Charlotte Moundlic est une auteure dont les ouvrages me bluffent régulièrement. Parce qu’elle écrit des histoires qui touchent et parce qu’elle les écrit particulièrement bien. Loin d’être une faiseuse de livres sur des thématiques, elle aborde des sujets forts, mais pour l’histoire, pas pour traiter absolument les sujets. J’ai l’occasion d’échanger régulièrement avec elle, c’est quelqu’un de passionnant et j’avais envie qu’on parle ensemble de son travail, d’elle, de sa vision des choses. Je suis ravi de vous proposer aujourd’hui de lire notre échange. Jean Pichinoty, quant à lui, est un libraire que je n’ai jamais rencontré, mais quand je me passe sur la page Facebook ou le blog de sa librairie, La soupe de l’espace, je suis toujours ravi de ce que j’y découvre. Les livres qui y sont présentés, mais surtout les prises de position, l’engagement de ce libraire. Il est l’invité du Coup de cœur/coup de gueule. Deux personnalités fortes, deux personnes qui comptent dans la littérature jeunesse, à des stades différents de la chaîne du livre. Bon mercredi à vous !
L’interview du mercredi : Charlotte Moundlic
Quand avez-vous commencé à écrire ?
J’ai commencé à écrire un peu par hasard. En fait, c’est une éditrice avec laquelle je travaillais chez Flammarion, Catherine Zelvelder, qui m’a proposé d’écrire un texte. Elle m’a proposé de faire un synopsis pour une histoire. On travaillait sur des livres un peu particuliers dans lesquels on insérait des objets. Il fallait une histoire en lien avec l’objet et on avait reçu plusieurs essais qui ne lui convenaient pas à cause de cette contrainte-là et du coup moi j’avais quelques idées, j’en ai parlé avec elle. Elle m’a dit « écoute, essaye de m’écrire une trame d’histoire » et puis après « ben développe la trame » puis « ben ajoute des dialogues » puis enfin « ben je vais le publier ! ». Je ne savais pas du tout que je continuerais après, ça a été un concours de circonstances et voilà. Ça s’est fait comme ça, ça a commencé comme ça.
Quand est-ce que vous y avez pris goût alors ?
Euh… je me suis beaucoup amusée à le faire… c’est après, mais assez vite après en fait que l’histoire de La croûte m’est tombée dessus puisqu’on peut dire ça comme ça. Cette histoire m’est véritablement tombée dessus et il y avait comme un besoin, une urgence à l’écrire, je ne savais pas ce que j’allais en faire, mais, elle est sortie d’un coup, comme ça, après plusieurs événements, mais du coup… c’est parti comme ça !
La croûte c’est le premier album « personnel » ?
Oui, c’est le premier texte personnel que j’ai écrit. Ce n’est pas le premier qui est paru, mais c’est le premier texte vraiment personnel que j’ai écrit.
Ce n’est pas le premier qui est paru parce…
Pour des histoires d’agenda en fait
Pas parce qu’il avait été refusé par des éditeurs ?
Non non il n’a pas été refusé, il a été pris tout de suite.
Quelles étaient vos lectures d’enfant, d’adolescente ?
TOUT ! Je lisais tout. Je lisais la presse jeunesse. Moi j’ai eu la chance d’être abonnée au premier J’aime Lire et aux premiers Astrapi. J’ai eu les numéros zéro ! Je ne sais plus pourquoi… parce que ma mère qui était instit avait une de ses copines qui bossait pour Bayard et du coup il fallait tester et j’ai eu les numéros zéro… Du plus loin que remontent mes souvenirs, j’ai toujours lu.
Certains de vos livres peuvent déranger (je pense à La croûte dont on parlait précédemment, Les invités ou récemment Je suis le fruit de leur amour), est-ce que vous sentez en écrivant ce genre de texte que ce sont des sujets sensibles ou est-ce totalement inconscient ? Vous aimez provoquer ?
Non, c’est jamais ce qui déclenche l’envie d’écrire ces textes-là. C’est marrant parce que ces trois textes ont un point commun que j’ai réalisé assez récemment. C’est-à-dire qu’ils viennent tous d’une conversation avec des adultes qui m’a choquée à un moment. En ce qui concerne La croûte j’ai assisté à un colloque à Toulouse (j’étais dans le public), un truc super sérieux sur la lecture des enfants et notamment sur les sujets dits délicats et une dame bardée de diplômes, très aguerrie en psychologie, spécialisée sur l’enfance avec des diplômes longs comme le bras expliquait sur scène qu’en parlant de la mort aux enfants, il fallait choisir ses mots, et que notamment c’était très bien de dire « il est parti » au lieu de « il est mort » et moi c’est quelque chose qui m’a toujours beaucoup choquée parce que « il est parti » pour moi ça veut dire « il va revenir ». Et s’il est parti et qu’il ne revient pas il me semble que c’est source d’une souffrance inouïe pour un enfant. Ça, c’est un point de vue très personnel. Sur le moment, ça m’a super énervée, je n’ai pas compris pourquoi ça m’avait autant énervée, mais vraiment mise en colère. Et en fait, quelques années auparavant, dans mon entourage proche une mère de famille était morte et j’ai accompagné ces enfants-là les premiers mois qui ont suivi la perte de cette mère, les enfants avaient 10, 7 et 18 mois, leur père était totalement anéantis, incapable de faire quoi que ce soit, et les enfants portaient cette maison, à bout de bras, en parlant de leur mère joyeusement, en colère certes, mais en tout cas ils passaient leur temps à raconter des anecdotes, à s’arrêter et à se regarder « maman… tu te souviens ? Tu te souviens de qui c’est ? », Je leur disais « bien oui, bien sûr » et donc je me suis souvenue de ces enfants-là, à qui on avait tout dit, tout raconté. Je détestais cette idée que ça ne les concerne pas et qu’il faut les protéger. Or de mon point de vue, quand un deuil comme ça, surtout celui de sa mère arrive dans une famille, l’enfant est autant « concerné », ça lui arrive à lui aussi, ça fera partie de sa vie. Et en fait, c’est cette histoire-là que je voulais raconter. C’était cette idée que l’idée de protéger les enfants ça ne veut pas dire de leur dissimuler des choses. Et ensuite, c’est de les accompagner dans les moments difficiles, mais en tout cas je pars du principe qu’il faut dire les choses telles qu’elles sont. C’est mon point de vue d’adulte avant et de parent depuis. Jusque là ça… enfin, ça fonctionne, j’en sais rien, mais en tout cas je ne me sens pas de ne pas raconter ou de ne pas dire les choses.
En ce qui concerne Les invités, ma fille est rentrée un jour de l’école en disant, en gros, les Indiens sont vraiment des ordures et ils ont tué tous les cowboys. Elle était toute petite, donc je lui ai dit que ce n’est pas exactement comme ça que ça s’est passé et j’ai commencé à lui raconter l’histoire de cette maison dans laquelle des gens arrivent, s’installent et puis… Pour moi l’idée c’était de raconter la colonisation avant tout dans une forme naïve, je ne suis pas du tout historienne. Et puis au-delà de ça, raconter la loi du plus fort qui est celle qu’on trouve dans toutes les cours de récréation, de raconter le pillage, l’abus de pouvoir, la suprématie, la domination et de faire réfléchir les enfants là-dessus, c’est-à-dire qu’est-ce qui fait qu’à un moment on adhère à un principe qui est celui d’aller torturer d’autres gens pour les piller, pour les voler, ce qui fait qu’à un moment un groupe devient un cerveau unique et pas une combinaison de plusieurs cerveaux qui pourraient s’équilibrer les uns les autres. Et c’est un texte qui a choqué les adultes, mais dans toutes les classes dans lesquelles je suis allée, ça a été du CE1 à la 3e, j’ai eu des conversations absolument incroyables avec tous les enfants et tous les jeunes adolescents que j’ai rencontrés qui ont très bien compris le sujet de l’histoire.
Et le dernier, Je suis le fruit de leur amour, qui est sorti récemment ?
Je pense que tous à un moment on a eu le sentiment qu’on n’était pas aimé, qu’on était mal aimés. Y’a un moment où l’on en a voulu à mort à nos parents, où on les a détestés et c’est cette idée que… On a le droit quoi ! On est autorisé à un moment à ne pas aimer. Et alors un adulte que j’ai rencontré m’a dit « ça n’existe pas des parents qui n’aiment pas leurs enfants » et là je me suis dit, mais dans quel… enfin, voilà, je ne suis pas d’accord avec ça. Voilà, c’est parti de là aussi, d’une colère et puis de cette solitude de l’enfance où les… je voudrais qu’on considère que les enfants sont très intelligents et qu’ils peuvent réfléchir sur plein de choses, c’est pas un bout de leurs parents
Oui, pas une extension
Ah non certainement pas ! Ils sont libres de penser et ils ont le droit et surtout qu’ils s’autorisent à un moment à… Je suis souvent frappée par les enfants qui, quand on vient de les engueuler, reviennent et te disent en gros « ahhhh je… »… Ma fille un jour quand elle était petite s’approche de moi et me dit, je venais de l’engueuler, je ne sais plus pourquoi, enfin bref, et elle me dit « maman t’es belle, t’es belle… » et je sentais que dans le fond elle avait envie de me dire qu’elle m’en voulait à mort et la conclusion de tout ça a été « … mais c’est dommage que tu sois pas très sympa » et elle est partie et j’ai trouvé ça super et je lui ai dit « tu as le droit de me le dire, on a le droit de ne pas être d’accord, on a le droit de… » voilà. Et cette idée qu’il y’a des parents qui n’aiment pas leurs enfants ou qui les aiment mal c’est plutôt parce que l’idée d’aimer ou ne pas aimer ça reste très compliqué à… y’a pas de dogme ou de règle en la matière, mais ensuite je pense que chacun à moment peut se sentir mal aimé et donc pas aimé et on a le droit de le dire et d’en parler
Mais je pense que, comme pour La croûte où vous m’aviez dit que vous aviez eu parfois des réactions un peu violentes des lecteurs…
Alors pas des lecteurs ! Des adultes ! Les parents des lecteurs !
Je pense que pour ces deux livres-là, ça choque les parents. Pour La croûte, car on pense à notre propre mort, on se projette dans l’histoire.
Non, mais bien sûr ! Pour les mères… moi beaucoup de mères de mon entourage, des amies, des gens proches… pour elles c’est INSUPPORTABLE. Et sur un salon, une femme m’a dit « pour écrire des horreurs pareilles vous ne pouvez pas avoir d’enfant »… Bon, j’ai deux enfants, ils étaient nés à l’époque en plus. Mais je ne considère pas que parler de la mort et du deuil ce soit horrible.
C’est important même
C’est HYPER important. Et en fait on peut parler… dans la littérature enfantine on peut parler du hamster, on peut parler du grand-père, mais de la mère et du père… et alors la mort d’un enfant… on est toujours obligé de passer par des ellipses… moi j’avais besoin de quelque chose d’un peu cru, d’un peu… parce que je pense que les enfants ont besoin de réponses aussi un peu concrètes. Qu’est-ce qui se passe une fois que les gens sont morts, qu’est ce qu’on va faire du corps, on va les mettre dans la terre, on va les mettre… mais ils ne reviendront pas… ils ont besoin qu’on leur réponde précisément sur des choses qu’ils considèrent au quotidien, ils ne se projettent pas dans l’avenir, c’est ce qui fait la grande différence. C’est-à-dire que les parents ils se projettent sur qu’est ce que va être sa vie future sans sa mère, c’est horrible ce qui lui arrive. L’enfant je pense que… d’abord tous les enfants que j’ai rencontrés pour eux c’est très clair que c’est l’histoire de cet enfant, c’est l’histoire très triste de cet enfant-là, mais c’est les parents qui se projettent, pas les enfants.
Quel est votre regard justement sur la littérature jeunesse actuelle ?
Je trouve que, en France en tout cas, on a une liberté, de plus en plus.
Oui, la liberté est là, mais est-ce que les gens la prennent ?
Alors je pense que c’est pas tant que les textes n’existent pas… mais en fait ça dépend des lecteurs. Est-ce que les lecteurs sont prêts ou pas à recevoir ce type de narration ensuite ça c’est vraiment… chacun réagit comme il peut, comme il est, avec son histoire. Avec… Moi je… Voilà, un livre on peut ne pas l’ouvrir, on peut ne pas le lire et c’est aussi une liberté… j’ai pas d’avis là-dessus quoi… Je pense qu’on a une grande grande richesse et une grande offre dans laquelle au final chacun peut peut-être aussi trouver ce qui lui parle et ce qui fait sens pour lui. Je ne prétends pas donner des modes d’emploi sur la manière de gérer les maux.
Quelques mots sur votre collaboration avec Olivier Tallec ? Aurons-nous des nouvelles de Michel ?
Olivier Tallec, je lui ai fait lire La croûte, parce que c’est un ami et j’adore son travail, au départ pour lui demander si, de son point de vue, c’était illustrable. Je n’en étais pas du tout certaine. Le texte n’avait pas été du tout proposé aux éditeurs. C’était vraiment… voilà… je voulais avoir… Comme c’est un garçon sensible et intelligent et extrêmement doué et qui arrive à faire passer beaucoup d’émotion dans ses images… il est typiquement quelqu’un qui pourrait le mettre en image et est-ce que lui pense que c’est jouable ? Il l’a lu et il m’a dit « ah… pas facile comme exercice, mais oui je pense que c’est tout à fait faisable ». Et ensuite quand le texte a été accepté, je lui ai dit ben le texte est pris chez un éditeur et en même temps j’osais pas trop je me disais il va croire que si je lui ai posé la question avant c’était avec une idée derrière la tête ce qui n’était pas le cas et quand je lui ai dit « mais tu te sentirais de le faire » il m’a répondu « j’aurai été super vexé si tu ne me l’avais pas proposé » et donc ça a été le début de cette collaboration à la suite de quoi on a discuté après La croûte voilà on s’est dit qu’on avait envie de continuer à faire des livres ensemble et puis je lui ai parlé de Michel… En fait, je lui ai parlé de mes souvenirs de vacances avec mes cousins et puis lui a commencé à me raconter les siens et après j’ai écrit Le slip de bain et donc on s’est… l’idée c’était pas d’en faire une série, hein ! Mais on s’est vachement attaché à ce personnage et ensuite… suite à une conversation où un adulte m’a déclaré que les enfants ne tombaient pas amoureux, j’ai donc écrit Mon cœur en miette. Et en fait au départ Mon cœur en miette j’avais mis une narratrice, mais ça ne marchait pas du tout, cette histoire ne marchait pas du tout et tout à coup je me suis dit, mais… c’est une histoire pour Michel, quoi. Et donc c’est comme ça que Michel a fait son come-back et ensuite il y a eu cette histoire de La boum… donc des nouvelles de Michel pour le moment je n’en ai pas… Mais on ne sait jamais, Michel est toujours tapi dans l’ombre, prêt à surgir quand une histoire apparaît. Ce sera du sur mesure de toute façon c’est-à-dire qu’on n’ira pas plaquer sur ce personnage des histoires si on n’a rien à lui faire vivre. À chaque fois, ça a été… voilà… ça a été parce qu’on avait envie de faire revenir Michel que voilà… nous verrons !
D’autres projets ?
Comme j’ai changé de travail j’ai eu quand même beaucoup moins de temps et surtout de disponibilité de l’esprit plus que de temps matériel, mais… et là, ça me titille, ça me titille donc j’ai publié une nouvelle pour adultes et là je… je sens que cet été va me faire revenir à l’écrit parce que ça commence à me démanger
Une nouvelle pour adulte, c’est quoi ? Chez qui ?
C’est une nouvelle qui n’est parue qu’en numérique, on pouvait la charger dans les autobus ! Dans les autobus c’était un temps de lecture. C’était une commande, je me suis beaucoup amusé et donc pour le moment elle n’existe pas sur papier. Une histoire de taxi.
Bibliographie sélective :
- Je suis le fruit de leur amour, roman, Thierry Magnier (2015), que nous avons chroniqué ici.
- Le papa de Simon, album d’après Maupassant illustré par François Roca, Milan (2014), que nous avons chroniqué ici.
- La boum ou la plus mauvaise idée de ma vie, album illustré par Olivier Tallec, Père Castor (2014), que nous avons chroniqué ici.
- Série Chamalo, albums illustrés par Marion Billet, Père Castor (2010-2013), que nous avons chroniqué ici, là et ici.
- Mon cœur en miette, album illustré par Olivier Tallec, Père Castor (2012), que nous avons chroniqué ici.
- Les invités, roman, Thierry Magnier (2012), que nous avons chroniqué ici.
- Le slip de bain, ou les pires vacances de ma vie, album illustré par Olivier Tallec, Père Castor (2011), que nous avons chroniqué ici.
- Je veux des lunettes !, album illustré par Véronique Deiss, Albin Michel Jeunesse (2010), que nous avons chroniqué ici.
- La croûte, roman, Thierry Magnier (2009), que nous avons chroniqué ici.
Le coup de cœur et le coup de gueule de… Jean Pichinoty
Régulièrement, un acteur de l’édition jeunesse (auteur, illustrateur, éditeur…) nous parle de deux choses qui lui tiennent à cœur. Une chose qui l’a touché, ému ou qui lui a tout simplement plu et sur laquelle il veut mettre un coup de projecteur, et au contraire quelque chose qui l’a énervé. Cette semaine, c’est Jean Pichinoty, libraire de La soupe de l’espace qui nous livre son coup de cœur et son coup de gueule.
Ainsi donc, je dois me plier à ce douloureux exercice du coup de cœur/coup de gueule.
Bon, les gens qui me connaissent savent à quel point je peux être prolixe en la matière, mais ils se trompent ! Je suis très vigilant à ne pas passer pour un révolutionnaire accompli, surtout quand on me le demande ^^
Loin de moi d’ailleurs l’envie de « plomber l’ambiance », d’en rajouter à la sinistrose ambiante déjà bien galopante, mais je dois avouer qu’il se passe en ce moment dans le monde de l’édition un certain nombre de choses qui méritent qu’on en parle, à défaut d’en hurler.
Récemment, nous avons pu apprendre un certain nombre d’informations qui à mon sens continuent d’ébranler tranquillement ce petit monde du livre.
– ça a commencé avec la vente et la fermeture programmée de la librairie « La Hune » à Paris. Antoine Gallimard (ou son armée de gestionnaires financiers) a donc pris la décision de vendre à un groupe multimilliardaire cette mythique librairie, pour de sombres raisons comptables (les mêmes raisons comptables qui avaient poussé Antoine Gallimard a déplacer la même librairie il y a 3 ans pour ne pas voir mourir ce symbole du Quartier Latin ?).
– Et puis nous avons appris la cession de Volumen (groupe de diffusion/distribution) à Interforum, pour 1 euro symbolique. Au-delà de la désastreuse nouvelle pour les gens qui travaillent chez Volumen et des conséquences économiques pour les libraires, les gens pourront apprécier la formidable ironie de cet euro symbolique.
– Et puis enfin, on a pu apprendre que Bayard quittait le groupe de la Sofedis pour rejoindre un autre groupe, Hachette. Ce que personne n’a dit d’ailleurs, c’est qu’Hachette a dû mettre 8 millions d’euros sur la table, pour dénoncer le contrat qui liait Bayard à la Sofedis.
Voilà, on assiste à ce grand ballet de petits poissons mangés par les moyens poissons, engloutis à leur tour par de plus gros poissons qui se bouffent eux-mêmes entre eux. Ils précarisent la profession, et mettent à mal un peu plus chaque jour un monde du livre à l’économie bien fragile.
Le monde du livre, du moins à travers ces gros poissons, continue de scier sciemment la branche sur laquelle il repose, et tout le monde assiste au spectacle avec la tragique sensation de ne pouvoir rien faire.
Ce système néo-libéral court à sa perte, et entraîne tout le monde avec lui.
Franchement, ça me rend dingue tout ça. D’autant qu’avec notre librairie, j’ai parfois (souvent ?) l’impression de participer activement à ça.
Alors je prends un peu de recul, j’essaye de me rassurer, et je me dis qu’à défaut de pouvoir sauver le monde, je me dois de contribuer à notre petit édifice, de récolter les graines de tout ce que l’on a semé, et de les distiller avec le plus grand nombre, en espérant qu’un jour les germes de nos espoirs seront la réalité de demain.
Mon coup de cœur ira à celles et ceux qui font bouger ce petit monde de l’édition. Les auteurs et les illustrateurs, bien mis à mal ces derniers temps, qui résistent et se battent pour valoir leurs justes droits.
Les maisons d’édition qui se créent et par là osent défier le marasme économique dans nous sommes plongés. Je pense à l’Agrume, avec Chloé Marquaire et Guillaume Griffon qui ont su créer une belle et trépidante maison d’édition, à Julien Magnani pour sa force créative et son intelligence, aux toutes jeunes éditions des éléphants, et je pense à Valérie Cussaguet et Brune Bottero des Fourmis Rouges, parce que la naissance de leur maison d’édition est arrivée au moment où nous avions besoin d’un signe fort pour nous accrocher. Elles sont arrivées au moment où nous en avions le plus besoin, mais elles ne le savaient pas 🙂
Alors on les embrasse bien fort toutes les 2 (et Martin aussi, on voudrait pas qu’il soit jaloux), et on leur dit qu’on les aime.
Jean Pichinoty est libraire à la super librairie La soupe de l’espace que vous pouvez découvrir 9 avenue des îles d’or à Hyères (83). Mais si vous n’habitez pas dans le coin, vous pouvez commander sur internet sur la boutique en ligne ici (c’est quand même mieux que les gros sites américains qui vendent des livres comme des robots mixeurs). Et si vous n’habitez pas dans le coin et que vous n’aimez pas acheter sur internet, vous pouvez tout de même visiter le super blog de La soupe de l’espace là.
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
J’aimais particulièrement les thèmes abordés par Charlotte Moundlic (et j’adorais les illustrations d’Olivier Tallec) mais après avoir lu cet entretien, je les aime plus plus !!!
Coucou La Mare aux mots!!
Merci encore pour ce beau mercredi!! Charlotte Moundlic m’a attirée par son roman les invités que j’ai adoré. Je l’ai fait lire à ma mère qui, elle aussi, a adhéré en trouvant le texte fort en étant simple et bien écrit. Nous le lisons aussi aux classes car texte court. Et puis, l’album la croûte est magnifique et j’adore les illustrations d’Olivier Tallec!!
Et merci à Jean Pichinoty pour son coup de gueule/coeur!!
Bonne et belle journée!!
Bonjour à tous, double plaisir aujourd’hui, j’aime beaucoup le travail de Charlotte Moundlic et mon fils de 3 ans est fan de Olivier Tallec, et que dire de la Soupe de l’ Espace ! leur blog est dans mes favoris depuis fort longtemps, et je rêve d’entrer dans leur merveilleuse librairie ! Bonne continuation,