Pour la huitième année, cet été encore, on vous propose une rubrique que vous aimez beaucoup (et nous aussi !), Du berger à la bergère. Tous les mercredis jusqu’à la rentrée, ce sont des auteur·trices et des illustrateur·trices qui posent trois questions à une personne de leur choix. Puis c’est à l’interviewé·e de poser trois questions à son tour à son intervieweur·euse d’un jour. Après Catherine Louis et Bernard Friot, Irène Bonacina et Anne Crausaz, Claire Gaudriot et Maria Jalibert, Jérôme Peyrat et Gilles Baum, Anne Cortey et Fanny Chartres, Sophie Nanteuil et Sophie Astrabie, Séraphine Menu et Fleur Oury, cette semaine c’est Illana Cantin qui a choisi de poser ses questions à Anne-Laure Bondoux !
Illana Cantin : Je commence par une question classique, mais à mon avis, elle en dit beaucoup : où écrivez-vous ? Plutôt bureau bien rangé ou décor désordonné ?
Anne-Laure Bondoux : Bureau en vrac, sans conteste. Et depuis que j’ai deux lieux de vie en alternance, je constate que le vrac se déplace avec moi, j’aimante le fouillis. J’aime bien le fouillis. Puis tout ranger quand je termine un roman, avant de remettre du désordre pour le suivant.
Illana Cantin : J’ai lu L’aube sera grandiose il y a déjà quelques années, et pourtant, j’ai encore des images vivides des lieux et de l’ambiance tels qu’imaginés pendant la lecture. C’est quoi le secret de décors qui marquent ?
Anne-Laure Bondoux : Je suis très heureuse que ces images restent, merci de me le dire (et merci au passage pour le mot « vivide » que je ne connaissais pas !). Je n’ai pas vraiment de secret au sens technique. Mais la conviction que, pendant l’écriture, il faut habiter nos lieux imaginaires avec toute notre présence, y compris physique, pour qu’ils puissent exister ensuite dans la tête des lectrices et lecteurs. C’est comme un exercice de méditation, un état dans lequel il est d’ailleurs difficile de rester en permanence. C’est pour ça surtout que j’ai besoin d’être seule quand j’écris. Pour arriver à créer cette bulle.
Illana Cantin : Je crois qu’on a tous un personnage qui nous guide dans notre écriture depuis le tout début, auquel on pense encore aujourd’hui, même si son histoire est terminée depuis longtemps… Quel est le vôtre ?
Anne-Laure Bondoux : Je n’ai jamais vu les choses de cette façon, je l’avoue. Pour ma part, je ne saurais pas en distinguer un seul. J’ai plutôt l’impression d’être le réceptacle d’une multitude de personnages et de personnes qui ont laissé leurs empreintes plus ou moins fortes en moi, et dont l’amalgame devient (parfois) un nouveau personnage. C’est mystique comme question, ma réponse l’est aussi ;-).
Illana Cantin : Enfin, un mot que vous aimez sans raison particulière ?
Anne-Laure Bondoux : Campanule. J’y pense parce que c’est le printemps et parce que c’est joli. Voilà.
Anne-Laure Bondoux : Durant le processus d’écriture d’un roman, quel est le moment que tu adores ? Et forcément… quel est le moment que tu détestes ?
Illana Cantin : J’aime comparer un roman à une pelote de laine. Au début, tout le travail de l’auteur est d’emmêler le fil de telle sorte à ce qu’il n’ait besoin que de tirer sur un fil pour tout démêler. C’est comme ça que je sais que mon intrigue est bien mise en place, quand il me suffit d’un chapitre, d’un paragraphe, d’une phrase pour tirer sur le fil et l’histoire se termine sans oublis de ma part et sans amertume pour le/la lecteur/rice.
J’adore donc le dénouement, car quand j’ai bien travaillé — du moins, à mon sens — les mots viennent instinctivement pendant les derniers chapitres et c’est très satisfaisant.
De même, ce que j’aime moins, c’est le milieu, quand toutes les intrigues — et donc le fil — sont emmêlées — et qu’il faut se battre pour trouver une cohérence. Cela peut me prendre des mois !
Anne-Laure Bondoux : Est-ce que tu pourrais vivre ta vie sans écrire ?
Illana Cantin : Honnêtement ? Non. J’ai déjà eu de longues périodes sans écrire, mais jamais sans réfléchir à des histoires. Je ne doute pas qu’à des moments de ma vie, je n’aurai pas le temps, pas l’énergie, pas l’envie… Mais j’y reviendrai forcément.
J’ai un grand besoin que les histoires dans ma tête ne soient pas qu’éphémères.
Je crois aussi que j’apprécie trop le sentiment d’intense introspection qui me prend quand j’écris un moment pour y renoncer.
Anne-Laure Bondoux : Pour ma part, je peux acheter un roman juste pour son titre. Est-ce que tu pourrais citer un titre de roman que tu trouves magnifique, ou disons super bien trouvé ?
Illana Cantin : Pour moi, un des plus beaux titres de livre est « Tendre est la nuit ». Je ne saurais l’expliquer, c’est à la fois poétique, simple et impactant.
Bibliographie d’Illana Cantin :
- Les 24 états d’âme de Gabin et Agathe, roman, Hachette Romans (2022), que nous avons chroniqué ici.
- Georges, le monde et moi, roman, Le Livre de Poche Jeunesse (2021), que nous avons chroniqué ici.
- Rose Rage, roman, Le Livre de Poche Jeunesse (2020).
- Jefferson’s World 1, roman, Hachette Romans (2021).
- Jefferson’s World 2, roman, Hachette Romans (2021).
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Bibliographie sélective d’Anne-Laure Bondoux :
- Oh happy day, roman coécrit avec Jean-Claude Mourlevat, 12-21 (2020).
- La magnifique, roman, Bayard Jeunesse (2019).
- Série La Tribu de Vasco, romans, Gallimard Jeunesse (3 tomes, 2018).
- L’aube sera grandiose, roman, Gallimard Jeunesse (2017).
- Et je danse, aussi, roman coécrit avec Jean-Claude Mourlevat, 12-21 (2015).
- Tant que nous sommes vivants, roman, Gallimard Jeunesse (2014).
- Le temps des miracles, roman, Bayard Jeunesse (2009).
- Les larmes de l’assassin, roman, Bayard Jeunesse (2003).
- Voilà comment je suis devenu un héros !, roman, Syros (2002).
- Le destin de Linus Hoppe, roman, Bayard Jeunesse (2001).
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Aimait la littérature jeunesse bien avant d’avoir des enfants mais a attendu d’en avoir pour créer La mare aux mots. Goût particulier pour les livres pas gnangnan à l’humour qui pique !