J’adore le trait de crayon de Kris Di Giacomo, j’avais envie de lui poser quelques questions, elle a accepté, merci beaucoup à elle. J’espère que si vous ne connaissez pas son travail, cette interview vous donnera envie de le découvrir. D’autre part je vous avais parlé d’une nouvelle rubrique dans Les invités du mercredi, ça s’appelle Le tour de la question et c’est juste en dessous de l’interview. J’espère que ce nouveau rendez-vous vous plaira !
Et puisqu’on parle d’interview, si ça intéresse certains d’entre vous, vous pouvez lire la mienne sur le blog Oeil d’ailleurs.
L’interview du mercredi : Kris Di Giacomo
Quel a été votre parcours ?
Doudou, cloches de vaches, montagnes, chocolat, forêts, chats, solitude, déménagements, nouveautés, changements de pays, découvertes, curiosité, se poser beaucoup de questions, errer, se tromper, école d’art, ville, l’odeur de la peinture à l’huile, vivre seule, enseigner l’anglais aux enfants, la compagnie des crayons et des carnets, le café, trouver petit à petit un métier, toujours se poser plein de questions…
Quels sont vos souvenirs de lecture d’enfant, d’adolescente ?
Toujours en anglais : Winnie the Pooh, Maurice Sendak, Roald Dahl, Astrid Lindgren, S.E. Hinton…
Ces livres vous ont-ils inspirée ?
Sûrement, mais je pense que le déclencheur c’était des visites en librairies plus récemment, en France quand j’ai découvert les beaux livres des artistes contemporaines comme Hélène Riff, Anne Herbauts, Frédérique Bertrand… Là j’ai trouvé un monde où tout était possible et qui me parlait directement.
Comment travaillez-vous ? Quelle est votre technique ?
J’aime tout mélanger. Je finis toujours par scanner et bricoler les images à l’ordinateur mais les premiers gestes sont au crayon, peinture, collages, machine à écrire, taches de café, objets trouvés… dans des carnets, sur des feuilles libres, en bazar, à l’envers…
Parlez-nous de votre collaboration avec Séverine Vidal. Comment avez-vous travaillé sur Prune ?
C’est notre éditrice qui m’a envoyé les premiers tomes de Prune. J’ai tout de suite aimé le ton de ces textes et je sentais que cette petite fille avait un bon caractère. J’ai passé beaucoup de temps à chercher ce personnage (qui s’appelait d’abord Cerise, puis Myrtille, et enfin Prune) Comme c’était, dès le départ, une série, il fallait que je puisse la dessiner dans toutes les situations et qu’elle soit reconnaissable sur la durée. Ce n’est pas quelque chose que je fais facilement alors je me suis appliquée !! Une fois les personnages un peu cernés, j’ai pris mes feuilles blanches et mon crayon au café et j’ai dessiné les situations en vrac. De retour chez moi j’ai scanné les dessins au crayon et bricolé les compositions sur l’ordinateur. Ensuite j’ai colorié en utilisant Photoshop et une tablette graphique. C’était la première fois que je coloriais comme ça tout un livre à l’ordi. C’était amusant. Mais long !
Quels sont vos projets ?
Les auteurs avec qui je travaille ne sont jamais en panne de supers idées alors je ne chôme pas !
Je continue ces collaborations et puis je cherche toujours en moi, des nouvelles façons de faire, de nouvelles idées… J’aimerais aussi écrire mes propres histoires. On verra !
Derniers livres sortis :
- Prune cherche son style, illustration d’un texte de Séverine Vidal, Éditions Frimousse (2012)
- Sans le A (l’anti-abécédaire), illustration d’un texte de Michaël Escoffier, Éditions Kaléidoscope (2012)
- Prune et la colo d’enfer, illustration d’un texte de Séverine Vidal, Éditions Frimousse (2012), que nous avons chroniqué ici.
- Le loup Tralala, illustration d’un texte de Michaël Escoffier, Éditions Kaléidoscope (2012)
- Prune et La Grosse Rumeur, illustration d’un texte de Séverine Vidal, Éditions Frimousse (2011), que nous avons chroniqué ici.
- Le fils de la nouvelle fiancée de papa, illustration d’un texte de Séverine Vidal, Éditions Frimousse (2011), que nous avons chroniqué ici.
- Quand le loup a faim, illustration d’un texte de Christine Naumann-Villemin, Éditions Kaléidoscope (2011), que nous avons chroniqué ici.
- Je dis hello (cahier de jeu et d’exercices), Éditions Frimousse (2011)
- Mon Papa il est grand, il est fort, mais…, illustration d’un texte de Coralie Saudo, Éditions Frimousse (2010)
- Moi d’abord ! illustration d’un texte de Michaël Escoffier, Éditions Frimousse (2010)
- La mouche qui pète, illustration d’un texte de Michaël Escoffier, Éditions Kaléidoscope (2009)
- Ni vu ni connu, illustration d’un texte de Michaël Escoffier, Éditions Frimousse (2009)
Retrouvez Kris Di Giacomo sur son site : http://krisdigiacomo.over-blog.com/
Le tour de la question… Le titre
Une fois par mois je propose à plusieurs auteurs de répondre à une même question, ce mois-ci je leur ai proposé de nous parler du titre. Qu’est-ce qu’un bon titre ? Comment le choisit-on ? J’ai proposé aussi à un éditeur de nous parler de sa vision des choses. Petit bonus, je leur ai demandé quel est le titre, déjà pris, qu’ils auraient aimé avoir trouvé.
Sandrine Beau :
Le titre s’impose souvent à moi, comme un flash. Et il vient généralement très vite, parfois même avant la première ligne.
Du coup, quand il faut le changer à la demande de l’éditeur, j’ai toujours un (petit) pincement au cœur.
Par exemple, L’hippopotin s’appelait à l’origine Un si joli popotin et Des crêpes à l’eau, L’argent ne fait pas le bonheur. (Au début, ça fait drôle et puis finalement, on « adopte » ces nouveaux titres et on finit par les aimer beaucoup. Surtout si on les a choisis ensemble avec les éditrices !)
Un de mes titres préférés, c’est L’été où mon grand-père est devenu jaunophile. J’adore ce titre, que j’ai mis du temps à trouver cette fois ! Et heureusement, on ne m’a pas demandé de le modifier! D’ailleurs, il « accroche » beaucoup : les visiteurs sur les salons qui me parlent du livre suite à la lecture de ce mot inventé et les enfants que je rencontre dans leurs classes, qui, à leur tour, s’amusent à inventer des mots (carambarophile, sucettophile, etc…).
Le titre qu’elle aurait aimé avoir trouvé : Il sera quand même sur la couverture d’un de mes livres ! C’est fort, ça non ? Pourquoi ? Parce que c’est de la cervelle de ma pote Anne-Gaëlle Balpe qu’il a jailli et qu’il sera le titre du tome 3 de notre série Roulette Russe (co-écrit avec Séverine Vidal). Ce titre, c’est Fées d’hiver. Je le trouve beau, poétique et en même temps un peu mystérieux. Et il va comme un gant à la dernière aventure de nos 3 héros.
Son dernier livre sorti : Ma maman est comme ça, Limonade.
Son site : http://sandrinebeau.blogspot.fr
Annelise Heurtier :
Oh que oui, le titre est important… Primordial, j’ai envie de dire. Souvent, il donne le ton. Par exemple, avec Le prix de la trahison ou Passion fatale”, tu sais tout de suite ce qu’il y a dedans. Ou ce qu’il n’y a pas, d’ailleurs.
Ceci étant dit, à l’inverse, un titre-qui-déchire ne fait pas tout, n’est ce pas… Si le texte est mauvais, ça l’enfonce encore plus. Cela donne l’impression qu’il y a tromperie sur la marchandise.
Pour ma part, les titres de mes livres ont souvent été choisis par les éditeurs. Je dois avoir un piètre talent en la matière ! J’ai pu le regretter, surtout quand il s’agissait de titres hyper marketés, avec des “mots-clés” vendeurs à placer dedans… Mais parfois, on n’a pas vraiment le choix.
Généralement, la recherche n’est pas très longue et on tombe assez vite d’accord sur un intitulé. Mais parfois, cela se transforme en épopée ! Dernièrement, pour un roman grands-ados qui sortira l’année prochaine, j’avais trouvé un titre qui paraissait évident. LE titre, celui qui arrive tout seul, qui coule de source, qui colle à tes mots, qui d’ailleurs, ne semble n’exister que pour les accompagner…. Mais (ô rage ô désespoir) le titre était déjà déposé. Après des semaines de recherches, des stagiaires expressément missionnés sur le sujet, des sondages – toute ma famille et toute la maison d’édition ont dû y passer, même le gars de la cantine – nous sommes arrivés à une liste restreinte de titres… qui ne faisaient que nous rappeler à quel point l’Autre était mieux.
Et puis, un matin, mon éditrice a eu l’idée de contacter directement l’éditeur “propriétaire” du titre… Qui a accepté qu’on le reprenne ! Terrible, non ? (La vie d’artiste est trépidante, n’est ce pas).
Le titre qu’elle aurait aimé avoir trouvé : il y avait un titre que j’adorais, mais je ne m’en rappelle plus (la preuve que le fameux “bon” titre, il faut qu’il soit un minimum mémorisable, sinon, tu ne peux même pas acheter le bouquin…)…Ha si, je l’ai ! Je règle mes pas sur les pas de mon père. Googlisation faite, il s’agit d’un film, que je n’ai pas vu, d’ailleurs. Peut-être qu’il est complètement nul. Mais je ne sais pas pourquoi, il y a quelque chose dans cette phrase qui m’avait touché. Peut-être que cela faisait écho à quelque chose en moi ?
Son dernier livre sorti : Olaf, le géant mélomane, Benjamins Media
Son site : http://histoiresdelison.blogspot.fr
Régine Joséphine :
Le titre : animal fabuleux, secret, particulièrement recherché par les écrivains et artistes de tous bords. Très taquin, il se cache au détour d’une page ou entre les mots. Car il le sait : il est indispensable au livre mais il adore se faire courtiser. Certains auteurs, agacés par ses manières, le chassent, le piègent et le triturent sans vergogne pour lui donner la forme souhaité. Un mot ? Deux ? Une expression ? Le titre piégé passe par tous les états avant que l’auteur lui imprime sa forme définitive.
D’autres fois, pour tromper le titre, l’auteur l’ignore, se détourne, lui fait croire qu’il n’est pas intéressé. Vexé, le titre alors s’approche, grimace, fait le guignol pour attirer son attention. Car le titre est plein d’orgueil et d’égocentrisme. Il déteste qu’on le repousse, allant jusqu’à hanter les rêves de celui qui l’ignore. C’est alors que le piège se referme sur lui. D’un coup, l’auteur l’attrape et l’oblige à se soumettre.
Mais pour certains auteurs, dont moi, le titre se montre amical. Souvent, pendant que j’écris, il s’approche tout doucement, et tout à coup, il apparaît en pleine lumière, sans que je l’ai vraiment cherché. Et je sais alors que c’est le meilleur titre possible pour mon histoire. Comme un cadeau exposé aux lecteurs, une promesse qui attire son attention et aiguise sa curiosité. Et si le lecteur prend le livre en main, alors je sais que le titre et moi avons rempli notre rôle.
Son dernier livre sorti : Je t’aime, signé Lou(p), Oskar
Son site : http://www.regine-josephine.com
Estelle Billon-Spagnol :
À chaque fois, le titre vient tout seul, jamais en le cherchant, toujours en faisant un truc qui n’a rien à voir. Et il arrive bien avant que l’histoire ne soit écrite ou même pensée. Un ensemble de mots qui me passe par la tête, que je trouve drôle ou percutant, qui me parle en tout cas et dont j’ai envie de connaître ce qu’il raconte.
C’est le socle sur lequel tout se construit. Qui amène presque instantanément les noms des personnages.
Ensuite vient l’étape beaucoup plus laborieuse, des mois après le “tilt” du titre parfois, l’écriture d’une histoire qui tienne la route.
En gros, quand un titre me tombe dessus, je ne peux pas ne pas aller plus loin.
Pour l’instant, un seul a été discuté : Le préau des z’héros. Au départ, ce petit roman s’appelait Le prince des Bulots, mais l’éditeur était moyennement convaincu. J’ai eu beaucoup de mal à retrouver quelque-chose et lorsqu’on s’est mis d’accord sur le nouveau titre, il m’a fallu un peu de temps pour me dire que ça ne changeait rien à l’histoire écrite. Comme si mon bouquin sortait de chez le coiffeur, méconnaissable, avec une nouvelle coupe !
Le titre qu’elle aurait aimé avoir trouvé : Un mélange entre La boulangerie de la rue des Dimanches d’Alexis Galmot et Till Charlier et Oh non, Georges ! de Chris Haughton. Un titre intriguant plein de peps, de fantaisie et de poésie.
Son dernier livre sorti : La rentrée de Jacotte, Hélium
Son site : http://estellebillonspagnol.blogspot.fr
Vision de l’éditeur :
Isabelle Bauer (des éditions Philomèle) :
Trouver le titre d’un nouvel album ne m’a jamais vraiment posé un problème, bien que cela soit une décision très importante : l’auteur y a déjà réfléchi… « à juste titre » !
Les auteurs dont le texte (ou son projet) est bien maîtrisé, avec une authenticité qui le rend singulier, ont de bonnes idées. Tout au plus m’est-il arrivé de raccourcir un titre, comme pour La Symphonie des couleurs, qui s’appelait au départ Gaspard et la symphonie des couleurs. Dans ce qui m’est proposé d’emblée, se reflète une idée, un style bien sûr, mais aussi et surtout une façon d’être proche de l’enfance sans affectation. Je crois, j’espère, que lorsqu’on regarde l’ensemble du catalogue de Philomèle, on perçoit cet esprit-là.
Pour le reste, quand il me faut chercher moi-même, l’idée me vient souvent spontanément, sans doute parce que, après 15 ans de presse et l’habitude de réfléchir à la titraille, je suis bien rôdée à ce type d’exercice ! J’aime qu’un titre reflète soit l’intention, soit un moment-clé du récit, avec un petit côté intrigant. C’est le cas par exemple de Qui a éteint le soleil ?. En réalité, je trouve qu’il est plus difficile de trouver la bonne illustration de couve qu’un titre !
Le titre qu’elle aurait aimé avoir trouvé : Pas de regrets quant à ceux déjà utilisés : s’ils existent c’est qu’ils sont à leur place, posés sur une couverture… Il m’arrive souvent d’acheter un livre pour son titre.
Le dernier livre sorti aux éditions Philomèle : Qui a éteint le soleil ?
Son site : http://www.editionsphilomele.fr/
Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !
J’adore ce mercredi encore une fois 🙂
Super intéressant !!!
@Sardine : moi aussi j’adore ton titre ” L’été où mon grand-père est devenu jaunophile” 😉
Super cette réunion de textes autour du titre d’unlivre !!!
Annelise j’ai adoré votre histoire ^^
chouette mercredi.
Je dirai juste que l’interview de Kris était trop courte. 0:-)
C’est chouette de découvrir comment se choisit un titre, le cheminement etc.
Excellent !!
excellent ce mardi matin, je repasserai 🙂
Trouver le bon titre, essentiel, primordial !!! Très bon article !