). Le but était de jouer avec les mots et la langue française !
Savez-vous à l’avance comment vont se terminer vos histoires ?
Oui, quand je débute une histoire, j’ai toujours un plan en tête avec les éléments principaux et la fin du récit. Mais j’aime garder une certaine liberté dans la rédaction en laissant mes personnages faire des choix qui n’étaient pas prévus initialement.
Vos romans sont tous très différents. Où trouvez-vous votre inspiration ?
L’inspiration se trouve partout : en observant un paysage, dans un rêve ou en écoutant une musique. Mes idées de romans jaillissent le plus souvent quand je ne pense pas à l’écriture.
Aimeriez-vous écrire dans un autre genre que la fantasy ?
La fantasy est mon genre de prédilection. Je trouve qu’elle offre une grande liberté dans la création d’univers et de personnages. Pour le moment, je n’envisage pas d’écrire dans un autre genre.
Depuis quand écrivez-vous ? Est-ce une passion qui vous anime depuis toute petite ou est-elle venue plus tardivement ?
J’ai commencé à inventer des histoires avant de savoir tenir un stylo. Quand j’avais 4 ou 5 ans, je dessinais des histoires dans un cahier. Puis, lorsque j’ai appris à écrire, j’ai continué avec des petits textes. J’ai toujours éprouvé le besoin d’extérioriser les récits qui se bousculaient dans ma tête.
Qui ont été vos premier⸳ères lecteur⸳rices ?
Ma sœur jumelle ! Elle est toujours la première à lire mes manuscrits.
Que lisiez-vous quand vous étiez enfant et adolescente ?
Enfant, je lisais Le Club des Cinq d’Enid Blyton, la série Fantômette de Georges Chaulet puis, à l’adolescence, j’ai découvert le roman policier avec Agatha Christie, les Sherlock Holmes de Sir Arthur Conan Doyle et les aventures d’Arsène Lupin de Maurice Leblanc.
Et que lisez-vous en ce moment ? Un coup de cœur à nous partager ?
En ce moment, je lis Le Club des amateurs de romans policiers de C.A. Larmer. Mon dernier coup de cœur est Yumi et le peintre de cauchemars de Brandon Sanderson.
Avez-vous des projets à venir ? Si oui, pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
Oui, je travaille sur un nouveau projet de fantasy YA. Le héros est un jeune violoniste, prisonnier du monde des rêves. Il tente de s’échapper pour regagner sa réalité.
Bibliographie :
- Les Oubliés d’Astrelune, roman, Explora Éditions (2021).
- Prospérine Virgule-Point et la phrase sans fin, roman, Rivka (2021), que nous avons chroniqué ici.
- La Voleuse des toits, roman, Rivka (2019).
Retrouvez Laure Dargelos sur Instagram.
Quand je crée… Éléonore Devillepoix
Le processus de création est quelque chose d’étrange pour celles et ceux qui ne sont pas créateur·trices eux·elles-mêmes. Comment viennent les idées ? Est-ce que les auteur·trices peuvent écrire dans le métro ? Les illustrateur·trices, dessiner dans leur salon devant la télé ? Peut-on créer avec des enfants qui courent à côté ? Faut-il de la musique ou du silence complet ? Régulièrement, nous demandons à des auteur·trices et/ou illustrateur·trices que nous aimons de nous parler de comment et où ils·elles créent. Cette semaine, c’est Éléonore Devillepoix qui nous parle de quand elle crée.
La mare aux mots m’a demandé de décrire ma routine d’écriture. Cette question me fait toujours un peu paniquer quand on me la pose, car je n’ai pas de routine. Alors je me suis dit que j’allais simplement raconter le processus d’écriture de mes trois romans publiés : La ville sans vent, tomes 1 et 2, et Brussailes.
La ville sans vent, tome 1 :
J’ai composé ce petit pavé avec acharnement et anarchie, entre l’âge de 21 ans et 26 ans. C’est-à-dire que j’écrivais par à-coups, quand l’envie me prenait, souvent en vacances, et que j’avais à l’époque peu de scrupules à laisser le manuscrit végéter dans son dossier numérique pendant six mois. En revanche, je mettais un point d’honneur à toujours y revenir, rapport à mon ambition alors increvable de finir par en faire un bestseller. Les premières pages ont été tapées dans la bibliothèque du campus américain où j’ai passé l’été de mes 21 ans, grâce à une bourse universitaire. Une splendide library, lumineuse et confortable, qui donnait sur le lac Michigan, mais qui se trouvait être en concurrence directe avec les divertissements que Chicago avait à offrir. Résultat, je suis repartie de la ville du vent sans avoir bouclé le premier chapitre de la ville sans vent. Le fichier Word m’a ensuite accompagnée d’ordinateur en ordinateur, de licence en master, d’Erasmus en stages, de Paris à Munich, de Londres à Bruxelles, avec un rythme de rédaction en dents de scie. J’ai écrit le dernier tiers en catimini, sur mes heures de travail. J’avais alors décroché un premier emploi assez vide de sens et de contenu, où il me suffisait d’avoir l’air concentrée derrière un écran de 9 h 30 à 18 h pour satisfaire mon boss. Il a été très satisfait de mon travail.
La ville sans vent, tome 2 :
Pour l’écriture du deuxième tome, j’ai dû dire adieu à ce bienheureux dilettantisme. En signant le contrat d’édition du premier tome, la maison d’édition m’avait en effet laissé neuf mois pour sortir le second. Or, je n’avais pas l’ombre d’un plan, et mon nouveau travail ne me permettait plus d’avancer à l’envi sur mes projets littéraires au bureau. Il a donc fallu écrire ce second tome avec méthode et régularité pour réussir à respecter l’échéance. Comme je m’étais jusqu’alors bien gardée de faire entrer ces deux mots dans la nébuleuse de ceux qui décrivent ma personnalité, j’ai dû me faire violence. J’écrivais une heure le matin dans mon lit avant d’aller au boulot. Deux heures en rentrant le soir. Le week-end, après le sport. Si des amis me proposaient de sortir, je m’échappais de la soirée avant minuit pour ne pas être trop fatiguée le lendemain face à mon écran. Je n’ai pour ainsi dire pas eu de vie sociale pendant six mois. J’ai terminé le manuscrit en février 2020, réjouie à l’idée d’enfin sortir de ce tunnel rédactionnel morose pour regagner la société. Quelques jours plus tard, on annonçait le confinement.
Brussailes :
Mon petit Brussailes a été de loin le roman le plus facile à accoucher, parce qu’il est court et drôle, et parce qu’en l’écrivant je n’avais d’autre objectif que de me prouver que j’étais capable de sortir des sentiers battus de la fantasy jeunesse classique. Et puis, je l’ai écrit dans des endroits confortables : le canapé de mes parents en Normandie, les fauteuils des TGV que je prenais pour aller à tel ou tel festival littéraire, la maison de mon amie de plume bretonne Bleuenn Guillou, et surtout la méridienne de mon appartement bruxellois, où j’abandonnais régulièrement mon clavier pour piquer une sieste express. Les jacasseries des perruches qui passaient dans le jardin de mes voisins me servaient de musique. Le moindre pigeon croisé dans la rue venait donner du relief à Jaboterne, mon personnage principal. J’observais longuement les corneilles du Parc Léopold lors des pauses déjeuner pour reproduire par écrit leurs déplacements souples et calculés. J’eus ainsi l’impression d’être ornithologue pendant quelques mois. Une chouette période, quand j’y repense.
Et maintenant ? Maintenant, j’espère me construire enfin cette fameuse routine d’écriture qui me fait défaut. Sans surprise, ce serait quelque chose à base de temps, thé, calme, fauteuil ergonomique, musique instrumentale. Et pour compléter ce tableau on-ne-peut-plus classique de l’écrivaine trentenaire sans enfant, je vois bien une future compagnie féline venir s’installer sur mes genoux.
Eléonore Devillepoix est une autrice pour l’édition jeunesse. Son dernier livre, Brussailes, est sorti en 2022 chez Hachette Roman.
Bibliographie
- Brussailes, roman, Hachette Romans (2022), que nous avons chroniqué ici.
- La Ville sans vent t.2, roman, Hachette Romans (2020).
- La Ville sans vent t.1, roman, Hachette Romans (2020).
Retrouvez Éléonore Devillepoix sur Instagram.
Passionnée de lecture depuis toujours, j’adore découvrir de nouvelles histoires et de nouveaux univers. J’aime échanger autour de ma passion, parler pendant des heures du dernier roman que j’ai lu, réarranger sans cesse ma bibliothèque et me balader en brocante à la recherche de petites pépites.